La technologie GMV pour attraper les satellites avant qu'ils ne deviennent des déchets spatiaux

Mariella Graziano, responsable du segment de vol de GMV, souligne la simplicité du petit MICE sous la structure d'un satellite. Andrés R. Reina montre les trois doigts du CAT et les six bras qui le soutiennent - PHOTO/JPons
L'Agence spatiale européenne lance le défi du « zéro débris spatial » et l'entreprise espagnole répond à ce défi avec MICE et CAT 
  1. Attraper, traîner, propulser, désorbiter et brûler 
  2. Empêcher des satellites entiers de devenir de gros débris spatiaux  

GMV a su répondre à la confiance que lui a accordée l'Agence spatiale européenne (ESA) et a concrétisé une technologie capable de retirer de l'espace les satellites cassés ou hors service et d'empêcher ainsi la multiplication des débris spatiaux. 

C'est le travail d'une équipe d'ingénieurs de GMV, en collaboration avec des techniciens de l'entreprise espagnole AVS, sous les ordres de Fernando Gandía, chef du département Robotique et Autonomie embarquée. 

Le système MICE/CAT a pour but d'attraper un satellite désaffecté, de le traîner, de le propulser vers la Terre et de le faire brûler complètement en entrant dans les hautes couches de l'atmosphère - PHOTO/ESA-David Ducros 

Sous la direction de Mariella Graziano, directrice du segment de vol Science et Exploration de GMV, l'entreprise technologique espagnole a conçu et fabriqué un système simple et ingénieux pour piéger les satellites de l'Agence spatiale européenne (ESA) et éviter qu'ils ne deviennent des débris voyageant de manière incontrôlée autour de la Terre.   

Le système conçu et fabriqué par l'entreprise se compose de deux dispositifs appelés CAT et MICE, qui font référence à la mission pour laquelle ils ont été créés, à l'instar du chat qui attrape les souris. C'est pourquoi le système intègre également de minuscules caméras et de minuscules capteurs de proximité, semblables à la sensibilité des moustaches et à l'acuité visuelle des yeux des rongeurs et des chats.   

Pour mener à bien cette tâche, l'ESA a décidé d'installer MICE sur la face inférieure des satellites Sentinel de deuxième génération de la constellation européenne Copernicus. Ils seront mis en orbite à partir de la fin de l'année 2028 et auront pour mission de diagnostiquer l'état de l'atmosphère, de la surface et des mers, ainsi que de fournir des données et des images pour faire face aux risques de sécurité et aux situations d'urgence.

Attraper, traîner, propulser, désorbiter et brûler 

Mais une fois la mission qui les a conduits dans l'espace accomplie, ou en cas d'anomalie les mettant prématurément hors service, l'Agence européenne souhaite qu'ils soient désorbités et détruits avec toutes les garanties de sécurité avant qu'ils n'aient été inopérants pendant cinq ans. 

C'est là qu'intervient le CAT device, celui qui fait le travail du chasseur. Il est soutenu par six bras qui déplacent et positionnent une sorte de griffe à trois doigts. Sa fonction est de « saisir fermement le satellite désaffecté à éliminer, de le traîner et de le propulser vers la Terre, afin qu'il se consume complètement en pénétrant dans les couches supérieures de l'atmosphère », explique Andrés Rodríguez Reina, responsable du département d'ingénierie robotique spatiale de GMV. 

La démonstration de CAT dans l'espace permettra de vérifier que les trois doigts de sa griffe et les six bras qui les déplacent et les positionnent sont capables de capturer un satellite et de le propulser vers son élimination complète - PHOTO/JPons 

L'Italienne Mariella Graziano, ingénieure aérospatiale de la prestigieuse université La Sapienza de Rome, qui a 25 ans d'expérience chez GMV, a révélé que le CAT « a déjà passé tous les tests sur Terre et n'a plus qu'à être testé à bord d'un satellite ». Il souligne que le système de GMV « est plus flexible, plus simple, plus sûr et moins cher qu'un bras robotique ». 

Graziano souligne que CAT devrait être mis en orbite « à la fin de 2027 ou au début de 2028, afin de remplir une mission de démonstration en vol pour un coût approximatif de 50 millions d'euros ». Le satellite avec CAT à bord est conçu pour accomplir sa tâche un minimum de trois fois avant de se désintégrer dans l'atmosphère. Mais Graziano est convaincu qu'il peut désorbiter « entre cinq et dix satellites ». 

L'initiative « Zéro débris spatial » a été présentée en juin 2023 par le directeur général de l'ESA, Josef Aschbacher (au centre), et annoncée lors du sommet ministériel de novembre 2023 à Séville - PHOTO/ESA-P. Sebirot 

Ce que l'ESA tente de réaliser avec MICE et CAT, c'est de préserver la durabilité de l'écosystème autour de la Terre et de rendre possible le déploiement de constellations de centaines, voire de milliers de nouveaux satellites avec un risque de collision aussi faible que possible. Les données de GMV montrent qu'environ 11 500 satellites sont encore en orbite et plus de 9 000 en service.  

Empêcher des satellites entiers de devenir de gros débris spatiaux  

Le système mis en place par GMV pour éviter que des satellites entiers hors service ne deviennent des débris essaimant de manière incontrôlée autour de la Terre fonctionne parallèlement à la charte « zéro débris », parrainée par l'ESA en collaboration avec des agences, des industries, des opérateurs et même des compagnies d'assurance. 

Les chiffres du GMV montrent que plus de 17 000 satellites ont été lancés dans l'espace, dont quelque 11 500 sont encore en orbite et plus de 9 000 en service - PHOTO/ESA 

Il s'agit d'un accord non contraignant qui vise à mettre fin à la production de nouveaux débris de fusées et de satellites d'ici à 2030. Il invite les entreprises et les agences qui possèdent des satellites à s'en débarrasser à la fin de leur vie sans laisser de débris, qu'il s'agisse des satellites en orbite terrestre basse et moyenne ou de ceux en orbite géostationnaire à 36 000 kilomètres.  

Le projet « Zéro débris » a été publié lors du sommet ministériel de l'ESA qui s'est tenu à Séville au début du mois de novembre 2023. Les agences spatiales ou leurs équivalents en Allemagne, en Autriche, en Belgique, à Chypre, en Estonie, en Lituanie, en Pologne, au Portugal, en Roumanie, en Slovaquie, en Suède et au Royaume-Uni ont récemment rejoint l'initiative. Une deuxième série de signatures est possible pendant l'ILA Berlin, qui se tiendra dans la capitale allemande du 5 au 9 juin. 

Sous les auspices de l'ESA et de l'Union européenne, la charte « Zéro débris spatial » a été adoptée par les fabricants et les opérateurs de satellites, les sociétés de services de lancement et même les compagnies d'assurance - PHOTO/ESA 

L'Agence spatiale espagnole et le ministère des Sciences s'engagent en faveur de la durabilité de l'espace et de la réduction des débris stationnés en orbite. Mais de source officielle, on estime qu'il est raisonnable « d'attendre que Bruxelles adopte la loi européenne sur l'espace et d'éviter ainsi d'éventuels dysfonctionnements entre les deux documents ». Le critère espagnol est partagé par d'autres agences, par exemple celles de France (CNES) et d'Italie (ASI). Avec les élections européennes prévues le 9 juin, la loi ne verra pas le jour avant le dernier trimestre de l'année.  

L'ESA et les différentes agences spatiales ont été sollicitées pour proposer de nombreuses solutions différentes et imaginatives pour piéger les satellites hors service, dont beaucoup ne sont pas pratiques - PHOTO/ESA-eDeorbit

Selon le coordinateur du programme de sécurité spatiale de l'ESA, le Français Quentin Verspieren, la Charte Zéro Débris est l'expression de « l'engagement inébranlable de l'Europe à devenir un leader mondial dans la réduction et l'élimination des débris spatiaux ». La charte, tout comme le système MICE/CAT de GMV et la future loi européenne sur l'espace, vise à encourager la communauté spatiale mondiale à prendre des mesures pour rendre les activités spatiales durables à tous égards.