Le gouvernement saoudien prévoit d'organiser trois sommets avec la Chine afin d'égaler le niveau des relations qu'il entretient avec les États-Unis

Riyad porte ses relations avec Pékin au plus haut niveau

FOTO/AP - Le président chinois Xi Jinping, à droite, serre la main du prince héritier d'Arabie saoudite Mohammed bin Salman lors d'une réunion en marge du sommet du G20 à Buenos Aires, vendredi 30 novembre 2018

Profitant de la réélection de Xi Jinping à la tête du Parti communiste chinois, l'Arabie saoudite envoie un message fort aux États-Unis. Ses relations avec Pékin seront au même niveau élevé que celles avec les États-Unis, voire plus élevé encore si la Maison Blanche poursuit son processus de retrait de la région. 

Le dirigeant chinois se rendra prochainement dans le royaume du Golfe, comme l'ont confirmé les responsables saoudiens cette semaine. Selon des sources gouvernementales citées par le journal numérique émirati Al-Arab, trois sommets distincts seront organisés entre les deux pays à l'occasion de la visite de Xi Jinping. L'idée est de réserver à Pékin le même traitement que celui réservé aux États-Unis lors de la visite de son président Joe Biden lors de sa dernière tournée au Moyen-Orient. 

En organisant ces trois sommets, l'Arabie saoudite démontre que ses alternatives aux États-Unis sont claires et fortes. Le message de Riyad est clair. Soit les États-Unis s'engagent dans des politiques plus décisives au Moyen-Orient, soit leur rôle sera remplacé par leur plus grand rival géopolitique du moment. La bonne volonté entre l'axe du Golfe et la Chine n'est pas une nouvelle récente. Les gouvernements arabes jouissent d'une position ambiguë entre les deux grandes puissances qu'ils utilisent pour exploiter chaque opportunité. 

Non seulement les gouvernements, mais aussi l'opinion publique du Golfe montrent déjà un vif intérêt pour le renforcement des relations avec le géant asiatique et le privilégient par rapport aux États-Unis. Selon les sondages publiés par l'Institut Washington. En août 2022, 60 % des personnes interrogées étaient favorables (26 % tout à fait favorables et 34 % favorables) au postulat selon lequel "Notre pays ne peut pas compter sur les États-Unis aujourd'hui, nous devrions donc nous tourner davantage vers la Russie ou la Chine comme partenaires". C'est 9 points de plus qu'en novembre 2021 et 3 points de plus qu'en mars 2022, à l'aube de l'invasion de l'Ukraine par la Russie.

En Arabie saoudite, la réponse de la population à la même déclaration était de 49% (22% fortement en faveur, 27% en faveur) en novembre 2021 ; 55% (26% MF, 29% F) en mars 2022 et enfin 59% en août 2022. Une progression beaucoup plus prononcée que celle des Émirats arabes unis. 20 points de plus, pour être précis.

Il convient également de rappeler que le dernier accrochage diplomatique entre les États-Unis et la Chine au sujet de la visite de la présidente de la Chambre des représentants, Nancy Pelosi, n'a pas été bien accueilli dans le Golfe. Les Émirats arabes unis, l'allié le plus proche de l'Arabie saoudite dans la région, ont saisi l'occasion pour rappeler leur soutien au plan d'unification de la Chine avec Taïwan et ont condamné le ton belliqueux et provocateur de la visite de Mme Pelosi sur l'île de Formose. 

C'est le ministre des Affaires étrangères de l'Arabie saoudite, le prince Faisal bin Farhan, qui a annoncé la nouvelle. Quelques jours après le grand congrès du CPC, Faisal bin Farhan a déclaré que la visite de Xi Jinping serait l'occasion de consacrer une "relation historique et forte".  Bin Farhan a déclaré que les préparatifs sont en cours de finalisation pour que la réunion se déroule avec succès à une date qui reste à annoncer. 


Les tensions entre les États-Unis et l'Arabie saoudite, suite au refus de l'OPEP d'augmenter les niveaux de production de pétrole, ne font que s'accentuer. À l'avenir, l'Arabie saoudite pourrait prendre des mesures énergiques qui la rapprocheraient de l'Inde et de la Chine, ouvrant ainsi les champs de coopération sur le plan militaire, un domaine aujourd'hui principalement dominé par les États-Unis, avec lesquels elle dispose d'importants programmes de contrôle et de surveillance dans la mer du Golfe.

L'Arabie saoudite souhaite maintenir autant que possible son indépendance vis-à-vis des États-Unis, et les interventions de ses dirigeants montrent clairement qu'ils ne céderont pas à Washington. Faisal bin Farhan a déclaré au diffuseur américain CNN dans une interview que si Riyad estimait que c'était le bon choix, il acquerrait des systèmes d'armes chinois, en particulier des missiles pour la défense aérienne, comme il l'a fait en 2014 avec des missiles à moyenne portée DF-21.