La France interdit la venue de nouveaux imams islamiques

PHOTO/JITEN DADLANI

Ce que le président français Emmanuel Macron a appelé le "séparatisme islamique" était l'une de ses principales obsessions, surtout après la vague d'attentats qui a secoué la France, du massacre de la salle de rédaction de Charlie Hebdo à celui de la salle du Bataclan, en plus bien sûr de la formation croissante de ghettos urbains dont les habitants vivent pratiquement en dehors des lois et des coutumes de la République française, ou bien terrifiés par l'imposition d'un pouvoir islamiste radical auquel ils sont incapables d'échapper.  

Depuis 2020, Macron s'est attaqué à un problème qui déchirait les fondements mêmes de l'Etat en remettant en cause les valeurs de la République. Le président et son ministre de l'Intérieur de l'époque, Christophe Castaner, ont vu la source de l'infection dans les imams importés, actuellement environ 300, principalement d'Algérie, du Maroc, de Turquie et d'Égypte. Ces prédicateurs itinérants, financés pour la plupart par les gouvernements de leurs pays d'origine ou par des organisations qui en dépendent, passent entre un et trois ans dans les mosquées qui leur sont attribuées, période pendant laquelle, outre la prise en charge spirituelle des fidèles, ils effectuent souvent un travail de prosélytisme au cours duquel ils transmettent leur propre radicalité à des jeunes désenchantés. La France est précisément l'un des pays européens qui a fourni le plus de "combattants" à Daesh à l'époque où ce dernier tentait d'établir son califat universel en profitant de la guerre en Syrie.  

Depuis le 1er janvier, la France interdit l'arrivée et l'installation sur son territoire de nouveaux imams sur lesquels elle n'a aucun contrôle ni surveillance de leurs revenus et surtout de leurs activités d'enseignement et d'endoctrinement. Le ministre de l'Intérieur, Gérald Darmanin, l'a fait savoir dans une lettre adressée aux gouvernements des pays qui envoient ces missionnaires islamiques.  

Parallèlement, Paris souhaite que les religieux en charge des mosquées françaises soient formés, au moins partiellement, en France, non seulement sur le plan culturel mais aussi dans une spécialité universitaire, afin qu'ils soient imprégnés des valeurs républicaines de la société française, et donc aussi européenne. Souvent considérées comme des îlots séparés dans cette société, les mosquées devront s'intégrer dans le tissu social français, et donc répondre de leurs activités si celles-ci peuvent avoir des caractéristiques ou des aspects criminels.  

Le gouvernement français accorde une courte période de transition, jusqu'au 1er avril prochain, aux imams expatriés en France pour qu'ils changent leur statut en celui d'imams résidents, en acceptant toutes les obligations inhérentes à la citoyenneté. Cela signifie que les associations qui gèrent les mosquées seront elles-mêmes responsables du recrutement de leurs prédicateurs, et surtout du paiement de leurs salaires sur leurs fonds propres, ce qui est évidemment facilement traçable par les autorités fiscales.  Il est donc strictement interdit à ces religieux d'être rémunérés par un gouvernement ou une organisation étrangère, ce qui a conduit les agences de sécurité à les assimiler à une sorte d'agent infiltré pour le compte de leurs bailleurs de fonds. 

Sont exclus de la mesure pour l'instant les "imams du Ramadan", ces chanteurs et récitants qui viennent en France pendant le mois sacré musulman, au cours duquel ils contribuent et enrichissent les rites et cérémonies de cette période.  Ce sont généralement entre 300 et 400 religieux qui viennent en France chaque année à cette occasion, avec une autorisation de séjour temporaire.  

Le gouvernement français entend également promouvoir un Forum de l'islam de France (Forif), dans le but à la fois d'impliquer le plus grand nombre possible d'acteurs dans ce qui est déjà la deuxième religion du pays, et d'unifier un islam qui, en France, souffre d'une fragmentation forte et clivante. Surmonter cette fragmentation est considéré comme une étape fondamentale vers l'acceptation générale souhaitée des valeurs républicaines par les 6,77 millions de musulmans de France, qui représentent 10 % de la population.