Algérie, la fortune de Lotfi Nezzar en Espagne estimée à 300 millions d’Euros

Au mois d’août 2019, en fuite en Espagne, l’ancien ministre de la défense nationale, le général-major Khaled Nezzar était visé par un mandat d’arrêt international. Son fils aîné, Lotfi compromis dans de nombreux scandales l’était également.

Le père et le fils sont allés se réfugier à Barcelone où ils possèdent un appartement de 94,74 m2 au 6e étage d’une résidence de standing à Barcelone, située au numéro 307 de la rue Muntaner, un quartier chic de la capitale catalane. L’acte notarial a été réalisé par Miguel Angel Campo Güerri dont l’étude se trouve à Barcelone. 

Au mois de juillet 2020, Lotfi Nezzar est condamné par contumace, ainsi que son épouse Chahinez, à 6 ans de prison ferme, dans « une affaire de fuite de capitaux et blanchiment d’argent et falsification de documents ». Son chauffeur avait été arrêté au port d’Alger à bord d’une voiture luxueuse qu’il exfiltrait d’Alger vers l’Espagne, avec des documents falsifiés et une somme de 190.000 euros dissimulée dans le véhicule appartenant à Lotfi Nezzar.

Les biens des Nezzar sont placés, par la justice algérienne, sous séquestre et leur somptueuse résidence de deux hectares dans le chic val d’Hydra, situé sur les hauteurs d’Alger, a fait l’objet d’une pointilleuse perquisition de fond en comble par les agents de la Direction Générale de la Sécurité Intérieure. 

Dans la même période, le général Nezzar était sous le coup d’une enquête d’un tribunal suisse pour crimes contre l’humanité commis durant les années quatre-vingt-dix en Algérie. Le juge d’instruction du tribunal d’Alger ouvre une enquête sur la fuite des capitaux, fraude fiscale et blanchiment d’argent contre Lotfi Nezzar. C’était la descente aux enfers des Nezzar.

Le décès du général Ahmed Gaïd Salah, auquel succède le général Saïd Chengriha aux commandes de l’état-major de l’armée algérienne sonnera la délivrance du général et son fils. L’ancien homme fort d’Alger regagne l’Algérie à bord d’un avion de la présidence de la république, salué par son équipage militaire.

La justice algérienne, aux ordres, fait vite de classer les affaires des Nezzar et tout rentre dans l’ordre, jusqu’à cette date fatidique du 29 décembre 2023. Date du décès de l’ancien ministre de la défense, et ancien homme fort du régime algérien.

Lotfi Nezzar était loin de se douter qu’il finira par se faire rattraper par ses affaires judiciaires. Sans son père, il est nu. Il ne pèse plus rien. Le parquet d’Alger ouvre de nouveau son lourd dossier. Et il des raisons de le faire trembler. A l’approche de l’élection présidentielle de décembre 2024 et pour gagner quelque peu la sympathie du peuple, les décideurs n’hésiteront pas une seconde de sacrifier le rejeton du militaire le plus honni de l’armée algérienne.

Le dossier des biens mal acquis en Espagne refait surface

Jeudi 14 mars, dans un obscur bureau du service anti-subversion relevant de la Direction Générale de la Documentation et de la sécurité Extérieure (DGDSE) que dirige le général Djebbar Mehenna, Assia Melhani, la boîte noire de l’affaire des complotistes et de tant d’autres affaires, s’introduit discrètement pour sortir de vieux documents qu’elle se met à photographier à l’aide de son smartphone, rapporte une source de la DGDSE.

Assia Melhani est là pour accomplir, vraisemblablement, une mission très secrète. Sinon, pourquoi n’utiliserait-elle pas la photocopieuse dans un des bureaux mitoyens ? Et pourquoi c’est elle qu’on charge de cette mission alors qu’elle est en congé de convalescence ? D’autant plus, elle n’est pas habilitée à toucher aux documents secrets depuis sa mise à la retraite. Sa réintégration au service comme agent contractuel ne lui confère plus le statut qui était sien il y a de cela quelques mois.

Les documents pris en photos sont des rapports rédigés par le colonel Boualem Bennacer au temps où il était consul à Alicante en Espagne. Des rapports d’enquêtes menées sur les biens de Khaled Nezzar et son fils Lotfi en Espagne.  Précisément, les localisations et identifications que Bennacer Boualem avait réussi à faire pour localiser et identifier, preuves et documents à l’appui, les biens mal acquis de Nezzar et son fils Lotfi.

Parmi les biens recensés, on note un terrain nu d’une superficie de 6031m2 à l’Ametlla de Mar, une commune touristique de bord de mer, dans la province de Tarragone. En plus de l’appartement cité plus haut. Les enquêtes ont porté, également, sur les comptes bancaires de Lotfi Nezzar domiciliés à Santander, BBVA, UPS, International Bank et HSBC Espagne.

Total de la contenance près de 300 millions d’euros répartis en investissements divers. Pourtant, Lotfi Nezzar n’a jamais exercé une quelconque activité commerciale en Espagne. Il n’a pas de quoi justifier l’origine des fonds qui lui ont permis ces acquisitions devant la justice espagnole ou algérienne.

Il n’est qu’un simple résident titulaire du numéro d’identification pour étranger Y4345583T. Pour beaucoup moins que ça des anciens ministres et dignitaires du régime ont été condamnés à de lourdes peines de prison.

Pourquoi s’intéresse-t-on, aujourd’hui, à la DGDSE au dossier Nezzar ?

Pour répondre à cette question, il y a deux hypothèses. 
La première c’est faire chanter Lotfi Nezzar, et c’est la spécialité du colonel Souahi Zerguine, alias Mouad. Il est hors de question de laisser le rejeton d’un général au niveau scolaire primaire et qui n’a jamais travaillé pour disposer de pareille fortune. Une fortune à laquelle, il faudrait ajouter les biens en Algérie dont les plus importants un domaine agricole à Bouchaoui qui appartenait à l’ancien célèbre colon français Bourgeaud et une palmeraie à Biskra dans le sud-est algérien. Cette fortune, Lotfi Nezzar doit la partager avec les hommes de l’ombre du régime dont ceux qui l’ont utilisé du vivant de son père. Sinon, il finira par laisser des plumes.

La deuxième hypothèse est la réouverture du dossier judiciaire Lotfi Nezzar et l’envoyer rejoindre la longue liste des détenus pour corruption et malversations financières. Les décideurs auront à gagner la sympathie du peuple et cela ne les empêcherait pas de se servir de sa fortune en terre ibérique. 
Laquelle des deux hypothèses sera retenue ? L’avenir nous le dira.