Mines et véhicules électriques : que faire pour réduire l'empreinte carbone ?
L'Indonésie a franchi une nouvelle étape dans sa quête pour devenir un acteur majeur dans le domaine des véhicules électriques (VE), les deux plus grands producteurs mondiaux de batteries pour VE ayant récemment annoncé des projets majeurs dans le pays. Toutefois, ces développements ont mis en évidence la nature à forte intensité de carbone de l'exploitation minière pour la production de VE, malgré les espoirs de décarbonisation du processus.
Dirigé par LG Energy Solution, le deuxième plus grand fabricant mondial de batteries pour véhicules électriques, un consortium sud-coréen investira 9 milliards de dollars dans un projet de fabrication de véhicules électriques en Indonésie.
Le projet couvrira tous les aspects du processus de production des batteries, depuis la fusion et le raffinage du nickel jusqu'à l'assemblage du produit fini, et s'inscrit dans le cadre d'un effort continu visant à réduire la dépendance à l'égard des fournisseurs chinois de batteries pour véhicules électriques.
Avec environ 80 % des matériaux de batterie produits en Chine, le passage de l'industrie automobile aux véhicules électriques a été ralenti par des problèmes de chaîne d'approvisionnement bien documentés ces dernières années.
L'Indonésie est en bonne position pour reprendre une partie de cette production de la Chine. Comme OBG l'a récemment souligné, le pays cherche depuis un certain temps à se positionner en tant que centre de fabrication de batteries pour véhicules électriques.
Par exemple, en septembre 2020, le pays a publié sa feuille de route pour les véhicules électriques, qui prévoit de produire 600 000 véhicules électriques à quatre roues et 2,45 millions de véhicules électriques à deux roues par an d'ici 2030.
Puis, en mars 2021, quatre entreprises publiques ont formé l'Indonesia Battery Corporation (IBC), chargée de gérer l'industrie des batteries pour véhicules électriques.
Avec la société minière locale Aneka Tambang, l'IBC est un partenaire local clé dans ce nouveau développement.
L'Indonésie possède environ un quart des réserves mondiales totales de nickel, un composant clé des batteries des véhicules électriques, qui représentent environ 35 % des coûts de production des véhicules électriques.
L'Indonésie est donc bien placée pour étendre sa présence en tant que fabricant de batteries pour véhicules électriques. En effet, outre l'accord du consortium, un accord de 6 milliards de dollars a été annoncé le mois dernier entre la société chinoise Contemporary Amperex Technology (CATL), le plus grand fabricant de batteries pour VE au monde, et des entreprises indonésiennes pour travailler sur un projet similaire.
Ailleurs, la guerre en cours en Ukraine a servi à renforcer le potentiel de l'Indonésie à cet égard ; la Russie représente environ 11 % de la production mondiale de nickel, ce qui a fait grimper les prix en flèche depuis l'invasion.
Toutefois, la position de l'Indonésie met également en lumière un aspect paradoxal de la transition de l'industrie automobile vers l'abandon des combustibles fossiles.
Un rapport récent de LGIM, une société de gestion d'actifs, et de la multinationale minière BHP a révélé que le monde devra extraire des niveaux de métaux beaucoup plus élevés s'il veut limiter le réchauffement de la planète à 1,5°C au-dessus des niveaux préindustriels.
Selon le rapport, la demande cumulée de nickel devra quadrupler au cours des 30 prochaines années, et une grande partie de cette demande sera associée aux véhicules électriques.
L'industrie minière est très intensive en carbone à chaque étape du processus, ce qui a un impact sur l'empreinte carbone des véhicules électriques. Si les émissions économisées par les pots d'échappement rendent les voitures moins gourmandes en carbone, le cabinet d'études Berylls Strategy Advisors a constaté qu'en Allemagne, la fabrication d'une batterie de VE pesant 500 kg émet 74 % de CO2 de plus que la production d'une voiture classique.
Toutefois, on peut espérer que l'empreinte carbone de l'industrie minière pourra être réduite et, avec elle, celle des producteurs de véhicules électriques.
De grandes multinationales, dont BHP, Glencore et Rio Tinto, ont fixé des objectifs de neutralité carbone.
Un élément clé de ces plans est l'incorporation de véhicules électriques dans les opérations minières. Une enquête menée l'année dernière par Mining Technology, un site Internet de référence dans le secteur, a révélé que la majorité des personnes interrogées pensaient qu'une utilisation accrue des véhicules électriques à batterie serait le moyen le plus efficace de réduire l'empreinte carbone du secteur minier.
Les véhicules tels que les camions représentent actuellement jusqu'à 50 % du total des émissions directes de gaz à effet de serre sur les sites miniers. Quelque 28 000 gros camions de transport minier sont utilisés dans le monde et émettent collectivement 68 millions de tonnes de CO2 chaque année.
Outre l'empreinte carbone associée à la production, la batterie est un élément important à prendre en compte en matière de durabilité des véhicules électriques. Il s'agit actuellement d'une préoccupation mineure car la plupart des véhicules électriques sont relativement récents, mais elle deviendra plus importante à l'avenir.
Il est donc encourageant que le projet de développement de CATL en Indonésie comprenne également une composante de recyclage des batteries.
Enfin, il faut savoir qu'à l'heure actuelle, la plupart des batteries des véhicules électriques sont produites en Chine, généralement dans des usines anciennes qui fonctionnent aux combustibles fossiles.
Il faut s'attendre à ce que les projets les plus récents, tels que ceux qui seront construits en Indonésie, soient basés sur les énergies renouvelables.