Coup de griffe du Mossad et de Netanyahou

Si les milices chiites du Liban, voire de Syrie, d'Irak et d'Iran, les utilisaient, c'était à la demande du chef du Hezbollah, Hassan Nasrallah, et d'autres ayatollahs convaincus qu'Israël était bien au fait des communications par téléphone mobile.
La simplicité des anciens « pagers » et talkies-walkies les rendait insensibles à la sophistication technologique. Tout le monde est désormais convaincu que le Mossad, à qui l'on doit la préparation minutieuse et le ciblage simultané des détenteurs de ces appareils, ne dédaigne aucun moyen de surveiller et d'éliminer ses ennemis.
Si le nombre de morts n'est pas très élevé - une vingtaine, selon les dirigeants du Hezbollah - le nombre de blessés se chiffre en milliers, dont beaucoup dans un état critique et avec de graves amputations. Le Mossad a ainsi déclenché non seulement la saturation et le chaos dans le système de santé libanais effondré, mais aussi la panique dans les rangs du Hezbollah et des autres groupes terroristes qui menacent Israël. A tel point que des centaines, voire des milliers de personnes se débarrassent à la hâte de leurs appareils électroniques, craignant que la vague d'attaques insolites n'ait pas encore cessé.
Le Mossad et Israël, que tout le monde désigne comme l'auteur de l'opération, répondent par un silence absolu, mais il ne fait aucun doute que le très prestigieux service de renseignement israélien a, avec cette opération, considérablement renforcé sa réputation de traqueur implacable de toute cible qui lui est désignée, sans aucun coin du monde où il puisse se cacher ou se mettre à l'abri.
Tout terroriste qui ose s'attaquer aux citoyens israéliens ou à l'existence même du pays sait ce qu'il risque.
Des sources gouvernementales américaines officieuses affirment que la Maison Blanche a été informée à l'avance de l'opération, sans toutefois préciser si le gouvernement israélien a fourni des détails sur ce qu'il allait réellement déclencher. Parmi les conséquences les plus évidentes de cette attaque massive contre les miliciens libanais, la plus inquiétante est l'impression donnée par Benjamin Netanyahu qu'il veut étendre la guerre à toute la région.
Depuis deux semaines, l'entourage de Benjamin Netanyahou laissait filtrer l'intention supposée du Premier ministre israélien de remplacer son ministre de la Défense, Yoav Galant, en raison de désaccords sur la ligne à suivre à Gaza.
Selon ce récit, Galant bénéficierait de la sympathie des Américains en raison de sa position en faveur d'un accord de cessez-le-feu, qui faciliterait le retour des plus de 100 otages, morts ou vivants, qui sont toujours aux mains du Hamas.
Cependant, en ce qui concerne la guerre d'Israël contre le Hezbollah, le ministre lui-même a annoncé que le conflit entrait dans une nouvelle phase, alimentant les soupçons selon lesquels l'opération de renseignement du Mossad pourrait préfigurer de nouvelles attaques conventionnelles massives, une fois que le chemin de nombreux miliciens mis hors d'état de nuire aura été dégagé. Par ailleurs, le fait que Galant et Netanyahou aient annoncé que les 60 000 citoyens israéliens vivant près de la frontière avec le Sud-Liban pouvaient rentrer chez eux et s'y réinstaller revient à leur assurer qu'ils n'ont plus à craindre le harcèlement du Hezbollah par la pluie incessante de ses drones et de ses missiles.
Les milices libanaises, et par extension leurs protecteurs iraniens, annoncent que ce coup brutal et humiliant « ne restera pas impuni ». À ce stade, l'action de vengeance annoncée par le Hamas et l'Iran pour la mort de leur chef politique, Ismail Haniyeh, n'a pas encore eu lieu. Le fait que les deux parties veuillent maintenir les attaques et les contre-attaques dans le cadre local, effort dans lequel s'est également engagé le président Joe Biden, ne signifie pas que Netanyahou soit aligné sur ce groupe. Bien sûr, il ne le dit pas ouvertement, mais ses préférences pour l'occupant de la Maison Blanche vont à Donald Trump. Le candidat républicain ne cesse d'attaquer la démocrate Kamala Harris, qu'il tiendrait pour responsable, si elle remportait l'élection du 5 novembre, de « la disparition de l'État d'Israël en seulement deux ans ».
Pour l'heure, la vague d'attentats des 17 et 18 septembre a redonné une bonne dose de moral aux agents du Mossad, mais aussi à Netanyahou, que les familles des otages détenus par le Hamas ne cessent de rendre responsable de leurs souffrances. La gifle que le Hamas a infligée à Israël et à ses services de sécurité le 7 octobre 2023 ne sera pas effacée par cette opération de renseignement hautement sophistiquée au Liban, mais elle restaurera sans aucun doute, du moins en partie, la capacité de dissuasion éprouvée d'Israël.