La presse algérienne s'en prend à la France qui a critiqué la réélection de Tebboune
Les médias algériens accusent la presse française d'être un « chœur médiatique professionnel » contre l'Algérie
Le régime algérien a lancé une campagne contre la France par l'intermédiaire de ses médias officiels, déclenchée par les critiques françaises du processus électoral qui a abouti à la réélection, à une écrasante majorité, d'Abdelmadjid Tebboune à la présidence de l'Algérie.
Cette réaction de la presse officielle algérienne est également liée au changement de position du gouvernement d'Emmanuel Macron concernant la souveraineté du Sahara occidental, qui a été mis en scène le 30 juillet.
Couverture des élections algériennes
Les médias officiels algériens ont critiqué la couverture médiatique de leurs homologues français lors des récentes élections, qui se sont achevées le dimanche 8 septembre par la réélection de Tebboune, qui a obtenu 94,7 % des voix.
Ses deux rivaux, l'islamiste Abdelali Hassani Cherif, avec 3,2 %, et le socialiste Youcef Aouchiche, avec 2,2 %, étaient loin derrière le président sortant.
Les rapports des médias français mettant en cause l'équité du processus électoral n'ont pas été bien accueillis en Algérie. La presse française souligne le fait que Tebboune n'a eu que peu de concurrence réelle et que les deux autres candidats autorisés à se présenter ne bénéficiaient pas d'un soutien populaire significatif.
La faible participation des citoyens algériens aux élections présidentielles, moins de la moitié de l'électorat, a également été soulignée, reflétant le désaccord du peuple algérien avec le système actuel, le manque de pluralisme et l'absence de personnalités politiques de premier plan.
Réaction de l'APS
La réaction du gouvernement algérien, par l'intermédiaire des médias officiels, ne s'est pas fait attendre : l'agence de presse officielle algérienne, Algeria Press Service (APS), a souligné que la presse française « est devenue un chœur médiatique professionnel » dans ses pratiques hostiles à l'Algérie.
Dans un communiqué sévère intitulé « Français, l'Algérie n'est pas votre protectorat », publié lundi 9 septembre, l'agence qualifie la chaîne de télévision France 24, qui recueille les opinions des opposants de Tebboune à l'étranger, de « chaîne poubelle » et ajoute que « le principal souci de la presse française est de tenter d'assombrir le tableau en s'appuyant sur un ton d'intimidation truffé de mensonges. Ce groupe s'attaque ouvertement à toutes les transformations que connaît l'Algérie. Nous l'avons constaté depuis l'élection du président Tebboune ».
L'agence algérienne a également qualifié le gouvernement de l'actuel président Emmanuel Macron de « l'une des périodes les plus sombres de l'histoire de la Vème République ».
Les informations diffusées par l'APS utilisent également le passé colonialiste français comme l'une des raisons de l'hostilité des médias occidentaux à l'égard de l'Algérie : « L'Algérie, dont vous avez été expulsés, est un pays de libertés, un pays stable et prospère, loin d'être une colonie de la misère », soulignent-ils.
Les médias officiels justifient cette prétendue prospérité économique par des rapports émanant d'organisations internationales telles que la Banque mondiale et le Fonds monétaire international, et la comparent même favorablement à la situation économique de la France : « L'Algérie des années 2020 est un pays doté d'institutions légitimes et stables, alors que la France est devenue un pays ingouvernable. A l'heure où l'Algérie est encore un pays sans dette, la France se noie dans un océan de dettes, qui dépassent les 3 milliards ».
La France change de gouvernail au Sahara
Outre les élections, la réaction de colère de la presse officielle algérienne contre la France doit être interprétée dans un contexte politique, en tenant compte du récent changement entrepris par le gouvernement de Macron en ce qui concerne la question du Sahara occidental.
Il convient de rappeler que le 30 juillet dernier, coïncidant avec les célébrations du 25e anniversaire du règne de Mohammed VI, le président Macron a mis en scène le changement de position de Paris sur le Sahara dans une lettre adressée au monarque marocain, dans laquelle il a déclaré que « le présent et l'avenir du Sahara occidental s'inscrivent dans le cadre de la souveraineté marocaine. La France entend agir en cohérence avec cette position tant sur le plan national qu'international ».
Ce changement de position a constitué un séisme diplomatique pour l'Algérie qui avait mis en garde les autorités françaises, quelques jours auparavant, de ne pas emboîter le pas à l'Espagne en faveur du Maroc sur la question du Sahara occidental.
En effet, le jour même où le contenu de la lettre de Macron à Mohammed VI a été connu, l'Algérie a annoncé le retrait de son ambassadeur à Paris, Saïd Moussi, notant que « la représentation diplomatique de l'Algérie en France dépend désormais d'un chargé d'affaires ».
Il se trouve que Said Moussi était lui-même l'ambassadeur algérien à Madrid qui avait été rappelé pour consultations en mars 2022, suite au soutien du gouvernement espagnol à la solution marocaine au conflit du Sahara occidental.
Aujourd'hui, le gouvernement algérien tente de retrouver son poids international, face à l'avalanche de soutiens internationaux à la proposition marocaine pour le Sahara, au prix du lancement de ses médias officiels contre la France.