L'Europe et le dilemme des garanties de sécurité en Ukraine

Les alliés de Kiev cherchent à protéger l'Ukraine d'une éventuelle nouvelle attaque russe si un accord de paix est conclu, mais ils n'ont pour l'instant trouvé aucune solution concrète
  1. Aucun consensus
  2. Les actes manquent, les paroles abondent
  3. Position des autres parties

L'Europe ne fait pas confiance à Donald Trump. Bien que le président américain fasse pression pour parvenir à une paix durable en Ukraine, Zelensky et ses alliés européens ont clairement indiqué qu'ils n'accepteraient aucun accord sans garanties de sécurité suffisantes.  

Lors de la réunion de lundi dernier, Trump a assuré à plusieurs reprises que la protection dont bénéficiera l'Ukraine sera similaire à celle dont bénéficient tous les pays de l'OTAN en vertu de l'article 5, sans toutefois entrer dans les détails, ce qui a suscité des doutes parmi les dirigeants européens. 

C'est pourquoi, 24 heures après la réunion, le secrétaire d'État américain, Marco Rubio, a dirigé un comité conjoint avec des responsables européens et ukrainiens afin d'élaborer et de détailler un plan de garanties satisfaisant pour tous. 

Le président ukrainien Volodymyr Zelenskiy s'exprime lors d'une réunion avec le président américain Donald Trump, le chancelier allemand Friedrich Merz, le président français Emmanuel Macron, le Premier ministre britannique Keir Starmer, la Première ministre italienne Giorgia Meloni, le président finlandais Alexander Stubb, le secrétaire général de l'OTAN Mark Rutte et la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen, au milieu des négociations visant à mettre fin à la guerre menée par la Russie en Ukraine, à la Maison Blanche à Washington, D.C., États-Unis, le 18 août 2025 - REUTERS/Alexander Drago

Aucun consensus

Les garanties de sécurité restent l'un des principaux défis pour les alliés de Kiev, qui n'ont pas réussi à trouver un accord concret depuis plus de trois ans. 

L'option préférée par Kiev, et la plus logique, est de permettre à l'Ukraine de rejoindre l'OTAN, ce qui lui accorderait la protection prévue à l'article 5 du traité de défense mutuelle. Cependant, Washington, avec le soutien tacite de plusieurs pays européens, a écarté cette possibilité en raison des complications que cela entraînerait : quels pays enverraient leurs troupes ? Dans quelles conditions opéreraient-elles ? Comment réagiraient-elles en cas d'attaque ? Qui couvrirait les coûts ?  

Parallèlement, le même jour, il est apparu clairement que les États-Unis n'enverraient pas de troupes en Ukraine, comme l'a confirmé la porte-parole de la Maison Blanche, Caroline Leavitt : « Je peux vous assurer que l'envoi de forces terrestres a été complètement écarté ».  

Mais Trump a été encore plus clair dans une interview accordée à Fox News : « Les pays européens assumeront cette responsabilité », a-t-il déclaré. « La France, l'Allemagne, deux autres pays et le Royaume-Uni veulent avoir des troupes sur le terrain ». Une position que le président français Emmanuel Macron a également confirmée dans une déclaration à la télévision française, où il a déclaré que l'Europe était prête à déployer des « forces de sécurité » pour opérer « par air, mer et terre ».  

La porte-parole de la Maison Blanche, Karoline Leavitt, dans la salle de presse de la Maison Blanche, à Washington, DC, États-Unis, le 17 mars 2025 - REUTERS/ CARLOS BARRIA

Les actes manquent, les paroles abondent

Malgré toutes les déclarations, la réalité est confuse. Bien que l'on en parle beaucoup, les garanties de sécurité pour l'Ukraine restent vagues et sans définition claire. Ce manque de clarté a semé la confusion parmi les alliés. L'absence de définition concrète met également en évidence les faiblesses des pays qui veulent mener cette initiative. 

Macron et Keir Starmer, dirigeants de deux puissances nucléaires et membres du Conseil de sécurité de l'ONU, cherchent tous deux à montrer qu'ils ont encore un rôle important à jouer sur la scène mondiale. Cependant, ils sont confrontés à des obstacles politiques et économiques internes qui font douter de leur capacité à envoyer réellement des troupes en Ukraine.

En Allemagne, la situation n'est pas différente. Le député social-démocrate Andreas Schwarz, chargé de superviser le budget de la défense, a été clair : « C'est une décision qui doit être prise par le Parlement, et non un ordre du gouvernement ». Il a ajouté : « Nous n'avons pas assez de personnel pour déployer une force importante. Même l'envoi d'une petite force serait déjà un défi ». 

Position des autres parties

La Turquie pourrait jouer un rôle clé, compte tenu de l'importance de son armée et de son expérience en mer Noire. Mais sa situation politique est également complexe, la Grèce et Chypre s'opposant à ce qu'Ankara reçoive des fonds européens pour financer sa participation militaire.

La Pologne, qui dispose désormais de la plus grande armée de l'UE, a rejeté l'idée d'envoyer des troupes en Ukraine, mais a proposé d'aider à la logistique de toute mission dans l'est.

Pour sa part, la Première ministre italienne Giorgia Meloni s'est également montrée prudente quant à l'envoi de troupes. Lors d'une conversation avec Macron, elle a proposé qu'il valait mieux offrir à l'Ukraine un accord de défense plutôt que d'envoyer des soldats qui pourraient être entraînés dans une guerre ouverte avec la Russie.  

Le président russe, Vladimir Poutine - REUTERS/ MAXIM SHEMETOV

« Si l'un de nos soldats meurt, devons-nous faire comme si de rien n'était ? Ou devons-nous réagir ? Si nous réagissons, l'OTAN devra intervenir. Cela signifierait l'activation immédiate de l'article 5 », a déclaré Mme Meloni dans le journal italien La Reppublica. 

Enfin, la réaction de la Russie est une autre raison d'être prudent. Malgré l'atmosphère cordiale qui a régné lors du récent sommet en Alaska entre Vladimir Poutine et Donald Trump, Moscou reste fermement opposée à tout déploiement de forces de l'OTAN sur le territoire ukrainien.