Malaise en Arménie face à la gestion gouvernementale du conflit avec l'Azerbaïdjan

Nikol Pashinyan, Premier ministre de l'Arménie - PHOTO/PRESIDENCIA DEL GOBIERNO DE ARMENIA
L'arrestation de l'archevêque Bagrat Galstanyan pour tentative présumée de coup d'État aggrave la crise politique en Arménie
  1. Du conflit historique à l'effondrement politique en Arménie
  2. Arrestations massives
  3. Manifestations de 2024

La tentative avortée de coup d'État qui a eu lieu le 25 juin dernier en Arménie a remis au premier plan le conflit territorial avec l'Azerbaïdjan au sujet de la région du Haut-Karabakh. Selon le Premier ministre arménien, Nikol Pashinyan, l'archevêque Bagrat Galstanyan, figure éminente de l'Église apostolique arménienne et opposant au gouvernement, serait impliqué dans cette tentative de coup d'État.

Galstanyan avait déjà mené en 2024 un mouvement de protestation contre Pashinyan pour sa gestion du conflit territorial avec l'Azerbaïdjan. L'archevêque a été accusé d'avoir planifié, avec plusieurs membres de son entourage, une prise de pouvoir par des moyens non prévus par la Constitution. Selon la commission d'enquête arménienne, le groupe aurait acquis des outils et des ressources dans le but de commettre des actes terroristes et de déstabiliser le pays. Les autorités ont engagé des poursuites judiciaires contre 16 suspects et arrêté 14 personnes, dont l'archevêque lui-même. Pashinyan a qualifié ce complot présumé de « sinistre plan à grande échelle de la part du clergé oligarchique criminel » et a dénoncé son intention de perturber l'ordre constitutionnel de la République. 

Images de l'arrestation de l'archevêque Bagrat Galstanyan, figure de proue de l'Eglise apostolique arménienne et opposant au gouvernement - PHOTO/SOCIAL MEDIA

Du conflit historique à l'effondrement politique en Arménie

Après des décennies de conflit pour le contrôle du Haut-Karabakh (une région située au sud-ouest de l'Azerbaïdjan, à majorité arménienne), le conflit entre l'Arménie et l'Azerbaïdjan a traversé différentes phases marquées par des guerres, des trêves et des négociations infructueuses. 

Le premier conflit a éclaté entre 1988 et 1994, lorsque les Arméniens de l'enclave ont exigé leur rattachement à l'Arménie, ce qui a débouché sur une guerre après la dissolution de l'URSS, les forces arméniennes occupant alors le Haut-Karabakh et les territoires environnants. Bien qu'un cessez-le-feu ait été conclu en 1994, la paix est restée instable au cours des décennies suivantes. 

En 2020, une nouvelle guerre a abouti à un accord négocié par la Russie, aux termes duquel l'Arménie a cédé le contrôle militaire de la région, tout en conservant l'accès au corridor de Lachin. Cependant, en 2023, l'Azerbaïdjan a lancé une offensive qui a consolidé son contrôle total, provoquant la fuite de plus de 100 000 Arméniens ethniques et la dissolution « de facto » de la république autoproclamée. 

Les tensions ont repris en 2024, les deux nations s'accusant mutuellement d'« ethnicide » devant la Cour internationale de justice. Bien qu'un accord de paix ait été annoncé en 2025, l'Azerbaïdjan a refusé de le signer tant que l'Arménie n'aurait pas réformé sa Constitution, ce qui a conduit le Premier ministre Nikol Pashinyan à proposer un référendum en 2027. L'acceptation de la souveraineté azerbaïdjanaise sur le Haut-Karabakh et les tensions internes croissantes ont alimenté des manifestations massives à Erevan, créant un climat politique instable qui a donné lieu à des appels à la démission de Pashinyan et à des allégations de tentative de coup d'État. 

Arrestations massives

Le Comité d'enquête arménien a indiqué que des perquisitions avaient été menées au domicile de l'archevêque Bagrat Galstanyan et d'une trentaine de ses collaborateurs dans le cadre d'une enquête sur une tentative présumée de coup d'État. 

Les autorités accusent l'archevêque d'avoir acquis des moyens et des outils pour commettre des actes terroristes dans le but de prendre le pouvoir, dans le cadre de ce que Pashinyan a qualifié sur Telegram de « sinistre plan à grande échelle du clergé oligarchique criminel visant à déstabiliser la république ». Face à ces actions, le député Garnik Danielyan, proche du chef religieux, a rejeté les accusations et dénoncé des manœuvres propres à un « régime dictatorial ». 

De son côté, le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov, a exprimé son espoir que l'Arménie reste un pays prospère, respectueux de la légalité et ami de la Russie. Bien qu'Erevan soit un allié traditionnel de Moscou, les relations entre les deux pays se sont refroidies ces dernières années en raison du rapprochement de l'Arménie avec l'Occident. M. Peskov a ajouté que la Russie espérait qu'il n'y aurait pas de nouvelle escalade entre l'Arménie et l'Azerbaïdjan, soulignant que les deux parties étaient sur le point de signer un accord de paix. 

Des centaines d'Arméniens se sont rassemblés sur la place de la République d'Erevan, dans la ville d'Erevan, en Arménie - PHOTO/RÉSEAUX SOCIAUX

Manifestations de 2024

En juin dernier, des milliers de personnes se sont rassemblées sur la place de la République à Erevan pour exiger la démission du Premier ministre Nikol Pashinyan, après sa décision de céder des villages frontaliers à l'Azerbaïdjan, une mesure perçue comme une concession sans contrepartie. Cette mobilisation était menée par l'archevêque Bagrat Galstanyan, actuellement en détention, dont l'objectif était de forcer le départ du chef du gouvernement, au pouvoir depuis 2018.