La démission intervient face aux difficultés de formation d'un gouvernement

Moustapha Adib démissionne de son poste de Premier ministre désigné du Liban

AFP/JOSEPH EID - Mustapha Adib lors d'une conférence de presse au palais présidentiel de Baabda, à l'est de Beyrouth, le 31 août 2020

Mustapha Adib, qui a été nommé par le Parlement libanais il y a moins d'un mois pour occuper le poste de Premier ministre, a démissionné de son poste dans l'impasse où se trouve la formation du nouveau gouvernement du pays au Moyen-Orient. 

Le bureau de la présidence libanaise a rapporté sur Twitter que Mustapha Adib avait déclaré au président libanais Michel Aoun, lors d'une réunion au palais présidentiel, qu'il avait décidé de démissionner de la mission de structuration d'une formation gouvernementale.

Le Premier ministre libanais désigné a quitté son poste juste au moment où une impasse politique s'est installée compte tenu de la nécessité de mettre en place un nouvel exécutif après la crise économique et politique que traverse le pays du cèdre, et après les graves explosions que le port de Beyrouth a subies en raison du mauvais stockage de substances chimiques, qui ont fait plus de 190 morts et environ 6 000 blessés. 

« Je m'excuse de ne pas poursuivre la tâche de former le gouvernement », a déclaré Mustapha Adib dans un discours télévisé après avoir rencontré le président libanais Michel Aoun au palais de Baabda.

Adib, qui était auparavant ambassadeur en Allemagne, a été nommé chef du gouvernement à la fin du mois d'août dans le but de former un nouveau gouvernement pour gouverner le pays. Le dernier exécutif du Liban, dirigé par Hassan Diab, a démissionné suite à l'événement susmentionné dans le port de la capitale le 4 août.

Parallèlement, le pays connaît également une crise économique très compliquée liée à une forte dévaluation de sa monnaie, qui a perdu 80 % de sa valeur depuis octobre, et à une inflation qui dépasse les 50 %. 

Le Liban est caractérisé par un système politique de quotas liés aux confessions religieuses. Ainsi, les principaux postes de direction de l'État et du gouvernement sont attribués selon des répartitions préétablies en fonction des différentes religions professées dans le pays. Selon ce modèle, un musulman sunnite doit occuper le poste de premier ministre, tandis que la présidence nationale est confiée à un chrétien maronite et le président du parlement doit être un musulman chiite. 

Cette démission de Mustapha Adib est un revers suite aux efforts du président français Emmanuel Macron pour sortir de l'impasse politique d'une nation en pleine crise financière, politique et sociale majeure. Adib avait reçu le soutien de la France, l'ancienne métropole du Liban, pour concevoir un nouveau cabinet composé de technocrates ou de professionnels indépendants qui devaient être chargés de mener à bien de profondes réformes face à l'actuel système politique libanais, longtemps critiqué pour la corruption qui s'y est installée. 

Élire un gouvernement de cette manière est devenu une mission difficile dans un pays où le pouvoir est partagé entre musulmans et chrétiens et où les loyautés politiques ont tendance à suivre les lignes dictées par les chefs des différentes religions. 

La nomination d'une personne au poste de ministre des finances a été particulièrement problématique, après que les principaux groupes chiites du pays, le Hezbollah et Amal, ont exprimé un profond intérêt pour le ministère des finances. Les deux groupes ont également proposé d'autres ministres chiites pour le nouvel exécutif et ont attaqué la façon dont Adib formait l'équipe gouvernementale. 

Mustapha Adib a tenu plusieurs réunions avec de hauts responsables politiques chiites, mais n'est pas parvenu à un accord sur la manière dont le ministre des finances serait élu. Dans ce scénario, les dirigeants chiites craignaient d'être marginalisés car Adib cherchait à réorganiser les ministères, dont certains sont contrôlés par la même faction depuis des années.

Pas plus tard que cette semaine, l'ancien Premier ministre a mis en garde contre une aggravation et une aggravation de la crise en raison des retards dans la formation d'un gouvernement. Les efforts n'ont pas été suffisants pour que l'Adib réussisse à former un Exécutif de techniciens face à l'insistance des partis politiques à maintenir leurs quotas ministériels.

Le président Michel Aoun lui-même s'est joint à l'initiative de l'ancien Premier ministre et a proposé de supprimer les quotas sectaires pour les ministères, accusant directement les groupes chiites d'Amal et du Hezbollah d'entraver la constitution du gouvernement. « Si le gouvernement n'est pas formé, nous irons en enfer », a déclaré Aoun lui-même lors d'une conférence de presse. Précisément, la formation du Hezbollah a été une fois de plus aux yeux de la communauté internationale il y a quelques jours en raison de l'explosion d'un entrepôt d'armes situé dans le sud du territoire libanais et attribué à la milice chiite, accusée depuis des années d'intervenir de manière décisive dans les affaires du gouvernement libanais pour contrôler le leadership national et d'être aux ordres du grand commanditaire de la branche chiite de l'Islam dans la région : la République islamique d'Iran. Un régime, celui des Ayatollahs, a été pointé du doigt ces derniers mois pour avoir déstabilisé la région avec sa politique belligérante et son ingérence dans les affaires des États voisins.