La réunion se déroule dans un contexte marqué par la fragilité de la stabilité politique du gouvernement d'union et la menace du maréchal Haftar

Les discussions sur l'avenir démocratique de la Libye reprennent

ONU/VIOLAINE MARTIN - Vue générale de la première journée du Forum de dialogue politique sur la Libye dans un lieu non divulgué, en Suisse, le 1er février 2021

Le Forum de dialogue politique libyen reprend ses réunions sur la proposition constitutionnelle, formulée par l'ONU, pour l'organisation des prochaines élections en Libye. Dans le cadre d'une session virtuelle, il devrait discuter de la base constitutionnelle pour la tenue des prochaines élections prévues le 24 décembre.

En outre, un communiqué indique que l'objectif de la réunion est d'assister au vote sur l'une des quatre propositions du comité de consensus sur la future base constitutionnelle. D'autre part, l'envoyé spécial du Secrétaire général des Nations unies, Jan Kubis, a souligné qu'"aucune de ces propositions ne doit porter préjudice à la tenue d'élections dans les délais fixés par la feuille de route", dans une situation marquée par de fortes tensions politiques et l'instabilité. 

À cet égard, ces dernières heures, la mission de l'ONU déployée en Libye a exprimé sa "profonde préoccupation" concernant l'"enlèvement" et la "disparition" du chef de cabinet du vice-premier ministre du gouvernement d'unité en Libye, Rida Faraj Fraitis. Dans un communiqué, l'ONU a déclaré que "des hommes armés non identifiés ont enlevé Fraitis, suite à sa visite des installations du gouvernement d'union à Tripoli". Ils ont également souligné que "le sort et le lieu où se trouve" le haut fonctionnaire restent "inconnus". Selon l'ONU, "cela a de graves conséquences pour le processus de paix et de réconciliation et pour la pleine unification des institutions nationales".

Dans la dernière mission approuvée par l'ONU en septembre 2019, le Conseil de sécurité a en outre demandé au Secrétaire général d'évaluer les mesures nécessaires pour parvenir à un cessez-le-feu durable, d'évaluer le rôle possible de la Mission d'appui des Nations unies en Libye (UNSMIL) pour fournir un soutien au cessez-le-feu à grande échelle, ainsi que de mettre en œuvre les mesures nécessaires pour faire avancer le processus politique de sa trajectoire actuelle. Il a également été demandé qu'un rapport sur les progrès accomplis dans la réalisation de ces objectifs soit inclus dans les rapports réguliers de l'ONU.

De son côté, l'ONU maintient la mission de soutien depuis le 16 septembre 2011, dans le but de soutenir le processus politique en Libye par la médiation. En outre, l'UNSMIL veille au respect et à l'application des droits de l'homme, ainsi qu'à la coordination de l'aide internationale et à la fourniture d'une assistance humanitaire.

D'autre part, le gouvernement intérimaire mis en place en mars, dirigé par le Premier ministre Abdul Hamid Dbeiba, a eu un désaccord avec le général Jalifa Haftar ces dernières heures après que ce dernier ait déclaré que ses forces militaires "ne sont soumises à aucune autorité".

À l'occasion du huitième anniversaire de la création de l'armée nationale libyenne, Haftar a prononcé un discours dans lequel il a souligné que ses forces "ne tomberont pas dans la tromperie au nom de la vie civile", selon le quotidien libyen The Lybia Observer. Il a également souligné que l'armée avait réussi à combattre "des vagues de terroristes venus en Libye pour tuer et décapiter" et a ajouté qu'"ils sont un pilier des revendications du peuple". 

Il a ajouté que ses forces "resteront fermes, quel que soit le degré de sophistication des conspirateurs dans la tromperie au nom de la civilisation ou non", une déclaration qui a été perçue comme un coup d'État contre l'accord établi plus tôt cette année pour exécuter la formation d'un gouvernement d'unité nationale.

Haftar lui-même a initialement exprimé son soutien au gouvernement d'union en février dernier, qui avait pour mission d'approuver le budget, ainsi que d'organiser les prochaines élections présidentielles et parlementaires, dans le cadre d'un processus d'"alternance pacifique et démocratique du pouvoir". Il a également exprimé son soutien en offrant "le soutien des forces armées au processus de paix, pour défendre la démocratie et le transfert pacifique du pouvoir". Sa position en faveur de la voie politique s'éloigne ainsi de ses tentatives de prise de pouvoir par la force militaire. La signature d'un cessez-le-feu en octobre et la création d'un gouvernement unifié en mars ont exclu la possibilité d'un régime militaire dans le pays.

L'analyste libyen Mahmoud Jafallah a déclaré que son approche de la voie politique était le résultat de sa prise de conscience que "la seule issue possible était politique", sans quoi il pourrait "perdre ses intérêts en Libye". A cela s'ajoute la perte d'un soutien important dans l'est du pays, notamment de la part de tribus puissantes favorables au maréchal.

En Cyrénaïque, région située sur la côte nord-ouest, le système tribal reste important et ce sont désormais les tribus elles-mêmes qui rejettent les propositions de Haftar après lui avoir reproché "d'avoir impliqué leurs fils dans une guerre où beaucoup sont morts pour rien".

Désormais, le nouvel exécutif entreprend de faire en sorte que les prochaines élections se déroulent sous la supervision de l'ONU, grâce à laquelle il espère résoudre la crise institutionnelle qui dure depuis 2014, après que Haftar a ordonné la dissolution du Congrès général de Tripoli, dominé à l'époque par les Frères musulmans. Cette dissolution a conduit à une guerre civile qui a fini par se transformer en une bataille de mercenaires, au cours de laquelle environ 1 700 personnes sont mortes et 130 000 ont été déplacées