La crainte d'un nouveau conflit à grande échelle en Syrie
Le gouvernement syrien d'Ahmed Al-Sharaa a mis fin à l'« action militaire » contre les prétendus « restes » de l'ancien régime de Bachar Al-Assad, qui a duré cinq jours et a coûté la vie à plus de 1 500 personnes, selon les informations de l'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH), dans ce qui constitue le pire massacre depuis qu'Al-Assad a quitté le pouvoir en décembre 2014.
La grande majorité des personnes assassinées appartiennent à la confession alaouite, une branche séparée de l'islam chiite, à laquelle appartenait le clan Assad. Malgré l'intensification des attaques au cours de la dernière semaine, les premiers affrontements ont eu lieu fin décembre entre les forces de sécurité et la communauté alaouite à Lattaquié et Tartous.
D'un point de vue politique, Al-Sharaa a estimé que les assassinats dans les zones où résident les alaouites constituent une menace évidente pour la réunification du pays.
« Nous n'acceptons pas qu'un seul sang soit injustement versé ou que ce sang soit versé en vain sans que personne n'en soit tenu responsable ni puni », a déclaré le président par intérim de la Syrie, Ahmed Al-Sharaa. Al-Sharaa est allé encore plus loin en soulignant qu'il punirait les responsables, même s'ils « étaient ordonnés par les personnes les plus proches de lui ».
Cependant, des observateurs syriens affirment que les paroles du président sont une stratégie visant à protéger son image auprès de l'Occident, alors qu'il tente d'échapper aux responsabilités des actes commis par les forces militaires qui sont sous ses ordres.
« Ce qui est utile pour Sharaa, c'est que les commentaires sévères de l'Occident n'ont pas atteint le niveau de l'accuser lui ou ses proches, ce qui lui donne l'occasion de les réunir en Occident », Joshua Landis, expert en Syrie.
Dans ce contexte, Ahmed Al-Sharaa et le commandant des Forces démocratiques syriennes, Mazloum Abdi, ont signé un accord intégrant toutes les institutions civiles et militaires affiliées à l'autodétermination des Kurdes dans le cadre d'un État syrien, mais les Kurdes ont profité de la situation pour consolider leur entrée en tant que partenaire de pouvoir avec Al-Sharaa dans des conditions qui favorisent et contribuent à leurs intérêts politiques et économiques. Pendant ce temps, c'est la Turquie qui garde le véritable contrôle sur les groupes armés en Syrie, bien qu'Al-Sharaa tente de faire preuve d'autorité.
L'absence de déclarations de la part des dirigeants européens laisse au président syrien de transition la possibilité de régler la situation en interne en formant un comité.
En revanche, les États-Unis ont exhorté les autorités syriennes à demander des comptes aux prétendus « terroristes islamiques radicaux » qui auraient commis les crimes en Syrie, et ont réaffirmé leur soutien aux minorités religieuses et ethniques touchées en Syrie.
L'un des principaux accusés était la République islamique d'Iran, qui a nié toute participation aux meurtres de milliers d'alaouites et rejeté les accusations internationales d'incitation à la violence dans les attentats survenus dans les régions côtières de Syrie.
Al-Sharaa est pris dans une lutte de pouvoir en Syrie. Avec des pressions internationales comme l'Iran et la Turquie, la réalité du pays est que la violence est incontrôlée et affecte de plus en plus sa crédibilité et son leadership. Bien qu'il essaie de projeter un certain contrôle et un certain pragmatisme, la situation est précaire et le risque d'escalade du conflit sectaire est élevé.
Ahmed Al-Sharaa a qualifié les événements sur la côte syrienne de « défis prévus », dans une attitude qui a été interprétée comme de l'indifférence face à la gravité des faits ; et, pour certains observateurs, comme un avertissement aux forces insurgées que la Syrie est prête à un éventuel conflit à grande échelle.
Loin d'apaiser la situation, les propos d'Al-Sharaa ont accru les inquiétudes quant à un éventuel nouveau conflit civil en Syrie. Depuis l'arrivée d'Al-Sharaa à la présidence, une grande partie de la population syrienne espérait que les politiques visant à remodeler le pays seraient fondées sur la réconciliation et la promotion du pardon, plutôt que sur la vengeance.