Hong Kong, une loi et un système

Un état, deux systèmes. La devise d'un projet de vie politique pour Hong Kong en 1997 lorsque le Royaume-Uni, le gouvernement de la ville semi-autonome, pièce essentielle de la finance internationale en Asie, et le gouvernement chinois, se sont mis d'accord sur le désengagement colonial et le processus de réintégration de Hong Kong dans la Chine, en maintenant sa personnalité économique et un système juridique autonome. La loi de sécurité mise en œuvre le 30 juin dernier, conçue et imposée par Pékin, signifie, en premier lieu, une modification définitive de ce cadre complexe et instable qui a produit différentes poussées de protestation citoyenne au cours des derniers mois, compte tenu de la crainte d'une grande partie de la société de Hong Kong que la stratégie chinoise d'ascension dans la catégorie de puissance mondiale et de pôle d'influence finisse par miner par avance la faible autonomie dont jouissait le territoire.
La distance entre les habitants de Hong Kong et le gouvernement du parti communiste chinois est devenue, avec cette nouvelle ressource juridique, une barrière entre les libertés d'expression et de revendication politique, et les intérêts géopolitiques et stratégiques du géant asiatique. Nous entrons maintenant dans une période qui sera celle du dialogue ou, au contraire, celle de la tension et de la répression croissantes, en fonction de la capacité internationale à essayer de remettre le processus sur les rails et, surtout, de l'évaluation par la Chine du coût en termes de détérioration de son image que l'application stricte et sévère de la nouvelle loi peut représenter pour la puissance asiatique.
Jusqu'à présent, la personnalité internationale que la Chine recherchait était fondée sur le principe du non-alignement et sur la revendication politique de territoires, en termes non agressifs ou sur une adaptation et une attraction progressives. Le premier changement d'attitude a eu lieu en 2017 avec le projet ambitieux de rajeunissement social et de renforcement stratégique. La seconde se déroule en cette période de crise dont Pékin a profité pour intensifier ses manœuvres en mer de Chine méridionale, où il revendique la souveraineté de certaines îles et archipels, pour déclencher des affrontements frontaliers avec l'Inde dans l'Himalaya et pour proclamer plus résolument son incontestable aspiration à la souveraineté sur Taïwan. Trop de fronts sont ouverts en même temps, alors que les perspectives de croissance et l'activité commerciale ont également été affaiblies par la pandémie. Une politique sévère à Hong Kong pourrait transformer l'image d'amitié que le gouvernement chinois veut projeter, et qui est essentielle à la réalisation de projets mondiaux tels que la nouvelle route de la soie, qui nécessitent la confiance et la crédibilité de leur principal moteur si l'on veut qu'ils soient viables.
La communauté internationale est consciente de ces contradictions, qui sont intrinsèques à la politique chinoise. Le Royaume-Uni a pris une position claire en faveur de Hong Kong et offre des visas à ses citoyens. Les États-Unis exercent une pression économique et stratégique sur les aspirations de leur rival, qui est considéré comme systémique. Et l'Europe maintient pour l'instant une position pragmatique et prudente qui cherche à encourager le dialogue entre les parties, mais qui pourrait être durcie si, comme il semble, l'Union européenne devait opter pour une déclaration commune ferme, mettant en garde contre les risques que la nouvelle loi pourrait produire en matière de libertés telles que l'expression et les droits de l'homme. La Chine a choisi la puissance dure pour Hong Kong. Mais des acteurs importants de la société mondiale, y compris des entreprises et des organisations non gouvernementales, peuvent exiger de leurs dirigeants l'exercice d'un pouvoir discret s'ils ne veulent pas que la bipolarisation devienne une réalité à l'avance, où les démocraties présenteront un front commun avec l'argument de l'effondrement des libertés en Asie.