Marruecos: país clave para Japón en África
Le Japon est la troisième plus grande économie du monde en termes de produit intérieur brut et considère le Maroc comme un allié stratégique en tant que pays de référence sur le continent africain en raison de sa position politique actuelle et de son développement économique.
La preuve en est que le pays d'Afrique du Nord est la deuxième destination des investissements japonais en Afrique, grâce à l'activité de 75 entreprises qui emploient jusqu'à 50 000 personnes au Maroc, un scénario qui place le royaume alaouite en excellente position pour attirer davantage d'investissements du pays asiatique.
Cette relation étroite entre les deux partenaires est apparue clairement après le dernier contact télématique entre Nasser Bourita, ministre marocain des Affaires étrangères, et son homologue japonais Yoshimasa Hayashi, au cours duquel ce dernier a indiqué que davantage d'entreprises japonaises sont intéressées par le Maroc pour sous-traiter leur propre production dans divers secteurs.
L'un des grands attraits du Maroc réside dans sa capacité logistique, avec des exemples comme le port de Tanger Med, une référence internationale majeure en matière de trafic commercial, et dans son industrie, notamment dans les secteurs de l'automobile et des composants, ce qui est très attractif pour un pays comme le Japon, qui compte des entreprises comme Sumimoto, Fujikura Automotive et Yazaki, qui emploient 30 000 personnes sur le marché marocain.
Le Japon considère également le Maroc comme un moyen de s'implanter plus solidement dans le secteur bancaire africain. La banque japonaise Mizhu Bank a signé un accord avec Attijariwafa Bank, tandis que la banque marocaine BCP a signé un pacte avec Sumitomo Mitsui Banking Corporation pour travailler ensemble sur le marché africain. En outre, dans le domaine de l'agriculture, le Maroc bénéficie d'un excédent commercial avec le Japon, qui compte sur les fournitures marocaines pour 20 % de ses importations d'engrais, comme le rapporte The North Africa Post.
Lors de la conversation entre les ministres des affaires étrangères des deux pays, Yoshimasa Hayashi a qualifié le Maroc de "partenaire clé" et s'est montré tout à fait en phase avec son homologue marocain.
Et ce malgré le fait que Rabat n'ait pas participé au Forum de coopération Japon-Afrique de la TICAD à Tunis pour protester contre la réception donnée par le président tunisien Kais Saied à Brahim Ghali, leader du Front Polisario, le grand rival du Maroc sur l'importante question du Sahara occidental.
Le Maroc a décidé de rappeler son ambassadeur en Tunisie à la suite de cet acte "hostile et préjudiciable", et le gouvernement tunisien a ensuite décidé de lui rendre la pareille par le même geste politique. La Tunisie a exprimé sa surprise face à ce problème et a justifié cette invitation à Brahim Ghali comme quelque chose qui avait déjà été fait en d'autres occasions, comme le rapporte l'agence Europa Press. Mais le Royaume a souligné dans une déclaration officielle que la "tentative de justification de l'acte hostile" contient "de nombreuses approximations et faussetés". Le communiqué marocain indique que seuls les pays ayant reçu une invitation signée par le premier ministre japonais et le président tunisien peuvent participer à la TICAD. "C'est dans ce cadre que 50 invitations ont été envoyées aux pays africains qui ont des relations diplomatiques avec le Japon. Par conséquent, la Tunisie n'avait pas le droit d'établir un processus d'invitation unilatéral", a noté le Maroc dans la note officielle.
Bien que Rabat n'ait pas participé à la conférence de la TICAD qui s'est tenue sur le sol tunisien, les relations entre le Maroc et le Japon restent excellentes. A cet égard, le ministre japonais des affaires étrangères a affirmé que la position de son pays de ne pas reconnaître le Sahara comme un pays séparé du Maroc "n'a pas changé". Le Japon continue de montrer son respect pour l'intégrité territoriale du royaume alaouite.
Le ministre japonais a souligné que le Japon n'avait pas invité le Front Polisario à ce sommet et a exprimé la volonté de son pays de continuer à travailler avec le Royaume dans le cadre de la TICAD.
Pour sa part, Nasser Bourita a souligné l'engagement du Japon à promouvoir un forum de partenariat avec l'Afrique pour favoriser le développement du continent africain, la stabilité et le bien-être de ses peuples, rappelant la nécessité de renforcer le sommet de la TICAD en tant que forum de partenariat et de développement et saluant "la fermeté de la position affichée par la délégation japonaise à Tunis".
Plusieurs experts voient dans la position du Japon un soutien plus ou moins clair à la proposition du Maroc pour résoudre la question du Sahara occidental. Nofal Bouamri, analyste politique, a expliqué à Al-Arab que "s'il y a un côté positif à la crise actuelle entre la Tunisie et le Maroc due à la réception par le président tunisien Kais Saied du leader du Front Polisario, c'est que le Japon a réaffirmé son soutien à l'autonomie et au caractère marocain du Sahara et considère le Royaume comme un allié fondamental pour pénétrer l'Afrique". Ainsi, l'affirmation par le Japon de l'intégrité territoriale du Maroc reste fixe et inamovible.
Dans ce contexte, Mohamed Lakreni, professeur de relations internationales et de droit international, a confirmé que le dernier contact entre les ministres des Affaires étrangères marocain et japonais entérine la collaboration économique et l'harmonie politique entre les deux pays, comme le rapporte Al-Arab.
Cela s'inscrit dans le droit fil du bon travail diplomatique du Maroc. Le royaume alaouite a obtenu un soutien international considérable pour la question du Sahara occidental, qui est très importante pour le pays d'Afrique du Nord. Le Royaume propose une formule de large autonomie pour le Sahara occidental sous souveraineté marocaine, en tenant compte des résolutions de l'ONU, et cette proposition a reçu le soutien de pays importants, notamment après que l'administration américaine de Donald Trump ait reconnu en décembre 2020 la souveraineté marocaine du Sahara en échange de l'établissement par le Maroc de relations diplomatiques avec Israël, suite aux fameux accords d'Abraham, signé en septembre 2020, en vertu duquel des pays arabes comme les Émirats et Bahreïn ont établi des liens politiques avec l'État israélien dans le but de développer socialement et économiquement le Moyen-Orient et de pacifier la région face à des ennemis communs hostiles comme la République islamique d'Iran. D'autres nations, telles que l'Allemagne et l'Espagne, ont suivi le mouvement et ont favorisé la proposition du Maroc comme étant la plus sérieuse et la plus crédible pour le territoire sahraoui.
À l'opposé de cette tendance se trouve la position du Front Polisario, qui appelle à un référendum sur l'indépendance de la population sahraouie. Cette option bénéficie d'un soutien moindre au niveau international, notamment de la part de l'Algérie, grand rival politique du Maroc au Maghreb, qui a rompu ses relations avec le royaume alaouite en août dernier en raison de graves divergences politiques, malgré la main tendue que le Maroc a tendue à son voisin algérien à plusieurs reprises, comme la dernière en date du roi Mohammed VI dans son discours de la fête du Trône en 2022.