L'Égypte et le Soudan craignent l'avancée du barrage de la Grande Renaissance éthiopienne
Il y a un peu plus d'un mois, l'Égypte a soutenu une proposition soudanaise visant à internationaliser l'arbitrage dans le conflit qui l'oppose à l'Éthiopie au sujet du barrage de la Grande Renaissance, une infrastructure qui menace de réduire les ressources en eau du Nil qui atteignent l'Égypte.
À l'époque, le ministre égyptien des affaires étrangères, Sameh Shoukry, avait déclaré que Le Caire soutiendrait la formation d'un "quartet international" composé de l'Union européenne, des Nations unies, des États-Unis et de l'Union africaine, dans le but de sceller un accord satisfaisant avec Addis-Abeba.
L'eau qui sera libérée par l'Éthiopie, par exemple en cas de sécheresse de plusieurs années, ou les mécanismes de règlement des différends, font partie des questions les plus épineuses. Alors que l'Égypte et le Soudan réclament un accord juridiquement contraignant, l'Éthiopie souhaite uniquement établir une série de lignes directrices.
Pour l'heure, M. Shoukry estime qu'il est essentiel de résoudre le problème avant le début de la prochaine saison des inondations. Le ministre égyptien des Affaires étrangères a discuté de la question avec le chef de la diplomatie européenne, Josep Borrell, lors d'un appel téléphonique hier. Outre la question du barrage, ils ont abordé d'autres sujets tels que la Libye et les relations bilatérales dans le cadre du nouvel agenda pour la Méditerranée, selon M. Borrell lui-même sur son compte Twitter.
M. Shoukry a insisté auprès du haut représentant de l'Union européenne sur le fait que la décision de l'Éthiopie de remplir unilatéralement le barrage met en danger la stabilité de la région, avec les répercussions négatives que cela peut entraîner. Pour cette raison, le chef de la diplomatie égyptienne appelle à la médiation des acteurs internationaux.
Dans ce contexte, à la fin de la semaine dernière, le président égyptien s'est rendu au Soudan pour la première fois après la chute d'Omar el-Béchir en 2019. La raison de cette visite est de discuter de l'impact économique du Grand barrage éthiopien sur les deux pays.
Les relations entre l'Égypte et le Soudan sont en bonne santé, comme en témoigne la signature d'un accord de coopération militaire il y a deux semaines. En outre, en novembre, ils ont lancé un exercice aérien.
Peu avant la visite d'Al-Sisi, la ministre soudanaise des affaires étrangères, Mariam Sadek, a été reçue au Caire par son homologue égyptien. C'est après cette réunion qu'ils ont demandé une médiation internationale.
"La sécurité de l'eau de l'Égypte et du Soudan sera en danger si l'Éthiopie poursuit le second remplissage du barrage sans parvenir à un accord juridiquement contraignant", avaient-ils alors prévenu.
Selon le gouvernement soudanais, d'après le journal émirati Al-Ruya, le deuxième remplissage du barrage mettrait en danger la vie de 20 millions de Soudanais vivant sur les rives du Nil, en plus des stations d'eau potable du Nil Bleu et du Nil Principal.
Le chef du département technique du ministère de l'irrigation et des ressources hydrauliques, Mustafa Hassan, a déclaré au même média que la seule alternative est d'arrêter les négociations et de se retirer de la déclaration de principes sur le barrage Grand Ethiopian Renaissance, afin de démontrer l'illégalité de l'action du pays voisin. "Le retrait de la déclaration de principes ne peut pas avoir de répercussions négatives, car cette action est une conséquence de la violation du pacte par l'Éthiopie, d'autant plus que le premier remplissage a été effectué unilatéralement, sans mener les études spécifiées par la déclaration, et pour ne pas avoir réalisé le supplément de sécurité du barrage stipulé par le principe numéro 8 de l'accord."
Il a appelé à "la participation du Soudan à la gestion du barrage" comme solution possible "si les conditions nécessaires sont réunies" et "émises dans le cadre d'une résolution du Conseil de sécurité des Nations unies".
Quelle que soit la solution préconisée, elle est pressée car la deuxième phase de remplissage sera achevée en juillet prochain. Le Nil, l'un des plus longs fleuves du monde, alimente en eau potable et en électricité les dix pays qu'il traverse. Le Nil Bleu rejoint le Nil Blanc à Khartoum, la capitale soudanaise, et fournit la plupart des eaux du Nil qui traversent le nord du Soudan et l'Égypte jusqu'à la Méditerranée.