Le royaume du Maroc prend des mesures fermes pour rejoindre la liste des puissances nucléaires pacifiques ; il vise à produire de l'électricité en s'appuyant sur l'énergie nucléaire en tant que source d'énergie efficace

Le Maroc s'engage sur la voie de l'énergie nucléaire pacifique

Rafael Grossi, director general de la Organismo Internacional de Energía Atómica (OIEA) - PHOTO/FILE
PHOTO/FILE - Rafael Grossi, directeur général de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA)

Le directeur général de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA), Rafael Mariano Grossi, a annoncé que "le Maroc est l'un des 13 prochains futurs pays à produire de l'énergie nucléaire comme source de production d'électricité". 

Dans ses propos en marge du Salon mondial du nucléaire à Paris, Grossi a souligné qu'il est nécessaire de doubler le nombre de réacteurs nucléaires, actuellement environ 400 dans le monde, afin de faciliter la mise en œuvre des recommandations de l'accord de Paris sur le climat. "Actuellement, 10 pays sont en phase de décision pour la construction de centrales nucléaires et 17 autres sont en phase d'évaluation, mais 12 à 13 nouvelles puissances nucléaires émergeront dans quelques années", a-t-il ajouté.

Avec une ambition économique assortie d'une volonté politique, le Maroc progresse régulièrement vers l'adhésion au groupe des puissances nucléaires pacifiques. Ayant lancé d'importants investissements dans les énergies solaire et éolienne, ainsi que dans la production d'hydrogène vert, le pays d'Afrique du nord vise à répondre aux besoins en énergie propre en s'éloignant des sources fossiles polluantes, dans le cadre de son engagement à réduire la pollution de l'environnement. 

PHOTO/FILE - Imagen de central nuclear
PHOTO/FILE - Image d'une centrale nucléaire

À cet égard, les rapports internationaux confirment l'intention sérieuse et responsable du Maroc de s'engager dans une coopération intensive en vue de renforcer son potentiel nucléaire, tant en termes de sécurité que de technologie. En effet, le Royaume du Maroc devrait faire des progrès concrets vers la construction d'un éventuel réacteur nucléaire marocain après 2030. 

En effet, le Maroc dispose de ressources considérables en phosphate (70 % du phosphate mondial) à partir desquelles l'uranium est extrait, et se situe au premier rang en termes de réserves mondiales de ressources naturelles. Il s'agit là d'un atout majeur pour le Maroc dans son évolution vers l'énergie nucléaire. 

Le choix du Maroc pour l'énergie nucléaire n'est pas une décision récente, mais depuis 2014, Rabat a commencé à préparer la base juridique pour l'utilisation de l'énergie nucléaire, à rassembler l'expertise et à évaluer sa capacité à réaliser cette ambition.  

Le Maroc a annoncé la création de la première Agence nationale de "sûreté nucléaire et radiologique", qui sera chargée d'établir un réseau de surveillance des risques radiologiques sur l'ensemble du territoire du pays et de faire respecter les exigences de la loi 142-12, relative à la sûreté nucléaire et radiologique dans le pays d'Afrique du nord.  

En 2016, l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) a donné le feu vert au Maroc pour lancer son programme nucléaire pacifique, déclarant que "le Royaume répond aux exigences techniques, administratives, juridiques, de sûreté, de sécurité et de mesure et possède les qualifications humaines, l'expérience et les compétences scientifiques pour lancer des programmes d'énergie nucléaire pacifique, en particulier dans le domaine de la production d'électricité et du dessalement de l'eau de mer

PHOTO/FILE - Fábrica de fertilizantes fosfatados en Marruecos
PHOTO/FILE - Usine d'engrais phosphatés au Maroc

En septembre 2021, le gouvernement marocain et son homologue hongrois ont signé un mémorandum d'entente pour "la coopération dans le domaine de la formation et de l'éducation dans l'industrie nucléaire, sur les utilisations pacifiques de l'énergie nucléaire", dans le but de développer "des programmes de coopération en matière de formation et de pratiques, notamment pour le développement de la recherche fondamentale et appliquée, de la science et de la technologie nucléaires et du cadre juridique régissant les utilisations pacifiques de l'énergie nucléaire". 

Il convient de noter que le Centre national marocain pour l'énergie, la science et la technologie nucléaires est devenu la première institution nucléaire en Afrique à coopérer avec l'AIEA. 

S'adressant à la Chambre des représentants en juin dernier, la ministre marocaine de la Transition énergétique et du Développement durable, Leila Benali, a indiqué que "le ministère avait procédé à une évaluation de l'utilisation de l'énergie nucléaire dans la production d'électricité, qui avait débuté en 2015", préparant un rapport cette année sur le sujet afin de mettre en œuvre les recommandations de l'évaluation. 

Benali en déduit que "suite aux investissements importants du Maroc dans les énergies renouvelables, il est temps de s'orienter vers l'énergie nucléaire, dans laquelle il a accumulé une base de connaissances et d'expériences considérables, dans le cadre de la préparation d'une décision nationale sur la production d'électricité à partir de l'énergie nucléaire

AFP/DANIEL LEAL OLIVAS - La ministra marroquí de Transición Energética y Desarrollo Sostenible, Leila Benali
AFP/DANIEL LEAL OLIVAS - La ministre marocaine de la Transition énergétique et du Développement durable, Leila Benali

En octobre 2022, le Maroc a conclu avec la Russie un accord de coopération dans l'utilisation de l'énergie nucléaire signé par l'entreprise publique russe d'énergie nucléaire Rosatom. En vertu de cet accord, la Russie aide le Maroc à mettre en place et à améliorer l'infrastructure de l'énergie nucléaire, ainsi qu'à concevoir et à construire des réacteurs nucléaires. La société russe accompagne le Maroc dans l'exploration et le développement de gisements d'uranium, l'étude des ressources minérales du pays et la formation du personnel travaillant dans les centrales nucléaires. 

L'accord avec Rosatom ne vise pas la construction d'une centrale nucléaire, mais plutôt d'un réacteur nucléaire expérimental similaire à celui qui existe déjà sur le territoire marocain dans la forêt de la Maamora. Selon des experts marocains, le Maroc "ne renoncera jamais à l'option du passage à l'énergie nucléaire".

L'intérêt du Maroc pour l'option nucléaire ne se limite pas aux énergies renouvelables, mais touche également au dessalement de l'eau de mer. En effet, après avoir signé un accord en juillet dernier avec une entreprise marocaine, Rosatom contribue à la mise en œuvre de projets de dessalement d'eau de mer, en adoptant l'énergie nucléaire à des fins pacifiques, afin de contribuer à la réalisation du projet marocain de fournir 1,3 milliard de mètres cubes d'eau par an. 

Le Maroc s'est engagé à utiliser l'énergie nucléaire à des fins pacifiques. À cet égard, l'ambassadeur permanent du Maroc auprès des Nations unies, Omar Hilale, a mis en garde contre les dangers que représentent les lacunes dans la codification du droit nucléaire, compte tenu des défis complexes qui prévalent dans un monde caractérisé par les guerres, les crises régionales, le changement climatique et les retards dans la mise en œuvre de l'agenda de développement 2030.

PHOTO/TWITTER/X/MAROC DIPLOMATIE/@MarocDiplomatie – Aziz Akhannouch y Vladimir Putin
PHOTO/TWITTER/X/MAROC DIPLOMATIE/@MarocDiplomatie – Aziz Akhannouch et Vladimir Putin

Pour sa part, Khammar Murabet, ancien directeur général de l'Agence marocaine de sûreté nucléaire et radiologique, a expliqué que "le Maroc peut diversifier les sources d'énergie en adoptant un mix énergétique qui intègre l'énergie nucléaire, étant une source d'énergie incontournable" ; soulignant que "l'enjeu sera de taille dans les 30 à 40 prochaines années, puisque 80% de l'électricité mondiale doit avoir une empreinte carbone réduite, contre 32% marquée actuellement, pour assurer une plus grande efficacité dans la lutte contre le changement climatique". 

Répondant à l'invitation de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA), en sa qualité de président de la Commission du désarmement et de la sécurité internationale (Première Commission) de l'actuelle 76e session de l'Assemblée générale des Nations unies, Hilale a participé à la table ronde sur "La non-prolifération et les utilisations pacifiques de l'énergie nucléaire".

Le diplomate marocain a souligné que "le non-respect des décisions du droit nucléaire existant conduirait à l'échec de l'arsenal juridique actuel et alimenterait probablement les aspirations illicites à travers un risque accru d'utilisation illicite de l'énergie nucléaire, la création de nouvelles sources d'armes nucléaires et la prolifération d'éventuelles crises régionales, voire internationales". 

Dans le même ordre d'idées, Hilale a souligné la mise en œuvre de plusieurs initiatives internationales en matière de sécurité nucléaire, telles que l'initiative de sécurité contre la prolifération, les sommets sur la sécurité nucléaire ou l'initiative mondiale de lutte contre le terrorisme nucléaire, lancée au Maroc en 2006. 

Le Maroc, en tant que partenaire fondateur de l'Initiative mondiale de lutte contre le terrorisme nucléaire, a activement contribué à cette initiative, y compris l'adoption de la Déclaration de principes et son travail en tant que coordinateur du Groupe de mise en œuvre et d'évaluation du Groupe d'action sur la riposte et l'atténuation, 2019-2021.