Dos ministros marroquíes no dan de alta a sus empleados en la Seguridad Social
Un scandale est en train de se produire ces jours-ci au sein du Maroc, avec sa presse, ses autres médias sociaux et son parlement. Il concerne deux ministres du gouvernement qui ont omis de déclarer leurs secrétaires à la sécurité sociale. Les deux ministres sont avocats de profession, l'un ayant un cabinet à Casablanca et l'autre à Agadir. Pour couronner le tout, l'un n'est autre que le ministre du Travail, le jeune Mohamed Amekraz, dont la mission première est de veiller à l'application du droit du travail, et l'autre est le remarquable et honorable Mustafa Ramid, ministre d'État chargé des droits de l'homme et qui, dans le gouvernement de Benkiran, était ministre de la Justice.
Les deux ministres appartiennent au parti islamiste PJD (Parti de la justice et du développement) : Mustafa Ramid est l'un des barons éminents du parti islamiste et Mohamed Amekraz est le secrétaire général de la jeunesse de ce parti qui prêche la justice et le développement, d'ailleurs dans le discours ils s'élèvent contre « atahakum », l'arbitraire et la volonté.
Le premier scandale a été révélé il y a une dizaine de jours à la suite du décès d'une secrétaire qui a travaillé pendant vingt-quatre ans dans le bureau du ministre des droits de l'homme sans jamais avoir été déclarée aux autorités de la sécurité sociale pendant cette période.
Face à la vague de répulsion dans les médias sociaux, les proches du ministre Ramid et du courant islamiste - en faisant la distinction entre musulmans et islamistes - certains d'entre eux appartenant à la même entreprise, même apparemment le père du défunt, ont souligné le visage aimable de Ramid en tant qu'homme de bien, mettant en avant sa générosité envers son personnel et, surtout, envers le défunt. Ils soulignent que lorsqu'il est tombé malade, il lui a offert son soutien financier et que c'est l'intéressé qui a refusé de s'inscrire à la sécurité sociale malgré l'insistance de M. Ramid. Dans les médias, ils répondent que la question n'est pas liée à la générosité et à la bonté des gens, mais simplement à l'application des lois en vigueur, surtout de ceux qui doivent veiller à ce qu'elles soient appliquées et respectées.
Pour sa part, Mohamed Amekraz, ministre du travail, a également omis de déclarer un employé qui a travaillé dans son cabinet d'avocats à Agadir pendant plusieurs années. Selon la presse marocaine, il y a aussi le cas d'une employée qui a travaillé entre 2009 et 2010 sans être déclarée et qui est retournée à son cabinet en 2016 avec un salaire de 1500 dirhams (140 euros). L'affaire revêt une plus grande importance puisqu'en sa qualité de ministre de l'emploi, il est également le président du Conseil d'administration de la sécurité sociale. À ce titre, il a comparu le mercredi 17 juin devant la commission des affaires sociales de la Chambre des conseillers du Parlement, au cours de laquelle il a sévèrement critiqué les employeurs qui refusent de déclarer leurs employés à la sécurité sociale. Deux ou trois jours après l'éclatement du scandale Ramid, ses collègues du gouvernement, de la justice et du parti dans son bureau d'Agadir se sont précipités le 19 juin pour enregistrer cinq des employés de son entreprise à Agadir auprès des autorités de sécurité sociale.
L'impact de ces deux affaires sur l'image du gouvernement othmanais dans l'opinion publique marocaine, ainsi que dans les forums internationaux, sera sans aucun doute très important et la crédibilité sera sérieusement mise à mal.
Malgré toutes les justifications avancées, l'opinion publique marocaine n'est pas convaincue. Il est difficile de comprendre pourquoi deux juristes membres du gouvernement qui enfreignent la loi restent au gouvernement et n'assument pas les conséquences de ces événements et leurs responsabilités politiques. Ignorer ce qui est arrivé à beaucoup d'entre eux reviendrait à permettre à d'autres membres du gouvernement de violer les lois que ce même gouvernement dicte en toute impunité. Le précédent serait si grave, selon certains, qu'un ministre comme le ministre des finances, par exemple, prendrait la liberté de ne pas payer sa contribution fiscale et, en même temps, ne ménagerait aucun effort pour sanctionner le reste des contribuables afin de les persuader de remplir ce devoir de citoyenneté qu'il ne remplit pas lui-même.
Au niveau des instances internationales, il sera très délicat pour le Maroc, voire embarrassant, que le ministre d'État Ramid, avec son portefeuille des droits de l'homme, expose avec succès et de manière crédible devant les instances internationales traitant des droits de l'homme les réalisations faites au Maroc en matière de ces nobles principes, offrant une bonne image du Maroc pour la simple raison que son image est ternie. En revanche, pour le ministre du travail, lors des réunions de l'Organisation internationale du travail auxquelles participent des délégations composées d'employeurs, de syndicats et de ministres du travail du monde entier, il ne sera plus facile pour lui de présider la délégation tripartite marocaine (employeurs, syndicats et gouvernement) pour discuter du droit du travail et de la sécurité sociale au profit des travailleurs du monde entier, car elle n'est pas crédible.
Saadeddine El Othmani est confrontée à une affaire délicate dans laquelle sa décision revêt une grande importance morale et politique. C'est une situation embarrassante tant pour lui en tant que chef du gouvernement que pour un parti politique de référence islamique qui prêche la justice et le développement dans un cadre de moralité islamique.
L'image de la PJD est très ternie devant l'opinion publique marocaine. Les citoyens se rendent compte de la grande différence entre ce que les islamistes disent et ce qu'ils font. Ils appliquent le contraire de ce qu'ils prêchent. De nombreux Marocains tirent des conclusions négatives et pensent qu'ils sont confrontés à un discours démagogique, hypocrite et à deux poids deux mesures.