Plus de consultations de décisions que d'impulsions. Conseillers et comités, clés des décisions de Mohamed VI

El arbitraje real

PHOTO/MAP - Conseillers et comités, la clé des décisions de Mohamed VI

L'arbitrage réel au Maroc n'est pas facile à connaître, et encore moins à interpréter, mais il est essentiel de savoir où vont les décisions les plus importantes de Mohammed VI. Les impulsions ne sont pas bonnes conseillères et leurs conséquences ne sont généralement pas positives. 

La question essentielle pour tous les Marocains sans distinction est le Sahara. Pour cette raison, ceux qui connaissent ou tentent d'approcher le noyau fondamental de la prise de décision dans l'environnement royal soulignent que les signaux habituels utilisés impliquent des personnalités proches du monarque puisqu'elles partagent des études universitaires, comme Fouad Ali El Himma, connu comme le conseiller d'orchestre pour sa maîtrise des enjeux en général, et Yassin Mansouri, chef des services de renseignement avec une réputation et une efficacité internationales. Abdellatif Hammouchi, qui consolide son travail de conseiller pour les questions de sécurité et de terrorisme et directeur général de la Sécurité, s'impose comme l'une des pièces essentielles de l'entourage du monarque marocain. Au cours des derniers jours, les quelques fuites qui ont été produites et qui sont toujours en attente d'être définitivement confirmées, ont indiqué que Mohammed VI a réuni ces trois conseillers comme pièces fondamentales des relations avec l'Espagne, au niveau le plus direct pour ses décisions.
 

L'influence qu'ils peuvent exercer sur les positions adoptées est déterminée par leurs parcours. Fouad Ali El Himma, conditionné en partie par son état de santé délicat, est toujours favorable au maintien d'une position plus ferme avec l'Espagne, suite à son parcours aux Etats-Unis avec une vision large des intérêts du Maroc qui a culminé avec l'annonce de Donald Trump de reconnaître la souveraineté marocaine sur le Sahara le 10 décembre dernier et l'un des artisans de l'extension de l'influence marocaine dans divers cercles de pouvoir américains et israéliens. Mansouri et Hammouchi auraient fait le pari de ne pas arriver à une situation de rupture et de maintenir des ponts sur des questions stratégiques telles que la coopération anti-terroriste et les services de renseignement. 

Le ministre des Affaires Étrangères, Nasser Bourita, a joué un rôle de premier plan dans cette crise avec l'Espagne. Il a gagné du terrain ces derniers mois grâce au succès de ses efforts diplomatiques auprès de plusieurs pays, comme le jalon désormais bien connu des États-Unis pour les intérêts marocains au Sahara, mais aussi auprès de pays influents comme les États-Unis, mais aussi avec des pays influents comme les Émirats arabes unis, la Jordanie, une dizaine de pays africains et, dans la sphère européenne, le rétablissement d'une excellente harmonie avec la France et d'une très bonne relation avec le Royaume-Uni, dopée par le Brexit et l'environnement anglo-saxon. Les communiqués publiés par le ministère de Bourita ont adopté un ton dur avec l'Espagne, avec des formes inédites et un langage direct, défendant fermement les positions marocaines et critiquant les actions du gouvernement espagnol avec des arguments schématiques, larges et directs. Bourita a évolué dans le domaine des affaires étrangères sous la direction du conseiller royal et ancien ministre Taieb Fassi-Fihri, qui préfère rester un personnage prudent et n'est pas porté sur les déclarations ou les apparitions publiques. Un profil qui suit la discrétion habituelle de Fouad Ali El Himma, une personne réservée même lorsqu'il a fondé le PAM, le parti Authenticité et Modernité avec des relations intermittentes avec les leaders islamistes modérés du parti Justice et Développement, au gouvernement depuis deux législatures. 

Dans le rôle d'aller vers les médias, outre le ministre Bourita, il faut valoriser le rôle de l'ambassadrice à Madrid, appelée en consultation par Rabat, Karima Benyaich, sœur du précédent ambassadeur, Fadel Benyaich, dont la mère est originaire de Grenade, très proche de la famille royale et ayant un certain poids dans l'évolution de la crise en tant que voie diplomatique la plus directe et celle qui a le plus publiquement reproché au gouvernement espagnol de n'avoir donné ni information ni explication, au-delà des interventions publiques où les raisons humanitaires étaient clairement insuffisantes, sur l'accueil du leader du Polisario Brahim Ghali. 

Dans l'entourage de Mohammed VI, lorsqu'il s'agit de prendre des décisions, les conseillers d'éducation et ancien ambassadeur en Espagne, Omar Azziman, chef de la nouvelle structure régionale du Maroc, ont leur place ; l'homme d'affaires et secrétaire personnel du roi, Mounir Majidi, qui est président de la société Siger, et André Azoulay, qui a une influence particulière dans le milieu juif et une sensibilité particulière envers l'Espagne depuis l'époque de Hassan II avec sa coprésidence de la Fondation des trois cultures de la Méditerranée. Et en dehors de l'environnement des conseillers, Aziz Ajanuch, ministre de l'Agriculture et de la Pêche, président du parti du Rassemblement national des indépendants, ami personnel du roi, a une influence notable. 

Le style Mohammed VI

Depuis son accession au trône, Mohamed VI a changé plusieurs règles pertinentes de ce qui avait été la manière de gouverner de son père Hassan II. Sans aucun doute, l'un des points de référence a été la réforme de la Constitution en 2011, avant le nouveau code de la famille et les droits des femmes, la modernisation des infrastructures, les énergies renouvelables et, chose fondamentale ces deux dernières années, le changement du modèle de production pour faire face au grand défi de l'inégalité. 
 

À sa manière, Mohammed VI a modifié la forme et les méthodes de ses conseillers et a encouragé la création de comités spécialisés pour traiter les questions pertinentes du royaume. Quant à ce qui peut être considéré comme un cabinet fantôme avec ses conseillers, Mohammed VI l'a poussé dans deux directions : la modernisation et la normalisation. Dans le cadre d'une stricte discrétion, mais avec une plus grande visibilité et transparence, une nouveauté dans le fonctionnement est la spécialisation de chaque conseiller pour gagner en efficacité et en cohérence avec leurs conseillers qui ont occupé leurs fonctions dans l'administration et en connaissent les rouages. C'est le cas de Fassi-Fihri pour les Affaires Étrangères, de Yassir Zenagui pour le tourisme, d'Abdeltif Menouni pour la Constitution et d'Omar Azziman pour l'éducation. 

Leurs fonctions sont consultatives, le Roi est celui qui décide, mais les décisions royales citent souvent des orientations élevées, des directives ou des instructions royales. 

Article précédemment publié dans ABC