Une carte définitive avec les nouvelles frontières de la Cisjordanie doit encore être conçue

Plus de doutes que de certitudes à deux semaines du début de l'annexion de la Cisjordanie par Israël

PHOTO/AP - Sur cette photo d'archive du 20 février 2020, le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu visite la zone où un nouveau quartier sera construit dans la colonie de Har Homa à Jérusalem-Est

À moins de deux semaines de la mise en œuvre par le gouvernement israélien de son plan d'annexion de certaines parties de la Cisjordanie, les questions de savoir quand, comment et sous quelle forme il se déroulera marquent le débat et jettent le doute sur un processus controversé dont on ignore encore de nombreux détails. 

Le Premier ministre Benjamin Netanyahu considère l'annexion comme l'élément principal de son programme politique et répète presque quotidiennement qu'il la poursuivra, mais il a plusieurs fronts ouverts à résoudre qui pourraient faire obstacle à l'activation du plan le jour qu'il a lui-même marqué, le 1er juillet.

Division interne 

A 13 jours seulement de la date butoir, le chef du gouvernement n'a pas encore convenu d'une stratégie commune sur la méthode et l'étendue des territoires à annexer avec son principal partenaire de coalition, le chef de la défense et vice-premier ministre, Beny Gantz, qui est réticent à prendre des mesures unilatérales et est enclin à réduire les terres sous juridiction israélienne. 

À cela s'ajoute la lente coordination avec les États-Unis, qui ont validé en janvier dernier l'annexion des colonies et de la vallée géostratégique du Jourdain avec la présentation de leur proposition de paix, mais ont également posé des conditions : toute démarche d'Israël doit être coordonnée avec l'administration américaine et cette dernière doit donner son accord à un processus sur lequel elle n'a pas encore donné sa bénédiction définitive.

Plusieurs questions demeurent, dont un d'ordre cartographique : un comité israélo-américain doit concevoir une carte définitive avec les nouvelles limites de la Cisjordanie, une procédure complexe qui semble loin d'être terminée et qui est entravée par l'absence de consensus au sein de l'exécutif israélien, rapporte la presse locale. 

Les États-Unis cherchent à rapprocher leurs positions 

L'ambassadeur américain en Israël, David Friedman, a rencontré Netanyahu et Gantz à plusieurs reprises ces derniers jours pour les rapprocher, mais aucun progrès n'a été signalé. La Maison Blanche voit la nécessité d'un consensus afin que l'annexion - à laquelle les Palestiniens et une grande partie de la communauté internationale sont opposés - bénéficie au moins du soutien d'une partie importante de la population israélienne.  

La distance entre les deux est encore grande et ils sont loin de résoudre leurs différends, souligne aujourd'hui le journal « Haaretz », citant des sources proches de Netanyahu. Les partisans du plan craignent que, s'ils ne parviennent pas à un accord rapidement, le gouvernement américain se désintéresse de la question et la relègue à l'arrière-plan, ce qui signifierait qu'il faut laisser tomber l'élan et gâcher une occasion qui pourrait ne pas se reproduire.  

Una vista muestra el asentamiento israelí de Har Homa en la Cisjordania ocupada por Israel, el 19 de mayo de 2020

Gantz - initialement opposé à l'annexion sans coordination avec la communauté internationale - insiste sur la nécessité de parvenir à des accords avec les pays arabes proches d'Israël, en particulier la Jordanie et l'Égypte, les seuls États voisins avec lesquels le pays a signé des accords de paix qui pourraient être remis en question si le processus est mené unilatéralement, sans tenir compte de toutes les parties.  

Une annexion en deux phases

Selon le quotidien conservateur « Israël Hayom », Netanyahu apprécie l'option d'appliquer l'annexion en deux phases : elle commencerait par l'incorporation des colonies de l'intérieur de la Cisjordanie – 10 % du territoire - pour faire pression sur les Palestiniens afin qu'ils négocient, et elle annexerait dans une seconde phase les blocs de colonies et la vallée du Jourdain, atteignant 30 % du territoire que le plan américain permet.  

Cette stratégie, encore en phase préliminaire selon le journal, permettrait de résister aux pressions de différents secteurs : ne pas annexer la vallée du Jourdain dans un premier temps donnerait à la Jordanie - très réticente à ce passage, étant donné que cette zone frontalière - une pause, montrerait un profil plus modéré aux pays arabes et aux groupes modérés aux États-Unis, et apaiserait à son tour le mécontentement des colons.

De nombreux dirigeants de colons - ayant une grande influence au sein de la droite israélienne - sont opposés à l'annexion dans le format proposé par les États-Unis, ils veulent un plan qui leur soit plus profitable et ils font pression pour tracer une carte de la Cisjordanie en fonction de leurs intérêts, dans laquelle quelque 19 colonies à l'intérieur de celle-ci ne sont pas reléguées dans des enclaves. Ils sont devenus un détracteur inattendu auquel Netanyahu doit également faire face. 

Cependant, à ce stade, l'annexion reste un mystère : Netanyahu ne précise pas ses détails en public, les sources officielles refusent de parler aux médias à ce sujet et ce sont les fuites, les spéculations et les rumeurs qui marquent un débat peu clair sur un plan qui menace de déstabiliser davantage une région marquée par des décennies de conflit.