3,5 milliards d'euros seraient affectés à la Turquie

L'UE envisage une enveloppe de 5,7 milliards d'euros pour financer les migrations

AFP/ BULENT KILIC - Une femme syrienne est assise dans une tente avec son enfant alors que d'autres attendent une distribution de nourriture, le 3 mars 2020, devant le poste frontière de Pazarkule avec la Grèce, à Edirne

L'Union européenne envisage une enveloppe totale de 5,77 milliards d'euros (6,8 milliards de dollars) pour des projets humanitaires en Turquie, en Jordanie et au Liban, afin d'éviter une nouvelle vague de réfugiés en provenance de Syrie vers l'UE. Sur cette enveloppe, 3,5 milliards d'euros (4,2 milliards de dollars) iraient à la Turquie pour qu'elle continue d'accueillir jusqu'en 2024 les réfugiés syriens fuyant la guerre civile qui dure depuis dix ans.

Le paquet ferait partie d'un plan régional plus large d'aide aux réfugiés pour empêcher les migrants d'atteindre le bloc, ont déclaré deux diplomates lors du briefing de mercredi. L'aide irait à des projets humanitaires, et non à des gouvernements, et contrairement au précédent cycle de financement de 6 milliards d'euros signé en 2016 entre l'Union et Ankara, l'argent proviendra cette fois-ci entièrement du budget commun de l'UE, et le Parlement européen devra donc donner son approbation. 

Dans la déclaration des membres du Conseil européen du 25 mars 2021, la Commission a été invitée à présenter une proposition au Conseil pour la poursuite du financement des réfugiés syriens en Turquie, ainsi qu'en Jordanie et au Liban. La volonté de renforcer la coopération avec la Turquie en matière de migration a également été soulignée.

Les 27 membres du Conseil européen devraient soutenir la proposition de financement de la Commission européenne. Elle sera abordée lors du sommet des 24 et 25 juin, au cours duquel les dirigeants de l'UE se réuniront à Bruxelles pour discuter des questions liées à la pandémie, à la reprise économique, aux migrations et aux relations extérieures, notamment les relations avec la Turquie et la Russie. 

La Turquie, qui accueille actuellement quelque quatre millions de réfugiés syriens et a dépensé plus de 40 milliards de dollars pour fournir des services de base, demande que les fonds européens soient versés directement au gouvernement d'Ankara. Il est peu probable qu'une telle demande de l'Union soit acceptée, car l'autoritarisme croissant de la Turquie et la détérioration du bilan de la nation en matière de droits de l'homme suscitent de vives inquiétudes. Il ne faut pas non plus oublier que la Turquie est militairement impliquée dans la guerre en Syrie et qu'elle contrôle actuellement Afrin, dans le nord du pays. La Turquie est également accusée d'utiliser les migrants comme monnaie d'échange, ce qu'Ankara dément.

Elle est également susceptible de rouvrir le débat tortueux de l'UE sur les relations avec la Turquie, que les législateurs accusent depuis longtemps d'étouffer la liberté des médias et d'emprisonner les opposants politiques sans véritable procès, ce qu'Ankara dément également.

Dans le cadre de l'accord migratoire initial de mars 2016, la Turquie a accepté de reprendre tous les migrants et réfugiés traversant la mer Égée pour entrer illégalement en Grèce, y compris les Syriens, en échange de fonds supplémentaires. Pour sa part, l'UE a promis de lever les exigences en matière de visa pour les Turcs qui visitent l'Europe et d'accélérer la candidature d'Ankara à l'adhésion au bloc, bien que toutes les discussions dans ce domaine soient au point mort.

Les dirigeants de l'UE tenteront de les relancer jeudi lors du sommet, offrant à Ankara la possibilité de renforcer encore la coopération dans les domaines d'intérêt commun. Le ministre des affaires étrangères, Mevlut Cavusoglu, a rencontré le week-end dernier le responsable de la politique étrangère de l'UE, Josep Borrell, pour discuter des migrations, de la libéralisation des visas et des liens entre la Turquie et l'UE.

M. Cavusoglu a déclaré lors d'une conférence de presse que l'UE devait "revenir à la table" des négociations avec la Turquie. "Nous attendons de l'UE qu'elle prenne maintenant des mesures concrètes", "Cela fait plus d'un an et demi et nous n'avons toujours pas reçu de réponse sur ces questions". Nous espérons que ce sommet sera un tournant et qu'ils ne traîneront pas les pieds de la Turquie."