La proposition d'autonomie du Sahara reste bloquée

Environnement du Sahara occidental - AFP/FADEL SENNA

Lorsque le Royaume du Maroc a présenté son "Plan d'autonomie pour le Sahara" à l'ONU en avril 2007, l'impact sur l'opinion publique mondiale, les gouvernements et les représentants des Nations unies a été écrasant.  

  1. Le rôle important du roi Mohammed VI 
  2. Plan d'autonomie pour le Sahara occidental 

À l'époque, le Maroc était en plein processus de réconciliation nationale, de transformations internes et d'octroi de droits individuels et de libertés publiques, y compris la libération de prisonniers politiques et le retour d'exilés.  

Le rôle important du roi Mohammed VI 

Le nouveau règne du roi Mohammed VI a voulu mettre fin aux pages sales de son passé récent. La proposition faite à l'ONU au nom du souverain alaouite allait dans ce sens. 

Le plan d'autonomie est audacieux et très détaillé. Il comportait 35 points, dont la négociation d'un nouveau statut d'autonomie dans le cadre de la souveraineté et de l'unité nationale marocaines. Il offre à la "population du territoire sahraoui" des pouvoirs administratifs, sociaux, culturels, financiers et fiscaux. L'Etat marocain se réserve les compétences relatives à la sécurité nationale, à la défense, aux relations extérieures et au système d'exploitation des ressources naturelles. Le roi, chef de l'État, conserverait son rôle d'émir des croyants et de garant de la coexistence entre les confessions religieuses. 

Les compétences de la future "Région autonome du Sahara" seraient largement comparables à celles des régions autonomes espagnoles : élection d'un parlement et d'un gouvernement local, police autonome, gestion des infrastructures, de l'eau, de l'électricité, des transports, de l'éducation, de la santé, de l'emploi, des sports, de l'environnement et de la défense de la culture "Hassania". Et comme en Espagne, le statut d'autonomie devait être soumis aux populations concernées et approuvé par référendum "conformément au principe d'autodétermination", comme le prévoyait le projet.  

La proposition faite au nom du roi Mohammed VI est bien formulée, et au fil des années, la diplomatie marocaine s'est efforcée de la transmettre de manière bilatérale et multilatérale aux gouvernements et aux groupes régionaux pour qu'ils l'adoptent. Le gouvernement espagnol de Pedro Sánchez a donné son approbation l'année dernière, considérant qu'il s'agissait de la manière "la plus sérieuse, crédible et réaliste" de résoudre définitivement le conflit du Sahara occidental. 

Cependant, comme aucun accord n'a été conclu entre les parties au conflit - deux pour les indépendantistes sahraouis et l'Algérie, qui sont le gouvernement marocain et le Front Polisario ; et quatre pour le Maroc et le représentant spécial du secrétaire général des Nations unies, qui sont les gouvernements du Maroc, de l'Algérie et de la Mauritanie, et le mouvement du Front Polisario - la mise en œuvre du plan est dans l'impasse. 

Plan d'autonomie pour le Sahara occidental 

L'administration marocaine, théoriquement chargée de développer le plan dans ses différentes facettes, ne l'a pas fait, et le plan reste tel qu'il a été formulé en 2007. Et c'est justement dans son élaboration qu'il y a des points de friction, des formules ambiguës et controversées, qui suscitent la méfiance et ne contribuent pas à apporter des garanties et de la sécurité à la population concernée. 

Rabat n'a pas encore expliqué ce qu'il fera de la population réfugiée en Algérie, dans la ville de Tindouf et ses environs. Il n'a pas non plus explicité la situation de l'exode sahraoui, dont la grande majorité vit en Espagne, mais aussi dans d'autres pays d'Europe et d'Amérique. Les réfugiés et les exilés seront-ils considérés comme des citoyens marocains ? Auront-ils des passeports ? Pourront-ils voyager librement ? 

Un point qui reste flou est l'avenir du mouvement du Front Polisario : devra-t-il se dissoudre ou pourra-t-il participer à la vie politique au Sahara en tant que "parti autonomiste sahraoui" ou formulation similaire, sa représentativité sera-t-elle reconnue, et sous quelle forme le Maroc envisage-t-il la participation politique des Sahraouis "organisés" ? 

La question se pose également à nouveau, comme en 1991, de savoir qui sera autorisé à voter lors de l'exercice référendaire pour l'adoption du statut d'autonomie et à participer aux élections législatives locales qui doivent produire le parlement, le gouvernement autonome et le président de la région autonome que le Roi entérinera.  

Quant au point peut-être le plus litigieux, et qui nécessite une visibilité, celui de l'"Armée populaire sahraouie", mouvement armé de plusieurs milliers de combattants, qui a "repris" les hostilités contre le Maroc en novembre 2020, quel sera son avenir ? Le Maroc exigera-t-il sa dissolution et la remise des armes ? Ou envisage-t-il d'intégrer, partiellement ou par étapes, les combattants armés dans les forces de sécurité locales, police, gendarmerie, forces auxiliaires ?  

Est-il envisageable d'intégrer "l'armée sahraouie" dans les Forces Armées Royales (FAR) du Royaume ? Ce n'est pas impensable. Le Maroc a une histoire et une expérience que peu d'autres pays ont eues avec ce problème. Lors de l'indépendance du Royaume vis-à-vis de la France, le 14 mai 1956, ont été créées les FAR, dont l'essentiel était constitué des 5 000 membres de l'Armée de libération nationale qui avaient lutté contre le colonialisme franco-espagnol. Mais à cette colonne vertébrale du mouvement de résistance (ELN), ainsi qu'à l'Armée de libération du Sud, s'ajoutent 14 000 soldats marocains de l'armée française et 10 000 soldats marocains de l'armée espagnole. Le commandement militaire marocain, dirigé par le commandant en chef, le sultan Mohammed V, a réussi à les unifier, non sans problèmes et crises. Serait-il possible de répéter cette expérience historique aujourd'hui ? En 1956, les 5 000 soldats de la Résistance ont dû intégrer 24 000 autres soldats des armées coloniales qu'ils avaient combattues. Aujourd'hui, les 300 000 ou 400 000 hommes, selon les sources, qui composent les Forces Armées Royales pourront-ils intégrer les 5 000 hommes de l'Armée Populaire Sahraouie ? 

Quant aux garanties nécessaires à l'enclenchement de ce processus, le Maroc acceptera-t-il la participation de tiers à la supervision du processus d'autonomie ? Quel rôle peut jouer l'Espagne, ancien colonisateur des "provinces" sahraouies ? Et qu'en est-il de l'Algérie ? Si, comme le prétend Rabat, Alger est "partie intégrante du conflit", quelle sera son implication dans les différentes étapes du projet ? 

En plus de nécessiter l'acceptation des deux ou quatre parties au conflit, le processus d'élaboration du futur statut d'autonomie du Sahara apparaît d'une grande complexité économique, sociale, culturelle, politique et juridique.