Elnaz Rekabi, de l'interview forcée à l'accueil héroïque en Iran
Elnaz Rekabi, la jeune athlète iranienne historique de l'escalade, est rentrée à Téhéran mercredi matin sous les acclamations du peuple iranien venu l'accueillir au terminal de l'aéroport Khomeini. Comme le rapporte Qatar Airways, la concurrente iranienne a atterri à 3 h 40, heure locale, où elle a été accueillie par une grande foule de personnes qui, selon les médias iraniens, étaient là pour empêcher l'arrestation de l'athlète.
Une fois atterrie, l'athlète, après avoir été acclamée par le peuple iranien, selon différents médias iraniens qui étaient sur place, a été entourée d'une camionnette appartenant au comité des athlètes (il convient de noter qu'elle seule est revenue) et deux "journalistes" de la télévision d'État IRNA l'ont interrogée sur ce qui s'était passé. Elle était manifestement nerveuse et a subi la pression des journalistes, car elle s'est contentée de répéter ce qu'ils lui demandaient dans un dialogue apparemment scénarisé. Elle a dit dans son Insta Story que c'était un accident.
L'un d'eux lui a demandé si le public avait profité de l'erreur qui lui est arrivée. Elle est d'accord. L'autre dit que des rumeurs ont couru sur sa disparition. Elle dit qu'elle va très bien et qu'elle est rentrée de Séoul comme prévu. Avec cette "interview", qui est une confession publique, ils veulent l'humilier, lui faire peur ainsi qu'à sa famille (son frère a été arrêté) et montrer aux autres comment ils se comporteront s'ils osent de tels actes à l'étranger.
Elnaz Rekabi avait participé aux jeux sud-coréens sans le hijab islamique obligatoire. A la fin de ce tournoi, il n'y avait aucune information sur elle. L'entourage le plus proche d'elle a informé IranWire que Reza Zarei, le chef de la Fédération d'alpinisme de la République islamique d'Iran (IFSC), après avoir confisqué le passeport et le téléphone portable d'Elnaz Rekabi, l'a emmenée à l'ambassade de la République islamique d'Iran à Séoul pour un retour définitif en Iran. L'ambassade d'Iran en Corée du Sud a démenti, sur son compte Twitter, les informations faisant état de sa disparition après la compétition. Les responsables iraniens ont démenti ce qu'ils ont qualifié de "fake news, mensonges et fausses informations" à son sujet.
Mardi, alors qu'on était sans nouvelles d'Elnaz Rekabi depuis des heures, un texte similaire aux "confessions forcées" a été posté sur sa page Instagram de la République, alléguant qu'"il y avait une mauvaise planification et j'ai été appelée à grimper de manière imprévisible". Cette information contraste avec celle d'une personne proche de l'athlète qui a déclaré à IranWire qu'Elnaz avait décidé de participer à la compétition sans le hijab il y a un mois. Elle a ajouté qu'elle avait peur pour la sécurité physique de son mari, qui vit en Iran, et qu'elle a donc décidé de ne pas demander l'asile à Séoul.
La journaliste de la BBC Rana Rahimpour a expliqué que le langage utilisé dans ce post semble avoir été écrit sous pression. Le message a ensuite été retiré du réseau social. Rahimpour a déclaré que les femmes iraniennes qui ont vécu la même situation de ne pas porter le voile lors de compétitions sportives ont été poussées par les autorités à présenter des excuses publiques pour avoir enfreint la moralité islamique.
La peur et l'anxiété concernant l'état de Rekabi sont réelles. Trompée par l'ambassade d'Iran, l'athlète s'est vu promettre d'être renvoyée dans son pays d'origine sans conséquences si elle se présentait à l'ambassade. Le service persan de la BBC a rapporté, lundi 17 octobre 2022, que le téléphone portable et le passeport de l'athlète avaient été confisqués à son arrivée en Iran après sa participation à l'événement sportif. Elle a quitté l'hôtel de Séoul deux jours avant la date prévue.
Maintenant, après son arrestation, Rekabi sera envoyé directement à la prison d'Evin, selon IranWire. Evin, à Téhéran, est la prison où la République islamique incarcère ses prisonniers politiques. C'est aussi la prison qui a brûlé le week-end dernier dans des circonstances qui restent floues. Selon les autorités iraniennes, huit personnes sont mortes d'inhalation de fumée dans l'incendie. Parmi les prisonniers politiques détenus à Evin figurent deux hommes d'affaires iraniens ayant la nationalité américaine, Siamak Namazi et Emad Sharghi, qui sont accusés d'espionnage. L'administration Biden suit de près l'évolution de la situation.
Pendant ce temps, la violence et la répression des manifestations se poursuivent en Iran un mois après leur début. Des estimations indépendantes font état de plus de 230 morts, mais le chiffre pourrait être plus élevé : les autorités iraniennes ne donnent pas de chiffre exact, et ce sont les organisations de défense des droits de l'homme, exilées hors du pays, qui tentent de compiler le nombre de morts, qui ne cesse de croître.