L'un des émeutiers en uniforme de la caserne de Kati a assuré aux journalistes que les deux plus hautes autorités du pays étaient sous son contrôle

L'armée prétend avoir kidnappé le président et le premier ministre du Mali

AFP/LUDOVICO MARIN & SIA KAMBOU - Le Premier ministre du Mali, Boubou Cissé, à gauche, et le Président Ibrahim Boubacar Keita

Un groupe de militaires mène un soulèvement qui maintient le cœur du Mali dans un poing. Les agences de presse ont rapporté ce mardi matin que plusieurs personnels en uniforme ont pris position dans des points stratégiques de Bamako après avoir pris les armes à la base de Sundiata Keita dans la ville de Kati. On ne sait pas avec certitude quelle est la force de ces militaires et toutes les agences font référence à la confusion de la situation. Cependant, l'un des mutins de Kati a assuré aux journalistes que le président Ibrahim Boubacar Keita et son Premier ministre, Boubou Cissé, étaient sous son contrôle, sans préciser davantage. 

Les rebelles ont pris des positions stratégiques dans la capitale, comme le ministère de la défense, le quartier général des forces armées et la chaîne de télévision publique. Le gouvernement n'a fait aucune déclaration de toute la matinée, ce qui a donné lieu à une grande incertitude pour la population. Quelques heures plus tard, M. Cissé a publié une déclaration appelant les militaires à déposer les armes et les invitant à engager le dialogue. La vérité est que le président et le premier ministre étaient absents pendant les longues heures de ce qui ressemblait à une mutinerie et qui s'est ensuite transformé en coup d'État. Même le communiqué supposé signé par Cissé cet après-midi même, qui appelait au dialogue avec les putschistes, a été remis en question par les observateurs et attribué à des personnes de son entourage qui tentaient de cacher la gravité de la situation.


La nouvelle de l'apparent triomphe du coup d'État militaire s'est répandue dans la capitale tout au long de la journée. Les avenues de Bamako ont vu circuler des véhicules militaires où des milliers de personnes sont descendues dans les rues dans une ambiance festive, célébrant ce qui s'est passé, qui s'est apparemment déroulé sans effusion de sang. 
La Communauté économique des États d'Afrique a rapidement condamné l'action militaire. La France, elle aussi, a rejeté l'émeute mardi et a appelé au respect de l'ordre constitutionnel. Ce pays européen est très présent au Mali. Plus de 5 000 soldats gallois sont déployés au Sahel dans le but de lutter contre l'islamisme régional. L'Espagne maintient également des troupes sur le terrain et le ministère de la défense a confirmé dans un tweet que le contingent espagnol est en sécurité malgré la situation. L'ambassade d'Espagne pour le Mali et le Burkina Faso a demandé aux résidents espagnols de Bamako et de Kati d'éviter de quitter leur domicile dans les heures à venir. 
 

L'Union africaine a également condamné la tentative de coup d'État du Mali et a exigé la libération immédiate du président et du premier ministre maliens, selon l'agence de presse Efe. Le président de la Commission de l'Union africaine (UA), Moussa Faki Mahamat, a "fermement" condamné le coup d'État au Mali et a exigé la "libération immédiate" du président malien, Ibrahim Bubacar Keita, et d'autres membres du gouvernement. "Je condamne fermement toute tentative de changement anticonstitutionnel et j'appelle les mutins à cesser tout usage de la violence et à respecter les institutions républicaines", a déclaré Moussa Faki Mahamat sur son compte Twitter. 

Le Mali est en proie à une énorme instabilité politique depuis des mois, alimentée par la menace djihadiste et les conflits intracommunautaires. Cet incident fait suite à des semaines de protestations et de manifestations de masse exigeant la démission du président, en fonction depuis 2013. Le président du Conseil européen, Charles Michel, a également averti ce mardi qu'un coup d'État "n'est jamais la solution à une crise", suite au soulèvement au Mali. "L'Union européenne suit de près ce qui se passe au Mali. Un coup d'État n'est jamais la solution à une crise, aussi profonde soit-elle", a écrit M. Michel sur son compte Twitter.


Le haut représentant de l'Union européenne pour la politique étrangère, Josep Borrell, a également condamné le coup d'État et rejeté "tout changement anticonstitutionnel", appelant au dialogue et à la prévention d'une nouvelle déstabilisation du Mali et de la région. "Cela ne peut en aucun cas être la réponse à la profonde crise sociopolitique qui sévit au Mali depuis plusieurs mois", a déclaré M. Borrell, qui a poursuivi en précisant que l'UE "a entrepris des contacts pour mieux comprendre la situation et décider des prochaines étapes de l'action de la communauté internationale".