Le secrétaire général de l'ONU souligne les dommages causés par les technologies numériques et la menace qu'elles font peser sur la démocratie et les droits de l'homme

Guterres appelle à mettre fin à la désinformation et aux discours de haine sur les réseaux sociaux

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PHOTO/AFP - Médias sociaux : Facebook, Instagram et Twitter

La prolifération de la haine et du mensonge sur Internet représente un "grave danger à l'échelle mondiale" auquel le monde doit faire face, a déclaré le secrétaire général des Nations unies lors de la présentation de son rapport sur la véracité de l'information sur les plateformes numériques.

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© UNICEF/UN051302/Herwig

António Guterres a souligné que l'inquiétude suscitée par la menace potentielle que représente le développement rapide de l'intelligence artificielle ne doit pas occulter les dommages actuellement causés par les technologies numériques qui permettent la manipulation et la désinformation en ligne.

"La prolifération de la haine et des mensonges dans l'espace numérique cause de graves dommages à l'échelle mondiale, en ce moment même. Elle alimente les conflits, la mort et la destruction. Elle menace également la démocratie et les droits de l'homme et compromet la santé publique et l'action en faveur du climat... maintenant", a-t-il expliqué.

Le chef de l'ONU a souligné les avantages des plateformes numériques pour soutenir les communautés en temps de crise et de lutte, pour permettre aux voix marginalisées de s'exprimer et pour aider à mobiliser les mouvements mondiaux en faveur de la justice raciale et de l'égalité des sexes.

Toutefois, il a noté qu'elles sont également utilisées à mauvais escient pour fausser la diffusion scientifique et propager la désinformation et la haine à des milliards de personnes, alimentant ainsi les conflits, menaçant la démocratie, les droits de l'homme, la santé publique et l'action en faveur du climat.

Il a déclaré que cette menace mondiale exigeait une action internationale coordonnée pour rendre l'espace numérique plus sûr et plus inclusif, tout en protégeant les droits de l'homme.

"Ses propositions visent à créer des garanties pour aider les gouvernements à s'unir autour de lignes directrices qui promeuvent les faits, tout en exposant les conspirations et les mensonges, et en sauvegardant la liberté d'expression et d'information", a-t-il déclaré.

Des réponses insuffisantes

Guterres a souligné la responsabilité de certaines entreprises technologiques qui n'ont pas fait assez et ont agi trop tard pour empêcher leurs plateformes de contribuer à la propagation de la violence et de la haine, tandis que les gouvernements ont parfois eu recours à des mesures drastiques, telles que des fermetures et des interdictions d'Internet, qui n'ont pas de base juridique et violent les droits de l'homme.

Le rapport définit le cadre d'une réponse mondiale organisée par le biais d'un code de conduite pour une information véridique sur les plateformes numériques, en soulignant les obstacles possibles pour contenir cette menace tout en protégeant la liberté d'expression et d'information.

Propositions de code de conduite

  • Les gouvernements, les entreprises technologiques et les autres parties prenantes doivent s'abstenir d'utiliser, de soutenir ou d'amplifier la désinformation et les discours de haine, quel qu'en soit le but.
  • Les gouvernements doivent garantir un paysage médiatique libre, viable, indépendant et pluraliste, avec des protections solides pour les journalistes.
  • Les plateformes numériques doivent garantir la sécurité et le respect de la vie privée dès la conception de tous leurs produits, ainsi qu'une application cohérente des politiques et des recours dans tous les pays et dans toutes les langues.
  • Toutes les parties prenantes doivent prendre des mesures urgentes et immédiates pour s'assurer que toutes les applications d'intelligence artificielle sont sûres, responsables et éthiques, et respectent les obligations en matière de droits de l'homme.
  • Les entreprises technologiques doivent s'éloigner des modèles commerciaux qui privilégient les compromis au détriment des droits de l'homme, de la vie privée et de la sécurité.
  • Les annonceurs et les plateformes numériques doivent s'assurer que les publicités ne sont pas placées à côté de désinformation ou de discours haineux en ligne, et que les publicités contenant de la désinformation ne sont pas promues.
  • Les plateformes numériques doivent garantir une transparence significative et permettre aux chercheurs et aux universitaires d'accéder aux données, tout en respectant la vie privée des utilisateurs.

La participation ne peut être placée au-dessus des droits de l'homme

Interrogé par la presse sur sa certitude que les entreprises technologiques et les gouvernements prendront des mesures concrètes pour rendre l'espace numérique plus sûr et plus inclusif, António Guterres a souligné la nécessité de trouver des mécanismes incluant des approches multipartites pour définir des lignes directrices et des lignes rouges, tout en échangeant des bonnes pratiques et en veillant à ce que les modèles d'entreprise soient remis en question.

"Et, bien sûr, il y a un aspect central : ces plateformes doivent gagner de l'argent. Mais le problème est que le modèle commercial actuel donne la priorité à la participation plutôt qu'à la vie privée, à la vérité et aux droits de l'homme (...) Il est donc important que les plateformes comprennent que, bien sûr, une activité rentable ne peut pas créer des profits massifs au détriment d'un modèle participatif. Cela passe avant toute autre considération", a-t-il souligné.

Création d'un nouveau conseil scientifique

Le secrétaire général a annoncé qu'il nommerait dans les prochains jours un conseil scientifique consultatif qui comprendra un certain nombre d'experts externes, dont deux experts en intelligence artificielle et les scientifiques en chef de l'Union internationale des télécommunications et de l'UNESCO.

Il a également fait part de son intention de créer un organe consultatif sur l'intelligence artificielle, à la suite du prochain sommet sur les objectifs de développement durable, qui se tiendra les 18 et 19 septembre.