Doha apparaît comme le principal allié de l'Occident dans le Golfe après que les États-Unis ont pris leurs distances avec Riyad et Abu Dhabi

Le Qatar se positionne comme une alternative au gaz russe pour l'Allemagne

PHOTO/AMIRI DIWAN via REUTERS - L'émir du Qatar, Sheikh Tamim bin Hamad al-Thani, serre la main du ministre allemand de l'économie, Robert Habeck, à Doha, au Qatar, le 20 mars 2022.

L'Allemagne est à la recherche de nouveaux marchés énergétiques qui lui permettront de se sevrer de sa forte dépendance au gaz russe. Pour atteindre cet objectif, le ministre allemand des Finances, Robert Habeck, a entamé une tournée dans certains États du Golfe. Le premier arrêt a été le Qatar, un important fournisseur de gaz.

En effet, le pays possède la plus grande entreprise de gaz naturel liquéfié (GNL) au monde, Qatargas. Par la suite, Habeck se rendra également à Abu Dhabi pour rechercher de nouveaux partenaires énergétiques. Le rôle des Émirats à cet égard est essentiel, notamment dans le domaine des énergies propres, puisque le pays du Golfe développe l'hydrogène vert. 

Pendant son séjour à Doha, Habeck a conclu un partenariat énergétique à long terme avec l'émir du Qatar, Tamim bin Hamad al-Thani. "Si nous pouvons encore avoir besoin du gaz russe cette année, nous n'en aurons plus besoin à l'avenir. Et cela ne fait que commencer. Alors que celui qui a des oreilles, qu'il entende", a déclaré le ministre allemand, selon la Deutsche Welle.

Avant le voyage, Habeck a prévenu sur la station de radio Deutschlandfunk que si le gaz n'arrive plus l'hiver prochain et que la Russie coupe les approvisionnements, "l'Allemagne n'aura pas assez de gaz pour chauffer toutes les maisons et faire tourner toute l'industrie". Le géant gazier russe Gazprom fournit 55 % du gaz de Berlin.

Habeck a également rencontré son homologue qatari, Saad Sherida Al-Kaabi, avec qui il a discuté des relations énergétiques et de la coopération entre Doha et Berlin, selon un communiqué qatari. La déclaration indiquait également que le Qatar avait convenu avec l'Allemagne que "leurs entités commerciales respectives feraient avancer les discussions sur l'approvisionnement à long terme en GNL", comme le rapporte Al-Jazeera. Doha a également affirmé qu'elle cherchait énergiquement à approvisionner Berlin depuis des années, mais que les négociations n'avaient jamais abouti à des accords concrets.

Cependant, la guerre en Ukraine a radicalement changé la position de l'Allemagne. Le gouvernement d'Olaf Scholz a récemment annoncé qu'il prévoyait de construire deux terminaux GNL à Brunsbuttel et Wilhelmeshaven afin de réduire la dépendance à l'égard de ses gazoducs, bien qu'il soit peu probable qu'ils soient prêts avant 2026, explique DW. De même, à la suite de l'invasion russe, Berlin a suspendu le processus de certification du gazoduc controversé Nord Stream 2, qui devait approvisionner l'Allemagne en gaz russe via la mer Baltique.

 Le Qatar apparaît comme le principal allié de l'Occident dans la région après des désaccords avec Riyad et Abu Dhabi  

Le gaz liquéfié qatari est devenu l'une des principales alternatives au gaz russe depuis le début de la crise avec Moscou et l'invasion de l'Ukraine qui a suivi. Les États-Unis sont également en pourparlers avec Doha pour aborder la question de l'approvisionnement énergétique de l'Europe. Même le président Joe Biden a décidé de faire du Qatar un "allié majeur" en dehors de l'OTAN.

Toutefois, les analystes ont fait remarquer que le gaz qatari ne suffit pas à remplacer le gaz russe, qui représente plus de 40 % en Europe. Al-Kaabi lui-même a admis, lors de la conférence sur le gaz de février, qu'"aucun pays ne peut compenser ce montant". Concernant le GNL, Al-Kaabi a révélé que ce type de gaz "est lié à des contrats à long terme, avec des destinations très claires." "Par conséquent, compenser ce montant à court terme est presque impossible", a-t-il ajouté.

Malgré cela, le Qatar semble s'être rétracté, cherchant des occasions de se développer sur le plan commercial. Comme l'a déclaré à Al-Arab Andreas Craig, professeur au King's College de Londres, "désormais, dès que l'occasion se présente, le Qatar cherche à en profiter. Ils se présentent comme une extension de la politique étrangère et de sécurité des États-Unis d'une manière qu'aucun autre État du Golfe ne fait".

Récemment, plusieurs médias ont fait état du remarquable désaccord de Washington avec l'Arabie saoudite et les Émirats arabes unis. Ce désaccord est dû, entre autres, au refus de Riyad et d'Abu Dhabi d'augmenter la production de pétrole, ce que les États-Unis et l'Europe ont demandé. Les deux pays réaffirment, au contraire, qu'ils maintiendront les accords conclus par l'OPEP+, organisation dont la Russie est membre.

L'administration Biden essaie donc "de présenter la guerre en Ukraine comme une opportunité pour Doha d'étendre ses ventes d'énergie à l'Occident et de renforcer son alliance avec Washington", note Al-Arab.