La détérioration de ses relations avec des pays clés incite le gouvernement à chercher à renforcer ses relations avec les pays du Sud

Argelia se acerca a Mali y Mauritania ante la preocupación de Tebboune

AFP/LUDOVIC MARIN - Le président algérien Abdelmadjid Tebboune

L'Algérie sait que sa politique étrangère n'est pas au mieux de sa forme. La rupture diplomatique avec le Maroc a ouvert une brèche que le gouvernement d'Abdelmajdid Tebboune n'a pas réussi à combler. La fin des liens qui unissaient son pays au leader régional a entraîné une distanciation qui s'est reportée sur des pays plus proches des Marocains, comme la France. S'il est vrai que Paris tente de rapprocher Alger, le gouvernement Tebboune s'inquiète d'une situation qui a conduit son ministre des affaires étrangères, Ahmed Ataf, à se rendre au Mali et en Mauritanie pour tenter de renforcer d'autres liens.
 
Ataf s'est rendu à Nouakchott pour rencontrer son homologue mauritanien et le président Mohamed Ould Cheikh Al-Ghazwani. Avec le premier, il a signé un accord visant à améliorer la coordination politique sur des questions communes, y compris la région subsaharienne. Après avoir rencontré les deux hommes dans la capitale mauritanienne, le ministre algérien s'est rendu à Bamako pour discuter de l'un des sujets de préoccupation de l'Algérie, à savoir la révision de l'accord qu'elle a parrainé en vue de la réconciliation au Mali. Alors que les Maliens souhaitent le réviser, l'Algérie est réticente à modifier l'accord signé en 2015, grâce auquel elle avait acquis une influence déterminante dans une région troublée par l'insécurité.

Lors de cette tournée de visites de l'Algérie, Ahmed Ataf était accompagné du directeur du renseignement extérieur, le général Jabbar Muhanna. Les observateurs voient dans ce geste une double préoccupation algérienne. D'abord, parce que le Mali représente un lieu décisif, il y a donc un intérêt important à créer les conditions de la fluidité et de la tranquillité, surtout avec la présence de groupes armés dans la région qui utilisent ces points de passage pour leur fluctuation. Deuxièmement, le gouvernement Tebboune est préoccupé par les récents développements dans la région sud et ne veut pas continuer à perdre de l'importance, comme il le fait sur le flanc nord.
 
Le ministère algérien des Affaires étrangères a publié un communiqué sur la rencontre entre les délégations algérienne et mauritanienne, indiquant que "les deux parties ont signé un protocole d'accord sur les consultations politiques, visant à établir un mécanisme durable pour améliorer la coordination politique entre les deux pays". Ils précisent également que l'un des objectifs prioritaires est de "faire progresser la coopération bilatérale dans plusieurs secteurs vitaux, ainsi que d'intensifier les consultations et la coordination sur les développements régionaux et continentaux".

En Algérie, on ne perd pas de vue la migration clandestine en provenance du sud. En plus des mouvements de groupes armés dans la région, ces fluctuations migratoires ont amené l'Algérie à concentrer une grande partie de ses efforts sur la sécurité, en particulier dans les pays du Sahel. Cela se reflète également dans le communiqué algérien, qui indique que "les ministres algérien et mauritanien ont abordé les questions d'intérêt commun aux niveaux maghrébin et arabe, ainsi que l'évolution de la situation dans la région du Sahel et du Sahara et au niveau continental en général, soulignant l'importance de renforcer le consensus dans les positions des deux pays et la sagesse qu'elles reflètent pour faire face aux différentes menaces".
 
Abdallah Diop, le ministre malien des Affaires étrangères, accompagné du ministre de la Défense nationale et des Anciens combattants et du ministre de la Réconciliation nationale chargé de la Paix, ont été chargés d'accueillir Ataf à son arrivée à Bamako. Les discussions ont porté sur "la coopération bilatérale dans les domaines des télécommunications, de la fibre optique, du carburant, de l'enseignement supérieur, de la formation et de l'augmentation du nombre de vols à destination de Bamako". Cependant, selon les observateurs, la visite avait un arrière-plan plus important.

Ces derniers mois, les menaces entre les différentes factions du Mali se sont intensifiées et ont mis en péril la sécurité du pays. Le voyage d'Ahmed Ataf dans la capitale malienne doit servir d'élément de persuasion pour que les deux parties reprennent le chemin de la conciliation. Le ministre algérien estime qu'il est indispensable de "réaliser les priorités de la période de transition et de s'acquitter des obligations nationales, ce qui conduirait au retour du pays à la situation constitutionnelle dans les délais fixés par ce pays en toute souveraineté". L'Algérie souhaite ainsi atténuer les effets du retrait de la France de la région.
 
De nombreux Maliens considèrent Alger comme une extension de l'influence parisienne, ce qui suscite une certaine méfiance quant au rôle du pays de Tebboune. La France est considérée comme l'une des principales causes de la situation actuelle au Mali, ayant, selon elle, encouragé l'émergence de groupes extrémistes et d'attaques terroristes. L'Algérie doit donc agir avec prudence et tenter de calmer le jeu avec Bamako. La saignée diplomatique avec l'Occident et le Nord est trop importante pour que l'Algérie continue à perdre de l'influence au sud de ses frontières.