Israël met fin à son châtiment de Jénine, mais poursuit sans relâche l'annexion de la Cisjordanie

REUTERS/NIR ELIAS - Vue générale de maisons palestiniennes dans le village de Wadi Fukin, avec en arrière-plan la colonie israélienne de Beitar Illit, en Cisjordanie occupée

L'opération punitive des forces israéliennes contre Jénine a pris fin mercredi, après avoir "détruit les centres de commandement des terroristes [du Jihad islamique] et saisi une énorme quantité d'armes", selon les mots du Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu. Il s'agit du plus important bombardement jamais effectué contre ce camp de réfugiés palestiniens, créé en 1950, d'une superficie d'à peine un demi-kilomètre carré et abritant quelque 20 000 personnes, dont au moins 20 % ont fui, y compris un nombre indéterminé de combattants palestiniens, qu'Israël qualifie systématiquement de terroristes et accuse d'utiliser des civils comme boucliers humains pour éviter des représailles en cas d'attaques contre le territoire et les citoyens israéliens. La dernière en date a été perpétrée par un kamikaze qui a foncé avec sa voiture sur un groupe de passants dans l'une des rues les plus commerçantes de Tel-Aviv.  

Le camp de réfugiés et la ville de Jénine elle-même sont juxtaposés à Israël et, depuis 2021, ont été la cible d'attaques intermittentes, à la suite de rapports successifs des services de renseignement israéliens indiquant qu'ils constituaient un important bastion d'organisations armées palestiniennes opposées à l'occupation israélienne de la Cisjordanie à la suite de la guerre dite des Six Jours de 1967. Outre la douzaine de Palestiniens tués, l'armée israélienne a arrêté quelque 120 suspects, mais affirme toujours poursuivre "plus de 300 terroristes armés qui se cacheraient à Jénine". 

Lors d'une téléconférence avec Ron Ben-Yishai et Ruth Wassermn-Lande, tous deux experts israéliens renommés du Moyen-Orient, ils désignent à nouveau l'Iran comme inspirateur de la multiplication des actions terroristes menées par le Hezbollah, le Hamas et le Djihad islamique, avec pour dénominateur commun de provoquer de nombreux fronts simultanés qui obligent les Forces de défense israéliennes (FDI) à se démultiplier.    

Cette opération, la plus importante contre ce camp depuis 2002, a été précédée d'attaques presque chaque semaine depuis deux ans. Wasserman-Lande affirme que "Jénine était devenu un nid de terroristes depuis plusieurs décennies", étroitement surveillé par l'espionnage israélien.  

Quoi qu'il en soit, le conflit israélo-palestinien s'est nettement intensifié au cours des douze derniers mois. Un décompte de l'Agence France Presse et de Wasserman-Lande, basé sur des sources officielles, indique que 187 Palestiniens et 28 Israéliens ont été tués dans cette nouvelle guerre non déclarée, tandis que le nombre de détenus, tous Palestiniens, dépasse largement le millier.  

Les tensions entre Israéliens et Palestiniens ont été exacerbées par d'autres opérations menées depuis plusieurs mois par des colons israéliens contre des maisons et des entreprises palestiniennes en Cisjordanie, des actions destructrices qui, selon l'Autorité palestinienne de plus en plus démunie, "ont été menées avec la passivité, voire la complicité, de la police israélienne". Particulièrement meurtrière a été celle menée par un commando de colons le 21 juin contre Turmusaya, située au centre de la région, à côté de la colonie juive de Shilo, dont les membres auraient réduit en cendres des dizaines de maisons habitées par des familles palestiniennes.

Tant les dirigeants palestiniens modérés que les extrémistes du Hamas et du Djihad islamique semblent s'accorder sur le fait qu'Israël appuie sur l'accélérateur dans son prétendu plan d'annexion de facto de la Cisjordanie. Ils arrivent à cette conclusion à la suite des accords du Conseil des ministres israélien du 18 juin. Il a été décidé que l'actuel ministre des finances, Bezalel Smotrich, dirigerait le Bureau de planification des colonies. Jusqu'à présent, ce bureau dépendait du ministère de la Défense, qui supervise chacune des six étapes nécessaires à l'établissement d'une colonie en Judée-Samarie (Cisjordanie). Smotrich, qui a toujours été un fervent partisan du Grand Israël, a supprimé quatre de ces procédures. Désormais, il lui suffira d'autoriser la construction d'une nouvelle colonie de logements juifs et qu'un Comité de planification donne son accord, sans qu'aucune autre autorité politique, civile ou militaire n'intervienne dans ce processus abrégé et rapide. 

Il y a déjà 700 000 colons juifs dans les territoires occupés en 1967, y compris à Jérusalem-Est, que Benjamin Netanyahu a déclaré, lors de son précédent mandat, être la "capitale unique et indivisible de l'État d'Israël".   

Interrogé par Atalayar, le vétéran Ron Ben Yishai estime que l'opération de Jénine ne déclenchera pas une nouvelle intifada, que les Palestiniens de Cisjordanie continueront à vaquer à leurs occupations habituelles, mais que "les terroristes extrémistes continueront à faire la même chose, à savoir servir d'instrument aux tentatives de déstabilisation de la région par l'Iran". Une libanisation dont le maillon le plus faible serait la Jordanie, selon les termes de Ruth Wasserman-Lande.