Exécutions en Iran

AP/HALABISAZ - Sur cette photo d'archives du 1er août 2007, des policiers iraniens et d'autres personnes assistent à la pendaison de cinq criminels condamnés dans un quartier de Mashad, à 1 000 kilomètres au nord-ouest de Téhéran, en Iran

Le commandant du Corps des gardiens de la révolution islamique (CGRI) le général Hossein Salami, a déclaré dans son dernier discours en Iran que « les émeutes de l'année dernière ont été le combat mondial le plus puissant, le plus dangereux, le plus sérieux, le plus inégal et le plus étendu contre le régime islamique d'Iran. » Le site Bassirate de la milice du Bassidj qui le citait le 1er aout complétait sa citation : « Mais l'ennemi a été vaincu dans ce dur combat. Les troubles de l'an passé ont été amers, mais ils nous ont apporté de grandes leçons et de grandes batailles. Nous sommes à un nouveau point de départ et l'ennemi envisage de créer de nouveaux troubles pour l'anniversaire des événements de l’automne 2022. Avec notre préparation et notre vigilance, l'ennemi ne pourra rien faire, et la solution pour y faire face reste la prévention ».   

Plus de 400 exécutions depuis le début de 2023, dont celles de jeunes Baloutches et Kurdes pour se venger de ces deux minorités ethniques rebelles, n'ont pas permis au régime de contenir le soulèvement à venir. Alors il a fait revenir les patrouilles de la police des mœurs dans la rue dans le but de réduire la bataille pour liberté en un conflit sur le Hijab, en divisant la société entre voilées et non-voilées. 

Le régime est bien conscient de la révolte qui gronde dans la société. Femmese femmes ne veulent plus céder aux contraintes malgré les intimidations et les menaces. Chaque jour, des portraits des dirigeants enturbannés partent en fumée dans les rues et les murs regorgent de slogan appelant à leur chute. Chaque jour, les autorités inquiètes annoncent sur leurs sites la découverte d'armes ou l'arrestation d'équipes armées. 

Avec une inflation à trois chiffres, notamment des produits alimentaires, et plus de 60 millions d’Iraniens sous le seuil de pauvreté, le pouvoir sait parfaitement qu'un autre soulèvement est inévitable. 

L’Etat clérical s'efforçait jusqu'à présent de garder le silence sur son opposition pour faire croire à l’absence d’alternative et s’imposer en unique solution. Mais avec le soulèvement, il est contraint de désigner son principal ennemi et son alternative. Le site du pouvoir judiciaire Mizan écrivait le  29 juillet 2023 : « Le premier tribunal pénal de la province de Téhéran a annoncé que 104 membres de l'Organisation des Moudjahidine du peuple (l’OMPI) , connue sous le nom de Monafequine (terme péjoratif pour désigner l’OMPI), vont être jugés par contumace. Il est nécessaire qu’ils se défendent en se faisant représenter au tribunal par un avocat. »  

La justice cléricale n'a donné aucune explication sur les raisons de cette décision aussi étrange qu’inattendue. Cependant le site "Basij News", de la milice attachée aux pasdarans, a jeté un nouvel éclairage sur la décision en publiant en première page la note d’un milicien de la section étudiante. Dans cette note, préparée en plein soulèvement en janvier dernier, le milicien admettait ouvertement que Téhéran estimait que l'Occident et surtout les États-Unis avaient accepté le Conseil national de la Résistance iranienne dont l’OMPI est membre, comme seule alternative au pouvoir islamiste en Iran.   

Il y a environ un mois, alors que le régime iranien préparait le terrain en faisant pression sur le gouvernement albanais pour qu’il attaque Achraf-3, le siège de l’OMPI en Albanie, Kazem Gharibabadi, chargé des « droits de l'homme » dans la dictature religieuse, avait annoncé la possibilité de faire extrader les membres de l’OMPI en Iran. En se plaignant des pays qui accueillent cette organisation en Europe, il avait déclaré : "Des poursuites ont été intentées contre des membres du groupe dans divers pays européens, mais certains gouvernements n'ont pas bien traité les cas concernant l’OMPI dans leurs procédures judiciaires. » (Farda News, 1er août 2023).  

Pour un régime qui a fait massacrer en été 1988, 30.000 jeunes prisonniers politiques par des commissions de la mort composées de trois individus (dont l’actuel président Ebrahim Raïssi) lors de procès minutes sans avocat, ce souci soudain de procédure judiciaire cache à n’en pas douter des manœuvres mesquines. Il cherche à paralyser son opposition et donc à retarder une nouvelle explosion de colère populaire qui risque de le balayer.