Le sommet Russie-Afrique 2023 suscite des pressions de la part des États-Unis et de la France
Depuis que la Russie a commencé son invasion de l'Ukraine il y a un an et demi, le Kremlin a intensifié ses efforts pour forger des liens avec d'autres régions qui pourraient compenser le terrain qu'il perdait inévitablement à l'Ouest. Les pays européens ont imposé un blocus au gouvernement de Vladimir Poutine que les Russes ont tenté de contourner en s'engageant dans le "Global South". Ce concept considère l'Afrique comme un pôle de développement et de croissance, ce qui s'avère certainement de plus en plus puissant.
Les Russes ont donc vu une fenêtre d'opportunité dans l'arrière-cour de l'OTAN, comme le diplomate Jorge Dezcallar appelle l'Afrique du Nord dans son livre Operation False Flag : From the Kremlin to Tindouf (Opération faux drapeau : du Kremlin à Tindouf). L'Algérie, le plus proche allié de la Russie dans la région, n'est pas le seul signe des intentions de la Russie, qui continuent de progresser régulièrement, comme le montre le deuxième sommet Russie-Afrique qui se tiendra demain 26 août à Saint-Pétersbourg. Le président sud-africain a confirmé sa présence à cet événement, largement motivé par les liens qui unissent son pays à la Russie, comme l'accord BRICS (Brésil, Russie, Inde, Chine et Afrique du Sud).
Cyril Ramaphosa, président sud-africain, a confirmé sa présence au sommet, auquel il sera accompagné de Naledi Pandor, ministre des Relations internationales et de la Coopération, et de Khumbudzo Ntshavheni, ministre de la Présidence responsable de l'Agence de sécurité de l'État, entre autres hauts fonctionnaires. La note publiée par la présidence indique les questions qui seront abordées lors de la réunion, notamment la coopération dans les domaines de la politique, de la sécurité et du commerce.
Elle mentionne également un intérêt particulier pour l'union des forces dans la lutte contre le terrorisme et la prévention d'une course aux armements. C'est lors de ce même événement que les chefs d'État africains qui font partie de la mission de paix sur la guerre entre l'Ukraine et la Russie aborderont la question avec Poutine. Cependant, la réalité est que l'espoir de parvenir à un accord à cette occasion est faible, surtout après la tension croissante de la Russie avec les pays occidentaux suite aux "pressions" dénoncées par le Kremlin.
Le porte-parole de la présidence russe, Dmitri Peskov, a déclaré que "pratiquement tous les pays africains ont été soumis à une pression sans précédent de la part des Etats-Unis". Il a ajouté que "l'ambassade de France n'était pas et n'est pas non plus restée les bras croisés", accusant également le pays d'Emmanuel Macron de faire pression sur certains pays pour qu'ils ne participent pas au sommet. Peskov considère que cette position "mérite d'être condamnée", et affirme qu'"ils font leur possible" pour empêcher la tenue de la réunion, dont il espère sortir avec la publication de quatre déclarations finales et d'un plan d'action triennal, comme l'indiquait également le communiqué sud-africain.
Les pressions exercées par la Russie ne sont qu'un des signes de la tension générée en Occident par la position de plus en plus forte de Moscou en Afrique. Avec la Chine, ils parviennent à étendre leur zone d'influence et à gagner du poids auprès d'une liste de pays de plus en plus longue. Et la réaction des pays africains, qui sont pour la plupart restés neutres face à l'invasion russe en Ukraine, est loin d'être hostile aux aspirations russes.
L'Afrique du sud n'est pas le seul exemple, mais c'est l'un des plus forts. Ces pays défendent leurs propres intérêts, et les BRICS, que de nombreux pays tentent de rejoindre, figurent en bonne place dans leur agenda. L'accord qui unit les cinq pays susmentionnés est basé sur la coopération économique et commerciale et représente un lien fort entre des nations qui partagent des caractéristiques démographiques et, lorsqu'il a été signé au début du siècle, également des attentes en matière de croissance économique.
Un sommet des BRICS est d'ailleurs prévu du 22 au 24 août à Johannesburg. Les premiers points de cette rencontre seront également discutés cette fois-ci sur le sol russe, où la Russie et l'Afrique du sud espèrent renforcer leurs liens et préparer le terrain pour la fin du mois d'août. La position de l'Afrique du sud suggère que, loin de répudier systématiquement Moscou, comme le fait l'Occident depuis un an et demi, elle profite de l'occasion pour renforcer ses liens avec le Kremlin. Et c'est précisément cette volonté de coopération qui devrait préoccuper les États-Unis, dont la politique étrangère en Afrique et au Moyen-Orient n'est pas au mieux de sa forme.
Coordinateur pour les Amériques : José Antonio Sierra