Le procureur financier, Ali Ibrahim, a ordonné cette mesure jeudi dans le cadre d'une enquête visant à empêcher la fuite des capitaux du pays

Un juge libanais suspend le gel des avoirs de 20 banques

REUTERS/ANDRÉS MARTÍNEZ - Bureau de la banque fermé à Beyrouth

Le juge libanais Ghassan Oueidat a suspendu vendredi la décision du procureur financier Ali Ibrahim de geler les avoirs de 20 banques, de leurs présidents et conseils d'administration, selon la version numérique d'Aljazeera. Ibrahim a donné cet ordre jeudi dans le cadre d'une enquête visant à empêcher la fuite des capitaux du pays, qui connaît d'importants problèmes de liquidités. Oueidat explique qu'il suspend la mesure du procureur afin d'étudier ses effets sur la situation économique du pays en matière de transactions bancaires, de dépôts d'argent et de sécurité économique.

La décision d'Ibrahim affecte les grandes banques libanaises telles que Bank Audi, BLOM Bank, Bank Med et Byblos Bank. Le procureur financier Ali Ibrahim a rencontré lundi les dirigeants de 14 banques pour surveiller la fuite des capitaux et empêcher la vente massive d'euro-obligations. Salim Sfeir, président de l'Association des banques du Liban, a déclaré qu'ils ont été contraints de vendre des euro-obligations pour obtenir des liquidités. Toutefois, ces liquidités n'ont pas permis aux déposants de disposer de plus d'argent sur leurs comptes en devises. 

La population doit faire la queue pendant des heures pour avoir accès aux dollars. Le gouvernement a promis de défendre les droits des déposants et de surveiller les fonctionnaires corrompus. Jeudi, le Conseil des ministres a approuvé une loi visant à lever le « secret bancaire » pour les fonctionnaires du secteur public, qui doit encore être finalisée et nécessitera encore l'approbation du Parlement.

Le Liban est dans une situation économique et financière très délicate. En outre, le pays doit rembourser les euro-obligations qui expirent la semaine prochaine, selon la version numérique d'Aljazeera. Le gouvernement se réunira samedi pour décider s'il peut lever les fonds nécessaires au remboursement d'une euro-obligation de 1,2 milliard de dollars qui expire le 9 mars ou décréter un défaut de paiement de la dette. « Compte tenu des négociations sur les euro-obligations avec les banques, la décision du procureur peut être un outil pour faire pression sur les entités afin qu'elles prêtent de l'argent à l'exécutif pour qu'il puisse rembourser la dette », a assuré Jab Chaaban, professeur associé d'économie à l'Université américaine de Beyrouth, dans des déclarations à Al Jazeera.

Des sources du secteur bancaire consultées par la chaîne de télévision expliquent que les politiciens tentent de rejeter la responsabilité de la situation économique sur les banques. « Il y a une pression politique sur le procureur qui a décrété le gel des comptes. Ce n'est pas nous qui avons volé l'argent, ni détruit le secteur de l'électricité du pays », explique cette source. 

D'autres sources consultées par Al Jazeera ont averti que la décision du procureur financier pourrait conduire à la fermeture des entités. « Si nos avoirs sont gelés, nous ne pourrons pas accéder à nos comptes et nous ne pourrons pas ouvrir », a-t-il déclaré.

Le professeur Chaaban a expliqué que cette situation est le résultat de la confrontation entre les politiciens et les banquiers dans le pays. « Je suis sûr que les banques prendront des mesures de rétorsion, comme la fermeture ». Depuis novembre, les institutions financières maintiennent des contrôles informels sur les capitaux. Les fortes protestations ont forcé les banques à fermer pendant deux semaines. Bien que les contrôles aient limité les transferts d'argent à l'étranger aux « affaires urgentes » et que les retraits de devises soient limités à 100 à 1 000 dollars toutes les deux semaines, des milliards de dollars ont été transférés en dehors des frontières du pays.