Dbeibé alimente les craintes d'une reprise du conflit interne en Libye
La décision de Dbeibé de ne pas démissionner de son poste de Premier ministre place le Parlement et la Libye en général dans une situation délicate. Depuis son arrivée au pouvoir l'année dernière, le dirigeant a consacré presque tous ses efforts à la construction d'une image pacifique de lui-même.
Le Parlement a récemment élu Fathi Bashagha comme son successeur jusqu'à l'organisation de nouvelles élections. Cette décision n'a pas été bien accueillie par l'ancien chef du gouvernement et il est prêt à conduire son pays dans une nouvelle confrontation s'il ne renonce pas à ses pouvoirs.
Lundi, Dbeibé a réaffirmé que la voie adoptée par le Parlement menace de diviser à nouveau le pays et de conduire inévitablement au conflit. En outre, il a présenté une feuille de route qui prévoit la tenue d'élections législatives en juin prochain.
Ces derniers mois, le dirigeant a tenté de dissiper l'idée d'un changement de gouvernement en faisant pression sur le Conseil d'État. En conséquence, Khaled al-Mashri, président du Conseil, a été contraint de publier un communiqué appelant le parlement libyen à coordonner plus étroitement le processus politique.
Plusieurs experts estiment que certains membres de cette institution avaient intimidé al-Mashri après une rencontre avec Dbeibé. Malgré cela, le président a souligné que la nomination de Bashagha est "une mesure raisonnable et légale". Son soutien à ce processus de changement souligne la position claire du Conseil d'État.
Lors de la sixième édition du Forum des pays exportateurs de gaz (FPEG) au Qatar, Dbeibé a de nouveau évoqué les craintes d'une éventuelle guerre par procuration. Il a également souligné le rôle important que joue le déclenchement d'un conflit armé dans le déclin de la production de pétrole et de gaz en Libye.
L'équilibre des pouvoirs penche en faveur du président élu par le Parlement. Certains observateurs affirment que la menace de guerre "n'est rien d'autre qu'une monnaie d'échange entre les mains de Dbeibé, qui n'ose pas livrer une bataille qu'il sait qu'il va perdre".
Bien qu'il bénéficie du soutien de l'armée à l'est et à l'ouest, Bashagha est un partisan convaincu de la méthode pacifique. Les deux leaders ont intensifié leurs déplacements internes pour rencontrer leurs camarades et présenter leurs différents points de vue. Lors des célébrations commémorant la révolution libyenne, les politiciens se sont rencontrés dans la ville de Misurata sans qu'aucun affrontement ne se développe entre leurs partisans.
L'élection du nouveau premier ministre a pris une tournure internationale, des pays comme la Russie et l'Égypte ayant affirmé leur soutien à la formation d'un nouveau gouvernement. La Turquie et les États-Unis, entre autres, sont restés neutres tout au long du processus. Cette impartialité est le reflet de l'état de confusion et d'isolement que vit Dbeibé.
Recep Tayyip Erdogan, le président turc, ne s'est prononcé en faveur d'aucun des deux camps, malgré son rejet initial de la formation d'un gouvernement parallèle. Les sympathisants politiques de Dbeibé considèrent qu'il soutient le parlement dans sa décision de mettre en place un nouveau cabinet.
Le défi de Bashagha consiste maintenant à tenter de convaincre les Nations unies et la communauté internationale de la légitimité de son gouvernement. La rencontre du dirigeant libyen avec Stephanie Williams, conseillère spéciale des Nations unies pour la Libye, est considérée comme une avancée importante vers cet objectif.
Williams a parlé de la nécessité de réaliser des progrès consensuels dans la transition du pouvoir. Le gouvernement d'union a considéré que ces déclarations étaient partiales. L'ambassade des États-Unis en Libye a déclaré que l'approche des Nations unies était conforme aux "principes fondamentaux des résolutions du Conseil de sécurité et des réunions internationales sur la Libye".
Le vide institutionnel libyen inquiète déjà les hauts responsables d'autres pays, notamment le ministre marocain des Affaires étrangères. Nasser Bourita a souligné que "la tenue d'élections est le cadre approprié pour résoudre le problème de la légitimité" et qu'elles devraient être un point clé pour renforcer la stabilité dans le pays.