Des dizaines de morts et des centaines de disparus après un naufrage au large des côtes grecques

Un récent naufrage en Grèce révèle les failles de la politique migratoire européenne

REUTERS/Stelios Misinas - Fedi, 18 ans, survivant d'un naufrage en Syrie, retrouve son frère Muhammad

La Méditerranée est une fois de plus devenue la fin tragique de centaines de personnes qui aspiraient à rejoindre l'Europe pour une vie meilleure. Une fois de plus, les côtes grecques ont été le théâtre du désespoir de centaines de citoyens qui, parce qu'ils sont nés dans certains pays, ne bénéficient pas de conditions de vie décentes et équitables.

Un désespoir qui les pousse à prendre la mer, souvent à bord d'embarcations de mauvaise qualité qui finissent par faire naufrage après avoir payé de fortes sommes d'argent aux trafiquants et aux mafias. C'est la situation dans laquelle se trouvaient entre 500 et 700 personnes à bord du chalutier qui a coulé mercredi au large des côtes grecques.  

REUTERS/Stelios Misinas - Les survivants du naufrage au large de la Grèce

Le naufrage a fait au moins 79 morts, mais il est possible que le chiffre réel soit beaucoup plus élevé, car des centaines de personnes sont portées disparues. De plus, comme le rapporte la BBC, on estime à 100 le nombre d'enfants qui se trouvaient à bord du navire.

Les autorités grecques recherchent inlassablement les disparus. Jusqu'à présent, elles ont réussi à sauver plus de 100 personnes vivantes, la plupart d'entre elles étant d'origine syrienne, égyptienne et pakistanaise. Une porte-parole des garde-côtes a déclaré à l'AFP que deux patrouilleurs, un hélicoptère et six navires se trouvaient à l'ouest de la péninsule du Péloponnèse, l'une des parties les plus profondes de la Méditerranée.  

REUTERS/Stelios Misinas - Les autorités grecques recherchent sans relâche les personnes disparues

La police grecque a également arrêté neuf Égyptiens soupçonnés d'avoir participé à la catastrophe. "De nombreux trafiquants enferment les gens dans la cale du bateau pour garder le contrôle", a déclaré le porte-parole du gouvernement, Ilias Siakantaris, à la télévision publique ERT.

Selon les médias grecs, le bateau est parti d'Égypte et a fait escale dans le port libyen de Tobrouk avant d'entamer son dernier voyage, à destination de l'Italie. Les migrants ont payé entre 4 000 et 6 000 euros pour monter à bord

"L'UE doit mettre en place une politique migratoire forte" 

Il s'agit de l'une des plus grandes tragédies migratoires de ces dernières années en Grèce, pour laquelle les autorités ont décrété trois jours de deuil. Des milliers de personnes ont également manifesté dans diverses régions du pays en mémoire des victimes et pour dénoncer les échecs de la politique migratoire de l'Union européenne.  

Louisa GOULIAMAKI/AFP - Manifestation à Athènes après le naufrage

La Grèce, comme d'autres pays du sud de l'Europe tels que l'Espagne et l'Italie, est l'une des principales portes d'entrée sur le continent pour les réfugiés et les migrants en provenance du Moyen-Orient, d'Asie et d'Afrique. C'est pourquoi Athènes a demandé à plusieurs reprises à Bruxelles de mettre en place une politique migratoire "solide". "L'UE doit fournir l'asile, l'aide et la sécurité à ceux qui en ont vraiment besoin. Il ne s'agit pas d'un problème grec, italien ou chypriote. L'UE doit mettre en place une politique migratoire forte", a déclaré Yiorgos Michaelidis, un fonctionnaire du ministère grec de l'immigration, cité par la BBC.

Cependant, malgré le rôle de la Grèce dans les routes migratoires ces dernières années, de nombreux migrants ont cherché d'autres alternatives. Athènes a augmenté les patrouilles en mer et construit une clôture frontalière. De plus, le voyage vers l'Europe occidentale ou septentrionale depuis la Grèce implique la traversée de la région compliquée des Balkans.  C'est pourquoi de nombreuses personnes - principalement originaires de Côte d'Ivoire, d'Égypte, de Guinée, du Pakistan et du Bangladesh - ont choisi de se rendre en Italie, où 55 160 arrivées "irrégulières" ont été enregistrées depuis le début de l'année

SPYROS BAKALIS/AFP -  Athènes a demandé à plusieurs reprises à Bruxelles de mettre en place une politique migratoire "solide"

Ce naufrage met une fois de plus en lumière les échecs de la politique migratoire européenne. Depuis 2014, on estime à 27 000 le nombre de personnes mortes ou disparues en tentant de rejoindre l'Europe en traversant la Méditerranée, selon les chiffres de l'Organisation internationale pour les migrations (OIM). "Combien de personnes doivent encore mourir sous les yeux de Frontex et de l'UE ?", s'interroge l'ONG allemande Sea Watch.