Leila Benali : « Le Maroc accueille favorablement toute coopération et alliance bénéfique pour tous dans le commerce de l'énergie verte »

La ministre marocaine de la Transition énergétique et du Développement durable a répondu en exclusivité aux questions d'Atalayar sur « l'Offre Maroc » dans le domaine de l'hydrogène vert, à laquelle participent des entreprises espagnoles telles qu'Acciona ou Cepsa/Moeve

Leila Benali, ministra de Transición Energética y Desarrollo Sostenible de Marruecos - PHOTO/ARCHIVO
Leila Benali, ministre marocaine de la Transition énergétique et du Développement durable - PHOTO/ARCHIVO

Le 6 mars dernier, le Comité exécutif chargé de superviser l'« Offre Maroc » s'est réuni sous la direction du chef du gouvernement marocain, Aziz Akhannouch. Le comité a sélectionné cinq consortiums internationaux, dont font partie les entreprises espagnoles Acciona et Cepsa, pour développer six projets liés à l'hydrogène vert dans les trois provinces du sud du Maroc, avec un investissement conjoint de 319 milliards de dirhams (un peu plus de 30,24 milliards d'euros).

Pour en savoir plus sur les projets d'avenir du Maroc dans le domaine de l'hydrogène vert et sur la participation des entreprises espagnoles à ces projets, Atalayar a interviewé Leila Benali, ministre marocaine de la Transition énergétique et du Développement durable.

Le Maroc veut devenir le producteur de 4 % de la production mondiale totale d'hydrogène vert d'ici 2030, en exportant une bonne partie de cette production vers l'UE. Quels investissements sont nécessaires dans les secteurs des énergies renouvelables, des infrastructures et de la logistique pour atteindre cet objectif ambitieux ?

Notre pays dispose d'un certain nombre d'atouts très importants qui soutiennent cet intérêt :

- Sa position géostratégique : le Maroc est le seul pays africain interconnecté avec l'Europe en termes d'électricité, de gaz et de logistique.

- Trois décennies d'expérience dans l'attraction d'investissements privés dans le secteur de l'énergie, ainsi qu'une expérience dans le développement de projets à grande échelle.

- Une infrastructure logistique bien développée, avec des ports, des projets de désalinisation, des oléoducs...

- Un potentiel important en matière d'énergies renouvelables et des programmes ambitieux dans ce domaine,

- Un tissu industriel de pointe.

Ces facteurs permettent au Maroc de jouer un rôle clé dans la production d'hydrogène et de ses dérivés.

El jefe del Gobierno Aziz Akhannouch preside una reunión del comité directivo encargado de la “Oferta de Marruecos” para el hidrógeno verde – PHOTO/OFICINA DEL JEFE DEL GOBIERNO DE MARRUECOS
Le chef du gouvernement Aziz Akhannouch préside une réunion du comité de pilotage en charge de « l'offre marocaine » pour l'hydrogène vert - PHOTO/BUREAU DU CHEF DU GOUVERNEMENT DU MAROC

Conformément aux Hautes Instructions de Sa Majesté le Roi Mohammed VI, que Dieu l'assiste, cette « Offre Maroc » a été élaborée dans le domaine de l'hydrogène vert. Elle couvre l'ensemble de la chaîne de valeur de ce secteur au Maroc, ainsi que le cadre réglementaire et institutionnel, en plus d'un plan pour l'infrastructure nécessaire. L'« Offre Maroc » repose sur une approche globale, pragmatique et transparente, qui offre aux investisseurs une vision claire. Un million d'hectares de terrain ont été identifiés, dont 300 000 seront mis à la disposition des investisseurs dans un premier temps.

À ce jour, plusieurs dizaines d'investisseurs nationaux et internationaux ont manifesté un vif intérêt pour le secteur. Un processus de sélection détaillé a été mis en place pour évaluer la crédibilité, la solidité financière et les capacités techniques des investisseurs, ainsi que leur expérience dans les énergies renouvelables et les infrastructures associées (batteries, stockage, etc.), en mettant l'accent sur les infrastructures stratégiques nécessaires au développement de l'hydrogène vert, notamment les ports, les réseaux électriques, les gazoducs, les conduites d'hydrogène et les usines de dessalement.

Le processus repose sur la diversification des risques :

- Risque de marché : en intégrant plusieurs secteurs (industrie, électricité, carburant vert...).

- Risque technologique et pays : en associant des investisseurs des États-Unis, d'Europe, du Moyen-Orient et d'Asie, ainsi que des parties prenantes marocaines.

L'année 2024 a été marquée par plusieurs étapes clés dans la mise en œuvre de « l'Offre Maroc », notamment le lancement de l'accompagnement préalable des investisseurs et le dépôt des demandes. Cette même année a également été signé, sous la présidence de Sa Majesté le Roi Mohammed VI, que Dieu l'assiste, et en présence du président de la République française, le premier contrat de réservation de terrains.

Lors de la dernière réunion du Comité de pilotage de l'Offre Maroc, qui s'est tenue le 6 mars, six projets stratégiques présentés par des investisseurs nationaux et internationaux dans trois régions du Royaume ont été présentés. Ces initiatives représentent un investissement total de 319 milliards de dirhams.

Outre les projets soutenus par l'opérateur national, le Groupe Office Chérifien des Phosphates (OCP), pour produire de l'hydrogène et de l'ammoniac verts dans le cadre de son programme de développement visant à atteindre la neutralité carbone d'ici 2040, toutes ces initiatives devraient positionner le Maroc comme un acteur clé dans le domaine de l'hydrogène vert.

Nous espérons dépasser les 52 % d'énergies renouvelables dans notre mix énergétique d'ici 2030, avec des projets solaires, éoliens et hydroélectriques à grande échelle. Notre capacité électrique installée a atteint 12 GW fin 2024, dont 5,4 GW d'énergies renouvelables, soit environ 45,3 % de la capacité totale installée.

Le Maroc a adopté un plan d'investissement dans l'électricité verte jusqu'en 2030, qui prévoit l'installation d'une capacité électrique supplémentaire de plus de 15 GW pour un coût d'investissement total d'environ 12 milliards de dollars sur la période 2025-2030, dont 80 % seront développés à partir de sources renouvelables. C'est ce que nous faisons habituellement, ce qui signifie des opportunités d'investissement à faible risque. Et nous travaillons actuellement à tripler les investissements dans les énergies renouvelables et à quintupler les investissements dans le renforcement du réseau électrique d'ici 2030.

Cette offre donnera un coup de fouet aux investissements dans les énergies renouvelables, le dessalement de l'eau, la production d'hydrogène vert et de ses dérivés, ainsi qu'au développement des infrastructures d'accompagnement, notamment les ports, les transports et les installations de stockage.

Energía eólica en Marruecos - PHOTO/FILE
L'énergie éolienne au Maroc - PHOTO/FILE

Deux entreprises espagnoles, Acciona et Cepsa, font partie des consortiums internationaux sélectionnés dans le cadre de l'« Offre Maroc » pour participer à des projets de développement de l'hydrogène vert. L'Espagne est l'un des pays de l'UE qui a le plus investi dans l'hydrogène vert, avec plus de 40 % des projets présentés. Compte tenu de sa proximité géographique et de ses relations commerciales étroites, que peut apporter l'Espagne au développement de l'hydrogène vert au Maroc ?

L'énergie est un vecteur important pour stimuler la coopération et le Maroc accueille favorablement toute coopération et alliance bénéfique pour tous dans le commerce de l'énergie verte. Conformément à la Vision Royale, le Royaume du Maroc joue un rôle très actif dans le développement de la coopération internationale et régionale dans le domaine de l'énergie.

En raison de sa position géographique stratégique, le Maroc continue de jouer un rôle actif dans l'accélération de l'intégration des marchés énergétiques reliant les deux rives de la Méditerranée, tout en s'efforçant de renforcer ses liens électriques avec ses voisins par le développement de nouvelles liaisons et le renforcement de celles déjà existantes. Le renforcement de l'intégration régionale par l'ouverture des marchés régionaux de l'énergie et l'harmonisation des réglementations et des normes énergétiques figurent parmi les priorités de la stratégie énergétique du Maroc.

En tant que l'un des cinq connecteurs mondiaux, le Maroc est dans une position unique pour tirer parti de nos abondantes ressources renouvelables, de nos capacités technologiques avancées, de notre situation géographique stratégique et de nos trois décennies d'expérience dans l'attraction d'investissements privés dans le secteur de l'énergie. Ces facteurs permettent au Maroc de jouer un rôle clé dans la production d'énergie hydrogène et d'être un acteur important dans l'exportation de produits hydrogène.

Leila Benali, ministra de Transición Energética y Desarrollo Sostenible, durante una conferencia sobre biocombustibles - PHOTO/X/@MTEDDMAROC
Leila Benali, ministre de la Transition énergétique et du Développement durable, lors d'une conférence sur les biocarburants - PHOTO/X/@MTEDDMAROC

Le Maroc a fait d'importants progrès depuis 2021. Par exemple, en ce qui concerne le nombre d'autorisations délivrées pour le développement de projets d'énergie renouvelable, 60 projets ont été approuvés au total, contre seulement 14 entre 2011 et 2020, soit une multiplication par quatre. En outre, la capacité autorisée pour les énergies renouvelables a atteint 2,13 GW, contre 1 GW autorisé entre 2011 et 2020, soit une augmentation de 75 %.

Le Maroc est le seul pays africain à être interconnecté de manière bidirectionnelle avec l'Europe en matière d'électricité, de gaz et de logistique, principalement via l'Espagne. Il dispose déjà d'interconnexions électriques opérationnelles avec l'Espagne et prévoit également de renforcer cette interconnexion par une troisième ligne d'une capacité de 700 MW.

D'autre part, le Maroc est également relié à l'Europe par un gazoduc et, grâce à nos bonnes relations avec l'Espagne, nous avons pu l'exploiter dans le sens inverse, avec une capacité d'environ 12,5 milliards de m3 par an dans le sens Maroc-Espagne et de 1,5 milliard de m3 dans le sens Espagne-Maroc.