L'Algérie promeut un discours officiel sans contrôle indépendant

Le président algérien Abdelmadjid Tebboune lors de la cérémonie de prestation de serment à Alger, en Algérie, le 19 décembre 2019 - REUTERS/ RAMZI BOUDINA.
Le Service de presse algérien a présenté un bilan sur Tebboune alors qu'aucune élection n'est en vue et au milieu des critiques pour propagande d'État

La liberté de la presse et la critique des institutions étatiques en Algérie perdent du terrain. À la suite d'un rapport publié par l'Agence de presse algérienne (APS), fortement contrôlée par le gouvernement national, intitulé « L'ère Tebboune : le retour du leadership algérien », sans raison apparente, l'agence a loué le travail de l'actuel président, Abdelmadjid Tebboune, depuis son arrivée à la présidence en 2019. 

Cette publication, qui n'a pas surpris les autorités ni les médias, soulève de sérieuses questions pour les experts régionaux quant aux véritables motivations de la diffusion de ce rapport. Bien qu'il souligne les progrès réalisés, le rapport évite de mentionner les attentes non satisfaites et le manque de transparence, ce qui jette le doute sur sa véracité. 

Abdelmadjid Tebboune, président de l'Algérie, et Ahmed Fattah, ministre algérien des Affaires étrangères, lors du 38e sommet du Conseil africain de paix et de sécurité de la région MENA - PHOTO/ MINISTÈRE DE LA COMMUNICATION DE L'ALGÉRIE

Le rapport, qui qualifie l'arrivée au pouvoir de Tebboune de « fin du déclin du pays », ne mentionne pas les principales revendications des citoyens à l'égard de l'État : une meilleure protection en matière d'emploi, un accès plus facile à l'éducation à tous les niveaux, un meilleur système de santé et un meilleur système de services publics. 

Concrètement, le rapport a souligné l'absence d'autocritique, le manque de résultats concrets (par exemple, la promesse d'atteindre 30 000 millions de dollars d'exportations non pétrolières, mais seulement 7 000 millions ont été atteints ; l'absence de mécanismes de contrôle, puisqu'il n'existe pas d'institutions indépendantes pour évaluer ces résultats ; et le climat tendu, principalement dû à la méfiance entre la population et le gouvernement, ainsi qu'au niveau international.

Un client donne de l'argent à un vendeur dans une épicerie à Alger, en Algérie - REUTERS/ RAMZI BOUDINA

L'absence de toutes ces questions dans le rapport a conduit beaucoup à penser que la publication de ce rapport était purement propagandiste. 

En revanche, le rapport salue le président comme un transformateur du pays, soulignant les réformes politiques, économiques et diplomatiques ; la restructuration institutionnelle après le mouvement populaire de 2019 ; l'intégration des jeunes dans la vie politique ; la promotion d'une économie diversifiée au-delà du pétrole ; la promotion de la science, de l'intelligence artificielle et des start-ups ; et le rétablissement du rôle de l'Algérie en tant qu'acteur régional influent. 

Pour justifier la publication de ces chiffres, le rapport indique textuellement que « le président Tebboune accorde une grande importance à la science et à l'innovation en tant que deux leviers essentiels du développement durable. Des écoles nationales spécialisées dans l'intelligence artificielle ont été créées, parallèlement à un soutien accru à la recherche scientifique et à l'auto-entrepreneuriat, dans le but de préparer une génération capable de relever les défis de l'avenir technologique ». 

Tebboune lors d'une interview à la télévision algérienne - PHOTO/ARCHIVO

Toutefois, l'Algérie enregistre un taux de croissance du produit intérieur brut (PIB) de 4,2 %, un résultat salué par plusieurs institutions financières internationales, qui, selon l'APS, témoigne de la résilience et de la capacité de reprise face aux attaques internationales. 

Ces données sont toutefois loin des déclarations faites par le président lui-même en août 2024, dans lesquelles il soulignait que « l'Algérie aspire à devenir, d'ici deux à trois ans, la deuxième ou la première économie africaine ». 

Enfin, le document publié par le Service de presse algérien conclut en saluant le rôle de Tebboune à la tête du pays, affirmant que « de la côte africaine à la Méditerranée, de la cause palestinienne à son soutien aux causes africaines, l'Algérie a pleinement joué son rôle de puissance régionale libre dans ses décisions et ses positions ».