Le doublement des importations pétrolières russes en Turquie : une aubaine pour Moscou

Déclenchée le 24 février dernier, l’offensive russe en Ukraine catalyse de nombreux enjeux et met en lumière des limites comme celle de la dépendance énergétique européenne à l’égard des hydrocarbures russes. Dans ce contexte, l’Union européenne a voté un ensemble de paquets de sanctions destinés à condamner les agissements russes en Ukraine. Parmi eux, Bruxelles a imposé un embargo sur le pétrole russe, ce qui conduit l’UE à diversifier ses approvisionnements énergétiques. Néanmoins, certains pays, comme la Turquie - non-membre de l’UE et dont les relations propices avec Moscou sont connues depuis longtemps - a annoncé ce lundi 22 août un doublement de ses importations de pétrole russe d’après les données de Refinitv Eikon.

En effet, il apparaît une augmentation des importations de pétrole russe par la Turquie, faisant ainsi passer le cours des échanges de 98 000 barils par jour (bpj) l’année dernière à 200 000 barils par jour, cette année. Cette hausse des importations à été permise par la plus grande société de raffinerie de pétrole Tupras qui a absorbé une part des réserves pétrolières russes situées dans la région de l’Oural. Plus encore, les nombreux raffineurs turcs ont également importé de l’huile légère en provenance de Sibérie. Si ces dernières années, la Turquie avait employé une stratégie de diversification énergétique en important du pétrole de Norvège via le gisement pétrolier norvégien Joahan Sverdrup ou encore via le gisement irakien Kirkouk, cette année les prix du pétrole russe étaient si exceptionnellement bas que la Turquie a diminué ses achats avec ces régions pour renforcer ses échanges avec Moscou. Cela se matérialise, notamment, par la rencontre, en début du mois, des deux présidents Recep Tayyip Erdoğan et Vladimir Poutine qui ont reformulé leur souhait de renforcer leur coopération commerciale dans les mois à venir.

D’après les prévisions de Refinitiv Eikon, la raffinerie turque STAR devrait acheter environ 90 000 barils de pétrole à la Russie entre janvier et août 2022 contre 48 000 barils au cours de la même période de l’année dernière et les raffineries dirigées par la société Tupras achèteront environ 111 000 abris de pétrole à la Russie de janvier à août 2022 contre 45 000 au cours de la même période l’année dernière. Ainsi, il apparaît que "le choix pour les raffineurs turcs était évident car ils n'ont pas de limites à l'achat de pétrole russe" d’après les propos d’un commerçant sur le marché pétrolier méditerranéen recueillis par l’agence de presse britannique Reuters.
Qualifiée d’ « opération militaire spéciale », l’offensive russe en Ukraine est ainsi venue re-configurer le marché mondial du pétrole avec une Union européenne désireuse de faire respecter les valeurs de protection des droits humains qu’elle entend bien défendre et une Turquie, aux portes de l’Europe, qui n’a pas tenue à sanctionner la Russie pour ses actions en Ukraine et qui accélère son commerce sur le plan énergétique avec Moscou, en affirmant tout de même qu’elle restait indépendante de l’approvisionnement énergétique russe.