Marruecos aspira a ser pionero en reciclaje de residuos en África
Fin juillet, la ville marocaine d'Essaouira devient un pionnier du recyclage des déchets en Afrique, en mettant l'accent sur la sensibilisation locale, l'inclusion sociale et la création de valeur territoriale. Dans un premier temps, seuls les plastiques, le carton, le verre et les graisses de friture seront récupérés. À terme, les textiles et le pain rassis peuvent être incorporés au processus, ainsi que d'autres déchets fermentescibles pouvant être convertis en biomasse.
Le projet a été officiellement lancé à la fin du mois de mai et devrait entrer en phase opérationnelle dès la fin du mois de juillet. "Le projet Mogagreen fera d'Essaouira une ville pionnière au Maroc et sur le continent africain", a déclaré le conseiller du roi Mohamed VI et président-fondateur de l'association Essaouira-Mogador, André Azoulay.
Cette initiative vise à réduire à zéro la quantité de déchets recyclables dans les décharges de la ville d'ici 2030. Le projet est mis en œuvre par l'association Be Green. Elle regroupe plusieurs entreprises, dont Inveko-Environnement et Zéro Zbel.
"Mogagreen n'est que le début, c'est le pilote à l'échelle 1. Nous pensons que le secteur de la gestion des déchets n'a pas encore été exploité. Grâce à la technologie et à la numérisation, [nous] voulons créer un modèle alternatif qui peut avoir un impact significatif sur l'économie circulaire et la durabilité des villes", a déclaré Youssef Chaqor, fondateur d'Inveko-Environnement, à Middle East Eye.
Mogagreen n'est qu'un début, un projet pilote avec un potentiel d'extension qui vise à faire d'Essaouira et du Maroc une puissance durable, en Afrique et dans le monde. Actuellement, le modèle traditionnel de collecte et d'enfouissement dans des décharges désignées mais débordantes prévaut. L'une des nombreuses innovations introduites par le projet est la numérisation du processus.
L'initiative est actuellement engagée dans une campagne de sensibilisation pour obtenir un soutien. Ils ont une approche multicanal et une grande campagne de sensibilisation du public. " Les campagnes de sensibilisation et d'éducation représentent 1,7 million de dirhams (190 000 dollars) sur un budget global de 5,5 millions de dirhams ", précise Marouane Malek, chef de projet chez Inveko-Environnement, ce qui en fait une phase clé du projet.
Dans le cadre du projet Mogagreen, au moins 20 000 ménages, 300 entreprises et 20 écoles d'Essaouira pourront se débarrasser de leurs déchets en cliquant sur un bouton. Il leur suffit de télécharger une application, développée spécifiquement pour organiser et faciliter la collecte des déchets, d'informer les collecteurs via WhatsApp ou de porter eux-mêmes leurs déchets aux points identifiés. Cela permet de rationaliser la gestion responsable des déchets d'une manière qui convient à la population.
Les récompenses sont l'une des incitations au recyclage proposées par l'application. Les utilisateurs peuvent gagner des points en fonction de la quantité de déchets triés. Ces points peuvent être échangés contre diverses récompenses, par exemple des recharges de téléphone portable. Le projet prévoit également la création d'une cinquantaine d'emplois "verts", ainsi que le travail indépendant de collecteurs de déchets "bouaara".
D'autre part, au bout de la chaîne, les entreprises et les clusters seront chargés de donner une valeur économique ou énergétique aux déchets. "Notre objectif est de construire un écosystème étendu. Les parties peuvent participer en tant que co-investisseurs dans la plateforme [de tri secondaire] ou en récupérant des matériaux", a déclaré Chaqor. Dans la première phase, seuls les plastiques, le carton, le verre et les graisses de friture seront récupérés. Par la suite, le spectre sera élargi.
Parmi les défis auxquels Mogagreen doit faire face à court terme figurent l'obtention de financements de la part des grandes marques de l'industrie alimentaire et le soutien d'une stratégie nationale aussi ambitieuse que le projet. Le Maroc produit 6,9 millions de tonnes de déchets par an. Alors que le plan national de gestion des déchets ménagers vise à recycler 20 % des déchets d'ici 2022, l'année dernière, le taux de recyclage n'a été que de 7 %. Le recyclage des plastiques a représenté 11 %.
Cette initiative s'ajoute à la tendance à la durabilité dans le royaume alaouite. L'année dernière, le Maroc a lancé son plan "Génération Green 2020-2030", qui devrait permettre d'augmenter le PIB agricole du pays et de doubler les exportations de fruits et légumes dans les années à venir, complétant ainsi le Plan Maroc Vert (lancé en 2008). Une autre startup qui illustre ce changement est Pikala Bike, basée à Marrakech, qui cherche à diffuser et à déstigmatiser le vélo comme un mode de transport "efficace, simple et chic".