Le gaz espagnol afflue vers le Maroc, tandis que les exportations vers l'Europe sont reléguées au second plan
L'année dernière, l'Espagne a considérablement augmenté ses exportations de gaz naturel vers le Maroc, tout en réduisant l'approvisionnement de cette ressource vers des pays européens tels que l'Italie, selon un récent rapport du média espagnol Vozpópuli.
Les données fournies par CORES, l'agence espagnole chargée des réserves stratégiques de pétrole, révèlent que les exportations de gaz vers le Maroc représentaient 18,5 % des exportations totales de gaz de l'Espagne en juin 2024. Ce chiffre contraste fortement avec les 0,1 % enregistrés en juin 2022.
Au cours des 12 derniers mois, l'Espagne a expédié 9 338 gigawattheures de gaz naturel au Maroc via le gazoduc Maghreb-Europe, soit 155 fois plus que l'année précédente. Comme le note Morocco World News, cette augmentation intervient dans un contexte où l'Algérie, qui était auparavant un fournisseur clé de gaz pour le Maroc et l'Espagne, a fermé un important gazoduc vers le Maroc en octobre 2021, dans un contexte de tensions diplomatiques.
Confronté à la nécessité d'éviter une crise énergétique, le Maroc s'est tourné vers l'Espagne pour profiter de son infrastructure de regazéification et importer du gaz naturel liquéfié (GNL), qui peut ensuite être transporté par des gazoducs jusqu'au territoire marocain.
L'Algérie, pour sa part, avait mis en garde contre la possibilité de rompre son contrat d'approvisionnement avec l'Espagne si des molécules de gaz algérien atteignaient le Maroc. Les autorités espagnoles ont donc réaffirmé à plusieurs reprises qu'aucune des livraisons de gaz algérien n'était détournée vers le Maroc. Selon les responsables, un plan spécifique est en place pour éviter ce scénario et préserver ainsi la relation énergétique critique entre Madrid et Alger.
Malgré l'augmentation des exportations vers le Maroc, l'Espagne a diminué ses exportations de gaz vers l'Italie. Le gazoduc reliant Barcelone à Livourne, qui utilise des méthaniers plus petits, représentait 18,4 % des exportations de gaz espagnoles en 2023. Toutefois, en juin 2024, cette part est tombée à 4,4 %, selon les données de CORES.
L'Italie, qui a été gravement touchée par les coupures d'approvisionnement en gaz russe, a réussi à atteindre des niveaux de stockage supérieurs à 90 % grâce à de nouveaux accords directs avec l'Algérie. L'industrie spécule que le déclin de la coopération entre l'Espagne et l'Italie pourrait également être lié aux tensions dans les relations diplomatiques entre les deux gouvernements.
Malgré ces changements dans la dynamique des exportations, l'Espagne continue d'obtenir 29,6 % de son gaz de l'Algérie et 19 % de la Russie, en dépit des perturbations de l'approvisionnement.
En résumé, l'augmentation notable des exportations de gaz de l'Espagne vers le Maroc reflète une adaptation stratégique à la reconfiguration des relations énergétiques en Méditerranée, marquée par des tensions diplomatiques et des ajustements des routes d'approvisionnement. Dans le même temps, la baisse des exportations vers l'Italie suggère un changement dans les priorités énergétiques de l'Espagne, qui pourrait avoir des implications à la fois politiques et économiques dans un avenir proche. La capacité de l'Espagne à maintenir des relations équilibrées avec l'Algérie et le Maroc sera cruciale pour assurer sa position d'acteur clé sur le marché énergétique de la région.
Tout ceci en gardant à l'esprit les excellentes relations diplomatiques qui existent aujourd'hui entre l'Espagne et le Maroc, favorablement renforcées suite à la détermination du gouvernement espagnol à soutenir la proposition marocaine pour le Sahara Occidental comme la manière la plus sérieuse, crédible et réaliste de résoudre le différend sahraoui.