Marché de l'hydrogène vert au Maroc : besoins et barrières
Le Maroc a choisi l'hydrogène vert comme une source d'énergie d'avenir qui lui permettra de se différencier de ses concurrents. Les conditions météorologiques du pays lui sont très favorables, reflétant son potentiel de production d'énergie renouvelable. Cependant, le stress hydrique et les difficultés d'accès au marché constituent un défi inévitable pour le développement réussi du marché.
- D'importants besoins d'investissement dans les énergies renouvelables
- Pénurie d'eau
- Le besoin d'adaptation dans le cadre des politiques publiques
- Barrières à l'entrée pour le déploiement et la production au Maroc
- Cadre réglementaire local
- Cadre réglementaire (mondial)
- Obstacles à l'exportation vers l'UE
Malgré l'option crédible du Maroc comme l'un des principaux producteurs d'hydrogène vert et de ses sous-produits dans un avenir proche grâce à son grand potentiel de production d'énergies renouvelables, le pays nord-africain doit surmonter certains obstacles et répondre à certains besoins spécifiques pour développer avec succès le marché de l'hydrogène.
D'importants besoins d'investissement dans les énergies renouvelables
Selon la feuille de route marocaine de l'hydrogène vert, le développement de cette industrie au Maroc nécessiterait un investissement de 76 milliards de dollars entre 2020 et 2050, incluant la production d'énergie renouvelable, les électrolyseurs et les usines de conversion.
Il ne faut pas perdre de vue les investissements nécessaires dans les infrastructures associées à la production, au transport et à l'exportation de l'hydrogène vert, à savoir les gazoducs dédiés, les stations de ravitaillement en hydrogène vert, les installations de stockage de l'hydrogène vert et de ses dérivés, ainsi que l'adaptation des plateformes portuaires pour son exportation.
Pénurie d'eau
Le Maroc occupe la 22e place dans le classement national du stress hydrique de l'Institut des ressources mondiales (WRI), ce qui signifie que le pays manque naturellement de cette ressource nécessaire à la production d'hydrogène. Selon les données de la Banque mondiale, le secteur agricole, qui représente 14 % du PIB marocain, est le plus grand consommateur d'eau, avec près de 88 % de la demande totale.
Le besoin d'adaptation dans le cadre des politiques publiques
Ces investissements importants dans la production d'hydrogène vert et les infrastructures de transport devraient être largement financés par le secteur privé. Pour faciliter ces investissements, le gouvernement devrait finaliser sa politique gazière et son cadre réglementaire et les étendre à l'hydrogène vert.
Le Maroc a signé plusieurs accords commerciaux et d'investissement avec des pays du monde entier, notamment des accords de libre-échange avec l'Union européenne et les États-Unis, qui peuvent faciliter l'exportation de l'hydrogène vert produit au Maroc.
Barrières à l'entrée pour le déploiement et la production au Maroc
Actuellement, il n'existe pas de barrières tarifaires spécifiques au Maroc affectant la production et la vente d'hydrogène vert. Des outils de soutien sont disponibles pour les entreprises qui souhaitent investir et/ou s'installer dans le pays pour la production.
Cependant, certaines barrières non tarifaires peuvent affecter la production et la vente d'hydrogène vert au Maroc, comme le manque d'infrastructures adéquates pour produire, stocker et transporter de grandes quantités d'hydrogène vert. Cela peut augmenter les coûts de production et limiter la capacité d'exportation des producteurs.
Cadre réglementaire local
Le Maroc ne dispose pas actuellement d'un régime réglementaire complet ou de réglementations spécifiques qui abordent et prennent en compte les questions liées à l'hydrogène, comme c'est le cas dans la plupart des juridictions de la région.
Les installations de production d'hydrogène peuvent être classées comme "installations à risques majeurs" en raison du stockage et de la manipulation de grandes quantités de matières dangereuses, ce qui implique des exigences strictes en matière de sécurité, de rapports, de licences et d'autorisations spécifiques de la part de diverses autorités compétentes.
La production d'électricité pour les projets d'hydrogène vert peut être régie par la loi 13-09 sur les énergies renouvelables, avec des régimes de déclaration et d'autorisation qui dépendent de la capacité installée.
Certains projets de production d'hydrogène sont structurés dans le cadre du régime d'autoconsommation énergétique, en particulier si le même développeur est à la fois producteur d'énergie et d'hydrogène.
Si l'installation de production d'énergie renouvelable ne se trouve pas sur le même site que l'installation de production d'hydrogène, une connexion au réseau national sera nécessaire pour transporter l'électricité jusqu'au site de production d'hydrogène.
Garantir un volume suffisant d'eau de qualité adéquate pour l'électrolyse est un défi majeur. L'utilisation de l'eau, en fonction de sa source, peut nécessiter une autorisation ou une concession, et la construction d'une usine de dessalement peut s'avérer nécessaire.
Le transport et le stockage de l'hydrogène sont soumis à diverses lois et réglementations. Le Maroc ne dispose pas d'un réseau de canalisations pour l'hydrogène et le réseau de gaz naturel est limité.
Le cadre réglementaire actuel pour les exportations d'hydrogène au Maroc et dans le pays de destination doit être compris. Le plus grand réseau de gazoducs au Maroc, le Gazoduc Maghreb Europe (GME), pourrait être utilisé pour le transport de l'hydrogène.
Maghreb Europe Gas Pipeline (GME), pourrait constituer un itinéraire viable pour le transport vers l'Espagne, moyennant certaines modifications.
Cadre réglementaire (mondial)
L'établissement de normes est un processus long et fastidieux et, à l'heure actuelle, la majeure partie de l'activité réglementaire s'est concentrée sur l'établissement des paramètres de définition et de certification de l'hydrogène à faibles émissions afin de mettre au point des normes et des systèmes de certification.
Le problème réside dans l'absence de consensus sur la question de savoir si l'hydrogène nucléaire et l'hydrogène à faibles émissions doivent être traités de la même manière.
L'Agence internationale de l'énergie (AIE) a récemment publié un règlement contenant de nouvelles recommandations pour la production d'hydrogène ; elle considère que l'hydrogène bleu produit à partir de combustibles fossiles est propre car il maintient les émissions en dessous de la limite de 7 kilogrammes.
Obstacles à l'exportation vers l'UE
La Commission européenne a adopté deux actes délégués dans le cadre de la directive sur les sources d'énergie renouvelables qui jouent un rôle clé dans la décarbonisation de l'industrie et du transport lourd.
Ces actes établissent des règles détaillées pour définir l'hydrogène renouvelable dans l'UE et font partie d'un cadre plus large qui comprend des investissements dans les infrastructures énergétiques, des règlements sur les aides d'État et des objectifs législatifs pour l'hydrogène renouvelable dans l'industrie et les transports.
Le premier acte délégué définit les conditions dans lesquelles l'hydrogène, les carburants à base d'hydrogène et les autres vecteurs énergétiques peuvent être considérés comme des carburants renouvelables d'origine non biologique.
Le deuxième acte délégué établit une méthode de calcul des émissions de gaz à effet de serre produites par les carburants renouvelables d'origine non biologique tout au long de leur cycle de vie, de la source au consommateur final.
Le mécanisme d'ajustement aux frontières pour le carbone (CBAM) est une initiative de l'UE visant à lutter contre le risque de "fuite de carbone". Ce risque fait référence à la possibilité pour les entreprises de délocaliser leur production dans des régions où les réglementations climatiques sont plus souples, évitant ainsi les coûts associés aux émissions de carbone et sapant les objectifs climatiques de l'UE.
La feuille de route SET, ou Sustainable Electricity Trade Pathway, est un engagement pris par cinq pays : la France, l'Allemagne, le Maroc, le Portugal et l'Espagne. Cet engagement a été établi lors de la COP22 à Marrakech en 2016.
L'objectif de la feuille de route SET est d'ouvrir les marchés des énergies renouvelables de ces pays les uns aux autres. Cela implique la suppression des barrières, tant physiques que commerciales, afin de faciliter la collaboration et l'échange d'électricité verte au-delà des frontières.