La situation hydrique inquiète le Maroc

L'absence prolongée de précipitations a fait chuter les réservoirs à des niveaux extrêmement bas - PHOTO/ARCHIVE
Les dernières données sur les réserves des barrages marocains suscitent des inquiétudes quant à la situation hydrique du pays, après plus de six ans de sécheresse 
  1. Une situation hydrique préoccupante
  2. Comparaison avec 2018

La situation alarmante des barrages situés à proximité des grandes zones agricoles du Maroc inquiète le gouvernement du pays. Le 13 février dernier, le ministre de l'Agriculture, Ahmed Bouari, a souligné la baisse inquiétante des réserves d'eau, qui provoque la détérioration de la couverture végétale dans plusieurs régions agricoles du pays. 

Bien que la saison agricole 2024-2025 enregistre une légère amélioration des précipitations par rapport à la sécheresse sans précédent de la période précédente, la situation n'en reste pas moins alarmante, notamment avec les canicules exceptionnelles de février 2024. Bien que ce mois soit généralement le plus froid de l'année, des vagues de chaleur sans précédent ont été observées dans plusieurs villes du Maroc. 

Ahmed Bouari, ministre de l'Agriculture, de la Pêche maritime, du Développement rural et des Eaux et Forêts du Maroc - PHOTO/ @Agri_gov_ma

Une situation hydrique préoccupante

Lors de la présentation des résultats de la campagne agricole en cours, marquée par les précipitations les plus faibles des 30 dernières années (53 % en dessous de la moyenne), Ahmed Bouari a précisé que les mois de septembre et octobre ont été encourageants, tandis que décembre et janvier ont été déficitaires.

Au cours des derniers mois, le Maroc a enregistré moins de 20 millimètres de pluie, une situation qui a eu un impact sur la couverture végétale de plusieurs régions du pays, en particulier pendant l'automne. Dans ce contexte, la région de Loukkos, au nord-ouest du pays, constitue une exception.

En ce qui concerne les eaux souterraines mobilisées pour l'agriculture, le ministre Bouari a annoncé que le volume total des retenues des barrages agricoles ou taux de remplissage ne dépasse pas 1,2 milliard de mètres cubes et que seulement 760 millions de mètres cubes ont été destinés à l'irrigation agricole, un chiffre qui représente moins de 14 % des besoins. 

Une photo montre la terre fissurée du barrage Al-Massira dans le village d'Ouled Essi Masseoud, à environ 140 kilomètres (85 miles) au sud de la capitale économique du Maroc, Casablanca - PHOTO/ARCHIVE

Selon les statistiques du ministère de l'Agriculture, dans les principales zones agricoles, ce taux de remplissage ne dépasse pas 2 % dans la zone de Doukala, 5 % dans celle de Tadla, 13 % dans celle d'El Haouz et 25 % dans celle de Sus Masa, pour atteindre une moyenne de 26 % dans les autres zones.

Par rapport à l'année 2020, le volume total d'eau dans les barrages d'irrigation agricole et d'eau potable a atteint près de 8 milliards de mètres cubes en février. Malgré la mise en service de nouveaux barrages, l'ensemble des eaux ne dépasse pas 4,6 milliards de mètres cubes. 

La situation actuelle de l'eau au Maroc se résume à de faibles précipitations, de faibles réserves d'eau et une pénurie d'eau pour le secteur agricole. « Malgré cela, notre agriculture continue de fonctionner, fournissant des produits agricoles aux marchés. Nous devons donc féliciter nos agriculteurs pour les efforts qu'ils déploient », a souligné Bouari.

Deux images de la NASA de la même zone dans la région de Casablanca - PHOTO/NASA 

Comparaison avec 2018

Pour vraiment apprécier la gravité de la situation hydrique au Maroc, il faut comparer la situation actuelle des barrages avec celle de 2018, qui a été la dernière année pluvieuse dans le pays, plutôt qu'avec 2024, année qui a enregistré les niveaux de sécheresse les plus élevés. 

Le barrage Abdelmoumen, à une soixantaine de kilomètres de la ville côtière marocaine d'Agadir - PHOTO/ARCHIVE

Cette comparaison des précipitations et des réserves de certains barrages marocains entre 2018 et aujourd'hui montre une différence abyssale, comme le révèlent les exemples suivants : 

Barrage d'AlMassira : aucune amélioration significative n'a été enregistrée depuis décembre 2018, avec une évolution qui dépasse à peine 2 %. Les récentes précipitations ont eu un effet minime de 2,21 % contre 1,56 % en 2024, soit une augmentation de 0,65 %. En termes absolus, cette augmentation n'est que de 17 millions de mètres cubes, ce qui équivaut à la consommation de la ville de Casablanca en un mois.

Barrage de Sidi Said Maachou : il est sur le point de s'assécher en raison de sa faible capacité de rétention, bien qu'il se remplisse généralement rapidement avec des pluies modérées. Depuis août 2024, ses réserves ont chuté à 0,5 %, mais les pluies de septembre et octobre ont permis de le recharger partiellement pour atteindre un niveau de 24 % en décembre 2024.

Barrage Ahmed El Hansali : situé dans la zone agricole de Tadla, près d'Oued Oum Rabii, et d'une capacité de 668 millions de mètres cubes, il connaît une situation préoccupante depuis 2018, date à laquelle il a été rempli à un taux de 97,7 %, ce qui équivaut à une capacité de 652,8 millions de mètres cubes. Depuis 2022, même dans les meilleures conditions, le barrage n'a pas dépassé 16 % de sa capacité. Actuellement, il ne dépasse pas 34 %, soit 22,28 millions de mètres cubes. 

Le barrage Idriss 1er: situé dans la région de Fès-Meknès, le barrage alimente en eau potable la ville de Fès et ses banlieues, ainsi que les terres agricoles environnantes. Cependant, il subit les effets de la sécheresse, après avoir vu ses réserves diminuer en 2024 à 18,27 %, contre 25,01 % actuellement, soit 282 514 mètres cubes, ce qui ne suffit pas à satisfaire les besoins en eau potable et en irrigation.