Boris Johnson réussit à quitter l'Union européenne mais maintient un menu à la carte avec Bruxelles sur les questions spatiales

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Les diplomates britanniques ont montré leur pragmatisme et ont prouvé une fois de plus qu'ils sont de grands négociateurs. D'autre part, Bruxelles essaie de vendre au reste des citoyens de l'Union européenne les terribles conséquences que les sujets de Sa Gracieuse Majesté subiront à partir du 1er janvier de cette année.

Mais les politiciens qui gouvernent le destin de la Grande-Bretagne ne partagent pas ce point de vue, d'autant plus que les locataires successifs du 10 Downing Street ne sont pas qualifiés de suicidaires.

Finalement, au cours de ses quatre années de lutte acharnée avec Bruxelles, Londres semble avoir sorti le chat du sac sur un certain nombre de questions, ayant obtenu un certain nombre de concessions non négligeables. Par exemple, l'équipe de négociateurs britanniques a réussi à obtenir l'exemption des restrictions à la circulation des biens et des services pour l'Irlande du Nord, qui s'applique à l'Angleterre, au Pays de Galles et à l'Écosse.

Et en ce qui concerne l'Espagne, Gibraltar a réussi à extraire un ensemble d'avantages qui, en l'absence de précision sur les termes du principe de l'accord, peuvent conduire à ce qu'un grand nombre de sociétés, d'organisations et de personnes soient domiciliées sur le Rocher. Comme si cela ne suffisait pas, The Rock est en passe de devenir une porte d'entrée majeure pour les citoyens britanniques vers les pays de l'Union européenne.

En bref, le Premier ministre Boris Johnson a réussi à prendre ses distances par rapport à l'Union européenne d'une manière qui lui déplaît, qui limite la capacité du Royaume-Uni à prendre des décisions autonomes et qui ne profite pas à son économie. Au contraire, la Grande-Bretagne a réussi à rester liée d'une manière ou d'une autre à Bruxelles dans ce qui l'intéresse du point de vue de ses intérêts économiques, industriels ou stratégiques.

C'est ici que je m'arrête, mais c'est ici que je reste

Un exemple de la sélection à la carte que le chef de la délégation de négociation britannique, le diplomate chevronné David Frost, a enlevé à l'expert diplomatique français Michel Barnier est la participation différente que la Grande-Bretagne aura désormais aux quatre grands projets spatiaux dans lesquels l'Union européenne est immergée.

Londres a réussi à conserver sa participation à Copernicus, le grand programme mondial d'observation de la Terre dirigé par Bruxelles, dont le but est de générer et de produire des images, des données et des informations pour mettre en œuvre les politiques européennes dans le domaine de la préservation de l'environnement et de la sécurité des citoyens.

Grâce aux concessions de l'UE, les utilisateurs britanniques auront un accès libre et gratuit à la grande majorité des données et des services fournis par les différents satellites Sentinel de la constellation Copernicus, y compris ceux qui renforcent la surveillance des frontières terrestres et maritimes des îles. Cette mesure garantit que les entreprises, les universitaires et les chercheurs britanniques pourront soumissionner pour les futurs contrats Copernicus qui feront l'objet d'appels d'offres dans toute l'UE.

La négociation a été extrêmement compliquée. Copernicus est un programme conjoint entre l'Union européenne et l'Agence spatiale européenne (ESA) et deux questions essentielles ont dû être conciliées. Le Royaume-Uni a quitté l'UE, mais reste membre à part entière de l'ESA, une organisation intergouvernementale extérieure à Bruxelles créée en 1975 pour garantir les capacités et les investissements spatiaux européens au profit de ses citoyens. En outre, Bruxelles contribue à hauteur de 70 % aux 5,4 milliards d'euros de son financement total à Copernic et l'ESA aux 30 % restants.

Contrairement à Copernic, Londres abandonne définitivement le grand programme spatial Galileo, le système européen de navigation et de positionnement par satellite, qui est en concurrence avec le GPS des États-Unis, le GLONASS de la Russie et le Beidou de la Chine. Pour l'instant, elle a renoncé à son illusion de mettre en place un GPS national, mais elle devrait renforcer ses liens avec Washington, qui met en orbite ses nouveaux satellites GPS III, avec des fonctionnalités similaires à celles offertes par Galileo.

Et dans cet autre, fifty-fifty

Bien qu'ils aient abandonné Galileo, la grande majorité des utilisateurs britanniques d'appareils électroniques - principalement des téléphones mobiles - pourront continuer à l'utiliser, tout comme les entreprises et les organisations du Royaume-Uni. Ils conserveront tous leur accès aux services de position, de navigation et de synchronisation libres et ouverts fournis par GALILEO, tout en étant en mesure de développer des produits et des services pour les consommateurs du monde entier, avec l'avantage de connaître les tenants et aboutissants du réseau.

En revanche, les entreprises, les universitaires et les chercheurs britanniques ayant des contrats liés à Galileo ou censés en avoir devront renégocier les termes de leurs accords, ce qui s'étend également aux organisations britanniques qui hébergent ou gèrent l'infrastructure terrestre de Galileo.

La même résolution a été prise à Londres en ce qui concerne le service européen de navigation par recouvrement géostationnaire (EGNOS), un système qui fournit des services de navigation améliorés pour faciliter les transports aériens, maritimes et terrestres dans toute l'Europe. Cette mesure signifie que les utilisateurs du Royaume-Uni, à partir du 25 juin 2021, n'auront plus accès au service de données EGNOS qui, avec Galileo, dispose d'un budget de 9 milliards d'euros pour les années à venir.

Dans le cadre du programme européen de contrôle et de surveillance de l'espace (EUSST), l'équipe de négociation de David Frost a fait un véritable tabac. Troisième en importance pour Bruxelles, les Britanniques ont réussi à continuer d'utiliser les services fournis par le programme, permettant à leurs opérateurs de satellites de communication de recevoir gratuitement des données afin d'éviter les collisions dans l'espace dues aux débris spatiaux.

Cependant, le Royaume-Uni s'est exclu du programme parce qu'il a un accord à ce sujet avec Washington, qui lui fournit toutes les informations nécessaires. Elle ne permettra pas non plus à ses scientifiques et techniciens de participer aux groupes de travail. Et elle a exclu de participer à GovSatCom, un projet qui vise à déployer une constellation de communications gouvernementales par satellite. Il est promu par le commissaire au marché intérieur et responsable de l'industrie spatiale et de la défense, le Français Thierry Breton.