L'Algérie met en garde contre une « séparation irréparable » avec la France
Le président algérien, Abdelmadjid Tebboune, a dénoncé un « climat toxique » dans les relations avec Paris et posé les conditions d'une reprise du dialogue.
Dans une interview accordée au quotidien L'Opinion, dans laquelle il a abordé plusieurs questions, notamment la situation en Syrie, l'Ukraine et les conditions d'une normalisation avec Israël, le président Tebboune a déclaré que le climat avec Paris « est délétère ». « Nous perdons notre temps avec le président Macron », soulignant que son objectif est d'éviter « une séparation irrémédiable » avec la France.
« Il n'y a pas de progrès, sauf sur les relations commerciales. Le dialogue politique est pratiquement suspendu », a ajouté Tebboune, déplorant les « déclarations hostiles quotidiennes » des autorités françaises.
Depuis l'été dernier, les relations entre la France et l'Algérie se sont détériorées suite à l'annonce par Paris de son soutien au plan d'autonomie de Rabat pour le Sahara occidental. De plus, ces dernières semaines, les tensions entre Paris et l'Algérie se sont intensifiées suite à l'arrestation de l'écrivain Boualem Sansal en Algérie et de plusieurs personnalités algériennes influentes en France, accusées d'incitation à la violence.
Face à la détérioration des relations, Tebboune s'est dit « tout à fait d'accord » avec la reprise du dialogue, comme l'avait déjà indiqué le ministre français des Affaires étrangères, Jean-Noël Barrot. Cependant, il a souligné la nécessité de déclarations politiques fortes à cet égard, insistant sur l'importance que « le président français, les intellectuels et les défenseurs de la relation fassent entendre leur voix ».
« Ce n'est pas à moi de le faire. Pour moi, la République française, c'est d'abord son président », a ajouté le dirigeant algérien, sans donner plus de détails.
Interrogé sur l'écrivain Boualem Sansal, détenu en Algérie depuis la mi-novembre, Tebboune a estimé que « ce n'est pas un problème algérien, mais celui de ceux qui l'ont créé », indiquant que « d'autres cas de binationaux le sont », bien qu'il ait averti que ceux-ci ne suscitent pas autant de solidarité.
La semaine dernière, le ministre français des Affaires étrangères, Jean-Noël Barrot, a déclaré qu'il était « prêt à aller en Algérie pour discuter de tous les sujets, pas seulement de ceux qui ont fait la une des journaux ces dernières semaines », soulignant que « la France et l'Algérie n'ont aucun intérêt à ce que la tension persiste entre elles ».
Le ministre français de la Défense, Sébastien Lecornu, a également appelé à « reconstruire la relation aujourd'hui tendue » entre l'Algérie et la France, regrettant la politique du gouvernement algérien.
Lecornu a regretté que « la haine de la France soit devenue une question de politique intérieure » en Algérie et a déclaré qu'« il faut sortir de cette situation ». « Nous perdons du temps, y compris dans la lutte contre le terrorisme », a-t-il ajouté, notamment dans les pays du Sahel.
D'autre part, outre la situation avec la France, le président algérien a commenté les récents événements en Syrie, affirmant que son pays avait informé « en toute fermeté » l'ancien président syrien Bachar el-Assad de son rejet permanent des massacres perpétrés contre le peuple syrien.
Il a rappelé que l'Algérie « s'est opposée au retour de la Syrie au sein de la Ligue arabe en 2022 », car elle soutient « le dialogue politique comme solution à la crise » dans ce pays.
Concernant la guerre entre Israël et le Hamas, Tebboune a indiqué qu'il n'était pas opposé à la normalisation des relations avec Israël, précisant que cela pourrait se produire « le jour même de la création d'un État palestinien à part entière ».
L'interview a également abordé la crise en Ukraine, où il a été révélé que Kiev n'a pas répondu à l'offre de médiation de l'Algérie dans le conflit qui l'oppose à la Russie.