Le roi Abdallah II proclame la fin de la "sédition" au sein de la famille royale de Jordanie
Le roi Abdallah II de Jordanie a rompu son silence mercredi en publiant une déclaration officielle dans laquelle il affirme que "la sédition a été tuée dans l'œuf", en référence à l'enquête ouverte contre son demi-frère et ancien héritier de la Couronne, le prince Hamza bin Hussein, pour son implication présumée dans une tentative de coup d'État.
Dans cette lettre, Abdullah II fait remarquer que "le défi de ces derniers jours n'était pas le plus difficile ou le plus dangereux pour la stabilité de notre nation, mais il était pour moi le plus douloureux", car il venait de l'intérieur de la famille royale. "La sédition est venue de l'intérieur et de l'extérieur de notre seule maison, et rien n'est comparable à mon choc, ma douleur et ma colère en tant que frère et en tant que chef de la famille hachémite, et en tant que leader de ce peuple fier."
Les autorités jordaniennes ont accusé dimanche le prince Hamza bin Hussein de faire partie d'un complot visant à "déstabiliser la sécurité nationale" de la Jordanie. Le gouvernement a fait état de l'arrestation d'au moins 18 hauts fonctionnaires, dont des assistants et des associés de l'ancien héritier du trône, ainsi que de plusieurs membres de l'une des puissantes tribus dont la monarchie jordanienne a toujours dépendu.
Hamza bin Hussein lui-même a ensuite été placé en résidence surveillée. Il l'a dit lui-même après la publication de deux vidéos, dans lesquelles il explique qu'il lui a été interdit de quitter sa résidence et de communiquer avec son entourage pour avoir critiqué le gouvernement et le roi. Abdullah II a annoncé que "Hamza est aujourd'hui avec sa famille, dans son palais, à ma charge", après plusieurs jours sans faire d'apparition publique.
Le monarque a profité de l'occasion pour revendiquer son rôle et celui des autorités. Dans sa déclaration, il a indiqué que sa principale responsabilité était de "servir la Jordanie et de protéger son peuple, sa Constitution et ses lois". Il a également souligné que "rien ni personne n'est au-dessus de la sécurité et de la stabilité de la Jordanie, et qu'il est impératif de prendre les mesures nécessaires pour assumer cette responsabilité".
Dans la lettre, lue par un présentateur de la chaîne Jordan TV, Abdullah II a vivement critiqué l'attitude de son demi-frère : "Le prince Hamza s'est engagé devant la famille à suivre les traces de ses ancêtres, à rester fidèle à sa mission et à placer l'intérêt de la Jordanie, la Constitution et les lois au-dessus de toute considération.
Concernant l'enquête à laquelle est confronté l'ancien héritier du trône, l'actuel chef de l'État a expliqué que le résultat de l'enquête sera annoncé conformément à la loi et lorsque le processus juridique sera terminé. Le procureur général, Hassan Abdallat, a annoncé mardi l'imposition de la censure sur tous les types de publications d'informations, y compris les images et les vidéos, relatives à Hamza bin Hussein, après avoir précisé que cela ne concernait que les "questions liées à l'enquête, à sa confidentialité, à la sécurité, aux preuves et aux personnes impliquées". Les autorités ont donc mis un veto à la couverture médiatique de la dispute royale.
Le prince Hamza a montré publiquement ses désaccords avec les dirigeants politiques du pays. L'ancien héritier de la couronne a dénoncé à plusieurs reprises la corruption systémique, les lacunes démocratiques et la mauvaise gestion politique en Jordanie. Cependant, après la publication d'un enregistrement dans lequel il exprimait clairement son animosité envers le monarque, la Maison royale a publié une déclaration dans laquelle il aurait radicalement changé de position et promis de corriger son comportement.
La division de la famille royale s'est produite au milieu d'une situation économique, sociale et sanitaire déjà défavorable. Cependant, la pandémie a été responsable de l'aggravation de la crise. Les derniers chiffres font état d'un taux de chômage proche de 25 %, et les plaintes de longue date concernant la corruption et la mauvaise gestion ont constitué le terreau idéal pour le déclenchement de plusieurs manifestations au cours des derniers mois.
Après avoir été nommé prince héritier par Abdullah II lors de son accession au trône en 1999, Hamzah a été destitué par le roi actuel en 2004. Pendant les premières années, il a gardé le silence sur cette dégradation, mais Hamza bin Hussein a essayé de s'arroger le rôle de représentant du mécontentement social. Cette division peut également lui servir de grande opportunité pour renforcer sa popularité et gagner des adeptes pour sa cause.
Le paysage stratégique du Moyen-Orient continue de changer à la suite du rapprochement entre les États du Golfe et Israël à la suite des accords d'Abraham. Cette situation pourrait compromettre le rôle de la Jordanie dans le processus de paix, car elle est considérée par l'Occident comme un allié clé dans les efforts militaires internationaux visant à endiguer la menace terroriste. En outre, avec une population importante d'origine palestinienne, la Jordanie est un acteur clé dans toute négociation de paix israélo-palestinienne future.
Hier, après la rebuffade d'Erdogan, le président de la Commission européenne a rendu visite au roi Abdallah II à Amman pour renforcer la coopération bilatérale et soutenir l'aide financée par l'UE aux réfugiés syriens en Jordanie. La réunion a également été interprétée comme une manifestation claire du soutien de l'UE au monarque actuel.
Quelques heures après cette déclaration, le président américain Joe Biden a eu un entretien téléphonique avec le chef d'État jordanien pour lui faire part du soutien de Washington et de l'importance de son leadership dans la région. Selon la brève déclaration publiée par la Maison Blanche, les deux hommes ont évoqué les "liens bilatéraux forts" qui les unissent en matière économique, politique et de sécurité. M. Biden a profité de l'occasion pour montrer au monarque l'intention des États-Unis de créer deux États pour mettre fin au conflit entre Israël et la Palestine.