Les protestataires affirment que le projet de loi ouvrirait le secteur des médias à la corruption et à l'extrémisme

Les journalistes et militants tunisiens s'opposent au projet de loi sur le secteur

PHOTO/AFP - Le Premier ministre Hichem Mechichi

Des journalistes et des militants de la liberté de la presse sont descendus dans la rue en Tunisie pour protester contre une proposition de loi qui supprimerait l'obligation pour les stations de radio et de télévision d'avoir une licence officielle.

Le parti islamiste modéré Ennahda et le magnat des médias Nabil Karoui, dont la propre chaîne de télévision sans licence Nessma a joué un rôle majeur dans la campagne présidentielle l'année dernière, sont des partisans du projet de loi, comme le rapportent les médias numériques du Moyen-Orient.

Cependant, quelque 300 manifestants lors de la manifestation de mardi ont déclaré que l'assouplissement des règles d'autorisation pour les chaînes de médias risque de donner à de puissants intérêts extérieurs le pouvoir d'interférer avec la démocratie tunisienne.

Le groupe parlementaire du Courant démocratique a décidé de présenter une initiative législative relative au projet de loi sur le secteur audiovisuel.

L'annonce a été faite hier par le secrétaire général du parti, Ghazi Chaouachi, précisant que son groupe présentera au parlement le même projet de loi que celui présenté par le précédent gouvernement d'Elyes Fakhfakh.

"Ce gouvernement (du Fakhfakh) a consulté les professionnels du secteur, le syndicat des journalistes, sur le projet de loi concernant la loi audiovisuelle", a déclaré Chaouachi. Un conseil des ministres a approuvé le 7 juillet dernier cet avant-projet de loi organique sur la liberté de communication audiovisuelle, qui vise à organiser le secteur ainsi que les prérogatives de l'organe constitutionnel indépendant.

"Cette proposition d'amendement constitue une réelle menace pour la démocratie et le secteur de la presse", a déclaré Mehdi Jlassi, président du syndicat des journalistes. "L'annulation des licences ouvrira la porte à l'argent corrompu, aux politiciens et peut-être aux extrémistes pour contrôler le secteur", a-t-il déclaré.

Les partisans de ce projet de loi, qui sera discuté par le Parlement mardi, affirment qu'il permettra au secteur de se développer et contribuera à la création de nouvelles chaînes d'information et à la création d'emplois.

Quatre organisations demandent au Parlement de rejeter le projet d'amendement du décret législatif 116 proposé par la coalition Al-Karama.

Les organisations Yo miro, Mourakiboun, Jeunesse Sans Frontières (JSF) et le Centre Tunisien de la Méditerranée (TUMED) ont appelé l'Assemblée des représentants du peuple à respecter la constitution et à ne pas voter en faveur du projet de modification du décret législatif n° 116 sur la communication audiovisuelle.

Le Premier ministre Hichem Mechichi a déclaré la semaine dernière qu'il soutenait toute initiative visant à libéraliser le secteur des médias tout en garantissant son indépendance.

Les manifestants s'opposent également à une disposition du projet de loi qui permettrait à une majorité parlementaire simple de nommer les membres du régulateur des médias au lieu de la majorité des deux tiers actuellement requise.