Rosa Cañadas : « Les entreprises européennes doivent savoir qu'elles trouveront du personnel qualifié en Afrique »

Rosa Cañadas, présidente de la Fondation Tanja - PHOTO/ATALAYAR
La présidente de la Fondation Tanja s'est entretenue avec Atalayar lors d'une pause de l'Africa Spain Summit 2025

Rosa Cañadas a modéré la table ronde consacrée à l'intégration et à l'économie durable, dans le cadre de la troisième édition de l'Africa Spain Summit qui s'est tenu ces derniers jours à Madrid

La présidente de la Fondation Tanja est une invitée régulière de ces forums et une grande connaisseuse des relations hispano-marocaines.

Rosa Cañadas, présidente de la Fondation Tanja, merci d'être avec nous. Madrid accueille à nouveau l'Africa Spain Summit, un événement désormais bien établi qui en est à sa troisième édition. Cette fois-ci, le forum a adopté une nouvelle approche, davantage axée sur le dialogue entre les administrations publiques espagnoles et africaines. Que peut-on attendre de cette nouvelle approche et quels progrès pensez-vous avoir réalisés depuis le lancement de ce forum en 2023 ?

Je pense qu'il est important que les deux parties soient présentes dans ce forum : la société civile, qui peut être intéressée par le processus que vit l'Afrique, mais aussi, bien sûr, les administrations publiques, sans lesquelles nous ne pourrons pas avancer. Je pense donc qu'il est bon que ces deux parties soient présentes : d'une part, la société civile et les entreprises, et d'autre part, les administrations publiques, qui doivent également faire pression pour donner à l'Afrique la visibilité dont elle a besoin.

Relations stratégiques, jeunesse, économie durable, Agenda 2030, collaboration entre l'Afrique et l'Espagne... Ce forum aborde un large éventail de questions liées à la collaboration entre l'Espagne et les pays africains. Selon vous, dans quels domaines prioritaires cette collaboration est-elle la plus importante pour le bénéfice mutuel ?

Pour moi, dans la formation et la jeunesse. Nous avons un continent avec un pourcentage énorme de personnes de moins de 20 ans, qui va croître de manière exponentielle au cours des prochaines années et qui a besoin de formation. Il faut donc mettre l'accent sur la formation. Mais nous ne pouvons évidemment pas oublier tous les autres thèmes.

Espérance Kazabe, Nasser Tiassellal, Rosa Cañadas et Arthur Minsat - PHOTO/ATALAYAR/GEMA LÓPEZ

Au cours de l'année dernière, nous avons assisté à une recrudescence des conflits internationaux, en Ukraine, en Russie, au Moyen-Orient ou au Sahel, qui affectent les routes commerciales internationales. À cela s'ajoute la guerre des tarifs douaniers lancée par les États-Unis, à laquelle d'autres puissances réagissent. Dans ce contexte, que peut apporter l'Afrique comme alternative à d'autres marchés en tirant parti de sa situation géographique privilégiée aux portes de l'Europe ?

Tout d'abord, il faut dire qu'il est regrettable de devoir tirer profit de tout ce qui se passe, en particulier des guerres. Mais il est vrai que la question des tarifs douaniers américains peut permettre à l'Espagne, à l'Europe et à d'autres pays de se tourner vers l'Afrique et d'explorer d'autres marchés.

Dans le cadre de cette relation particulière entre l'Afrique et l'Espagne, quel rôle joue le Maroc en tant que pays reliant les deux continents et leader de la dynamisation économique de l'Afrique ?

Je pense que le Maroc a un rôle très important à jouer dans les relations entre l'Europe et l'Afrique. N'oublions pas que l'Espagne est le premier partenaire commercial du Maroc. Je pense donc que nous pouvons tirer des enseignements de cette relation, que nous avons mis beaucoup de temps à établir avec le Maroc, pour les transposer à d'autres pays africains. D'autre part, le Maroc connaît mieux les autres pays africains grâce à cette relation et à tous les accords qu'il a conclus avec eux. Je pense qu'au moins, nous pouvons nous appuyer sur cette plateforme qu'est le Maroc pour nous adresser à tous ces autres pays africains.

L'un des grands avantages concurrentiels des pays africains est leur population très jeune et de plus en plus préparée à répondre aux besoins des entreprises internationales. Comment les pays africains peuvent-ils tirer parti de cet énorme potentiel humain ?

Nous revenons un peu sur la question de la formation. L'Europe n'a pas encore conscience que les gens sont préparés, alors qu'ils le sont, et même très bien, en Afrique, mais cette perception n'existe pas encore. Je pense donc qu'il faut s'ouvrir davantage, expliquer un peu plus, donner la parole, comme le fait ce forum, à tout ce qui se passe afin que les entreprises européennes surmontent l'un des obstacles, qui est de penser qu'elles ne trouveront pas de personnel qualifié dans le pays où elles vont s'implanter. C'est un point sur lequel il faudrait insister.

Enfin, nous aimerions connaître les activités et les perspectives de la Fondation Tanja : quels sont les travaux en cours et quels sont vos projets pour l'avenir ?

Nous nous concentrons beaucoup actuellement sur la question du financement ; il y a peu de financement privé, peu de fonds d'investissement qui s'intéressent à l'Afrique, et c'est l'un des domaines dans lesquels nous voulons également progresser, car il est évident que le financement public n'est pas suffisant et que le financement privé doit se poursuivre. C'est la nouvelle approche que nous avons adoptée.