Les sondages indiquent une nette victoire du Likoud et un parlement dans lequel le bloc ultraconservateur et religieux obtient une majorité

Israël à nouveau à la croisée des chemins électoraux

REUTERS/RONEN ZVULUN - Le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu vote dans un bureau de vote à Jérusalem, le 23 mars 2021, lors de la quatrième élection nationale en deux ans

6,5 millions d'Israéliens sont appelés aux urnes pour la quatrième fois en deux ans seulement. Les bureaux de vote ont ouvert à 7 heures et le taux de participation était de 14,8 % à 10 heures, soit plus que lors des élections précédentes. Il s'agit d'une nouvelle surprenante, car plusieurs sondages avaient indiqué un taux d'abstention élevé, dû à la lassitude d'arriver à une quatrième élection en raison de l'incapacité à former un gouvernement de coalition stable pour faire face à la pandémie.

Les principaux sondages donnent la victoire à l'actuel premier ministre, Benjamin Netanyahou, même si son bloc n'atteindrait pas la majorité de 61 sièges nécessaire à la Chambre pour former une coalition. La campagne de M. Netanyahu s'est principalement appuyée sur la campagne de vaccination, sous le slogan "Back to life", avec 4 millions de citoyens vaccinés, et sur une reprise économique rapide.

Lors des précédentes élections, Netanyahou s'est appuyé sur sa relation avec l'ancien président Donald Trump, et sa normalisation des relations avec certains pays arabes. Toutefois, à cette occasion, les questions de défense ou de relations extérieures ont été reléguées au second plan, tout comme la question palestinienne, qui n'a fait l'objet d'aucun débat.

Le PDG de Pfizer, Albert Bourla, a été le protagoniste de ces élections, dont Netanyahu s'est approprié le slogan du ministère de la Santé et s'est rendu à l'aéroport pour recevoir les premiers vaccins. Il a également été le premier à être vacciné en Israël et il a levé le troisième confinement national au moment idéal pour que ces élections arrivent dans une situation d'apparente "normalité".

Les Israéliens ont dû se rendre aux urnes en avril et septembre 2019 et en mars 2020. Ces derniers interviennent après l'effondrement du gouvernement d'unité convenu en mai 2020 par le Premier ministre, Benjamin Netanyahou, et le chef de l'opposition Bleu et Blanc, Benny Gantz, après sept mois d'âpres luttes intestines. Finalement, incapable d'adopter le budget, la coalition gouvernementale a été dissoute.

L'accord entre le Likoud et la coalition Bleu et Blanc stipulait un budget unique pour deux ans (2020 et 2021), mais le Likoud a proposé de voter sur deux budgets différents et son partenaire n'a pas accepté. De plus, l'accord de coalition proposait une rotation du poste de premier ministre. Certains analystes locaux ont donc interprété ce geste comme une stratégie de M. Netanyahou pour éviter de devoir céder le siège de premier ministre à son rival.

Cet accord de coalition a porté un coup au parti Bleu et Blanc, dirigé par l'ancien chef de l'armée Benny Gantz, qui pourrait passer de 33 sièges à ne même pas entrer à la Chambre. L'opposition la plus puissante qui puisse tenir tête à "Bibi" - le surnom par lequel le Premier ministre est connu - est Yair Lapid, chef du parti Yesh Atid.

Les sondages indiquent une nette victoire du Likoud et un parlement dans lequel le bloc ultraconservateur et religieux dispose d'une nette majorité. Le Premier ministre a également le soutien incontesté des partis ultra-orthodoxes Yamina et Tikva Jadasha. Toutefois, de nombreux analystes soulignent que, si Netanyahou ne parvient pas à réunir ces 61 sièges, une cinquième élection serait précipitée, tandis que "Bibi" continuerait à exercer la fonction de Premier ministre par intérim, ce qui lui offre une immunité face à son procès imminent pour corruption.

Un nouveau visage à souligner dans ces élections est celui de Merav Michaeli, la seule femme à la tête d'une liste pour ces élections législatives. Michaeli a entrepris de faire revivre le parti travailliste israélien, une mission quelque peu compliquée puisque les sondages ne prévoient pas qu'elle obtienne plus de 5 % des voix.

Pour sa part, la Liste commune, qui a remporté 15 sièges en mars 2020, prévoit ses pires résultats, après la rupture d'un des partis intégrés dans cette alliance, qui constitue la troisième force au Parlement. Le Premier ministre Netanyahou, a encouragé le départ du parti Raam - l'aile religieuse et conservatrice de la Liste commune - après avoir convaincu son leader, Mansour Abbas, qu'il pourrait obtenir de meilleurs services publics pour ses électeurs s'il avait le soutien du nouveau gouvernement.

Benjamin Netanyahou a voulu profiter de la vacance du pouvoir laissée par l'éclatement de la Joint List et attirer les Arabes israéliens, qui représentent 20% de la population du pays, à travers le slogan "Abu Yair". Netanyahu a promis d'améliorer leurs conditions de vie, et en particulier de mettre fin à l'insécurité citoyenne qui sape leurs communautés. Certains sondages indiquent que Netanyahou pourrait gagner entre un et deux députés dans le secteur arabe.

Une victoire et une nouvelle élection profiteraient à l'actuel premier ministre, Benjamin Netanyahu, qui continuerait à bénéficier de l'immunité contre les accusations de corruption. Aujourd'hui, l'avenir d'Israël, fortement divisé en deux blocs, pro Netanyahou et anti Netanyahou, sera décidé une fois de plus.