Le Maroc reprend ses relations avec Israël
L’annonce était attendue, le timing parfait. On le savait et beaucoup ne voulaient pas y croire. Pourtant Trump l’avait bel et bien promis. Le Maroc normalise ses relations avec Israël. Les Marocains ont découvert la nouvelle via un tweet du président américain sortant fidèle à son mode de communication sur les réseaux sociaux.
C’est bien plus tard que le cabinet royal communiquera autour de la question en prenant le soin de préciser que le Roi Mohammed VI s’était entretenu avec le président de l’Autorité palestinienne Mahmoud Abbas "Sa Majesté le Roi, que Dieu Le préserve, a réaffirmé à Son Excellence que la position de Sa Majesté le Roi soutenant la cause palestinienne demeure inchangée (…) Dans ce sens, le Souverain a souligné que le Maroc soutient la solution à deux États et que les négociations entre les parties palestinienne et israélienne sont la seule voie pour parvenir à une solution définitive, durable et globale à ce conflit".
Suite à ces déclarations des tentatives de manifestations ont eu lieu à la capitale marocaine Rabat en soutien à la Palestine mais qui ont été vite dispersées par les forces de l’ordre. Pendant que les Israéliens fêtaient ce retour à la normale, les Palestiniens n’ont même pas pu exprimer leur désarroi. C’est ce que confirme le journal arabophone El Arabi El Jadid, dirigé par l’homme politique palestinien Azmi Bishara. Selon la même source l’Autorité palestinienne a interdit à son administration de critiquer la normalisation entre les pays arabes et Israël. Les comités de l’exécutif de l’OLP et l’Administration du Fatah en Cisjordanie ont reçu l’ordre de ne rien commenter. Seul le Hamas à Gaza a osé qualifier la normalisation de « Péché » respectant ainsi sa rhétorique religieuse.
Pourtant, on se souvient il y a à peine quatre mois de la colère de Mahmoud Abbas lorsque les Emirats Arabes unis avaient reconnu l’Etat d’Israël. Le premier homme de l’OLP s’était empressé de rappeler son ambassadeur aux Emirats et avait convoqué une session extraordinaire de la Ligue Arabe. Aujourd’hui le ton est plus mesuré. Mahmoud Abbas est de plus en plus isolée et devrait composer avec.
En quelques mois seulement, l’Etat hébreu n’a cessé de gagner du terrain, le Soudan, le Bahreïn et les Emirats- Arabes-unis le reconnaissent aujourd’hui à côté de l’Egypte et de la Jordanie. Il reste très peu d’alliés à l’Autorité palestinienne dans la Région. Le Fatah perd pied sur le plan interne et à l’échelle internationale tandis que que le Hamas gagne en radicalité.
Benyamin Netanyahou a qualifié l'accord avec le Maroc d’historique. Mais c’était un peu le secret de polichinelle. La presse israélienne l’avait annoncé il y a plusieurs mois déjà après la visite du chef de la diplomatie américaine Mike Pompeo au Maroc. A l’époque le chef du gouvernement marocain al Othmani à la tête du parti Islamiste du PJD s’était empressé de démentir toute possibilité de normalisation entre les deux pays. S’étant fait appeler à l’ordre, il est revenu sur sa déclaration quelques jours plus tard pour dire que cette position était celle de son partie et non celle de l’Etat.
Pour le Maroc, le deal est de taille. La question du Sahara que se dispute le royaume chérifien et les séparatistes du Polisario a pesé lourdement dans les négociations. Trump reconnait la souveraineté du Maroc sur le Sahara et des investissements américains dans la Région sont déjà attendus.
Au pays de Mohammed VI, pas question de relier les deux conflits. "Les relations entre le Maroc et Israël étaient déjà normales" n’a cessé de soutenir le ministre marocain des Affaires étrangères Nasser Bourita à la presse et notamment au quotidien israélien Yediot Aharonot.
En effet, en 1994, le roi Hassan II avait établi des relations diplomatiques via des bureaux de liaison entre les deux pays. Il était à ce titre le troisième pays après l’Egypte et la Jordanie à reconnaître Israël. Des liens que son successeur au trône Mohmmaed VI avait rompus suite à la deuxième Intifada en 2000 en soutien au peuple palestinien. Mais vingt ans plus tard, l’eau a coulé sous les ponts.
En Israël des scènes de liesse et de joie ont été relayés par les chaînes de télévision. Les Juifs du Maroc veulent pouvoir visiter à nouveau la terre de leurs parents et grands-parents sans difficultés. D’ailleurs une liaison entre les deux pays est prévue dans les mois qui viennent. Pour mémoire au Maroc, les 700 mausolées de saints juifs attirent quelque 80 000 pèlerins annuellement. Un business assez juteux qui pourra être développé davantage.
Aujourd’hui il reste quelque 2000 juifs dans le royaume et Mohammed VI qui porte la bannière de Amir al Mouaminin (Commandeur des croyants) s’inscrit également en protecteur des minorités. Le 12 novembre dernier, le roi avait annoncé l’introduction de l’enseignement du judaïsme dans les écoles publiques marocaines amorçant ainsi une nouvelle politique dans la région.
Par ailleurs, et en sa qualité de Président du Comité Al-Qods, Mohamed VI a un rôle à jouer sur le statut particulier de la ville de Jérusalem. L’annexion de Jérusalem Est, fait-elle partie des négociations ? Les mois qui viennent nous le diront !