Le Liban : entre le désarmement du Hezbollah et le risque d'une nouvelle guerre civile
Le Liban est confronté à un tournant critique concernant le désarmement du Hezbollah, une question qui a divisé la classe politique et menace de fracturer la cohésion sociale déjà fragile, générant de fortes tensions avec la communauté internationale.
Cette pression extérieure, en particulier de la part des États-Unis, augmente sur Beyrouth pour qu'elle adopte des mesures décisives qui limitent la puissance militaire de la milice chiite soutenue par l'Iran. Cependant, toute tentative de désarmement dans le contexte actuel pourrait avoir des conséquences dévastatrices dans un pays qui traverse la pire crise économique de son histoire récente.
Les options qui s'offrent au Liban sont peu nombreuses et complexes : opter pour une confrontation directe qui pourrait détruire le tissu social ou insister sur un dialogue qui, jusqu'à présent, n'a pas donné de résultats concrets. À cet égard, le président Joseph Aoun, dans des déclarations récentes à une délégation du Groupe de travail américain pour le Liban, a souligné l'importance du dialogue comme moyen de résoudre le problème des armes non étatiques. « Les problèmes se résolvent par la communication. Le Hezbollah reste une composante libanaise », a-t-il affirmé, en essayant d'équilibrer la pression internationale avec la réalité à laquelle le pays est confronté.
Ces déclarations reflètent à la fois le poids des demandes extérieures et les moyens limités dont dispose l'État libanais pour faire face à cette crise profonde, car le Hezbollah n'est pas seulement une force armée dotée d'un vaste arsenal, mais aussi un acteur politique très influent qui bénéficie d'un soutien important au sein de la communauté chiite qui le perçoit comme la seule force capable de faire face à Israël.
Cependant, la récente guerre entre Israël et le Hezbollah, qui a entraîné l'élimination de plusieurs hauts responsables de l'organisation, dont son chef Hassan Nasrallah, a remis en question les capacités du groupe soutenu par Téhéran.
Une option militaire contre le Hezbollah, bien qu'elle ait été proposée par certains secteurs, serait désastreuse. Le Hezbollah n'est pas simplement une milice, c'est l'une des forces armées les plus puissantes du pays. Un conflit ouvert avec le groupe pourrait replonger le Liban dans une guerre civile similaire à celle qu'il a connue entre 1975 et 1990, lorsque le pays a été divisé entre des factions sectaires et que des acteurs régionaux et internationaux ont joué un rôle déterminant dans le conflit.
En effet, plusieurs analystes soulignent que les conditions actuelles rappellent la période précédant la guerre civile : prolifération des armes, polarisation politique et influence croissante des puissances étrangères.
Dans ce contexte, l'armée libanaise se trouve dans une position délicate. Malgré le soutien de la communauté internationale, toute tentative de désarmer le Hezbollah par la force pourrait diviser davantage la population et aggraver la crise institutionnelle. Le chercheur et ancien conseiller du Congrès américain, Walid Phares, a averti qu'une escalade militaire « pourrait conduire à une guerre civile dévastatrice qui ne profiterait qu'aux ennemis du Liban ».
Face à ce scénario, le dialogue continue de s'imposer comme la seule voie acceptable, bien qu'elle soit semée d'embûches. Le Hezbollah a clairement indiqué qu'il n'accepterait pas de rendre ses armes, sauf dans le cadre d'un plan stratégique national garantissant la défense du pays. Et tandis que la communauté internationale insiste sur l'élimination des armes illégales, les divisions internes entravent encore davantage toute avancée.
Adel Abdullah, professeur de sciences politiques à l'Université arabe de Beyrouth, explique à Al-Arab que « le dialogue peut être la seule option pour éviter une escalade, mais sans garanties réelles, car il est peu probable que le Hezbollah accepte les conditions du désarmement ».
Certaines voix au sein du Parlement, comme le député Ghassan Hasbani du bloc République Forte, insistent sur le fait que l'armée doit assumer la tâche de désarmer le Hezbollah, même par la force si nécessaire. Cependant, ils avertissent que l'externalisation de cette tâche à des acteurs étrangers - comme Israël ou la Syrie - serait inacceptable pour tout Libanais pour des raisons de souveraineté nationale.
Malgré tout, le gouvernement n'a pas encore présenté de plan clair ni de calendrier précis pour tenir sa promesse de désarmement. L'absence de consensus au sein du cabinet reflète les profondes divisions existantes. Dès 2006, un dialogue national a tenté de résoudre la question, sans succès. La discussion a été suspendue après le déclenchement de la guerre en juillet de la même année, et depuis lors, la question du désarmement reste sans solution.
Alors que les autorités libanaises, avec la communauté internationale, tentent de résoudre le problème de l'armement du Hezbollah, le pays reste plongé dans une profonde instabilité politique et une crise économique prolongée qui dure depuis des années.