Les déclarations d'Emmanuel Macron dans un message de soutien au président algérien ont fortement irrité l'opposition algérienne  

De fortes critiques en Algérie contre Emmanuel Macron  

PHOTO/REUTERS - PHOTO/REUTERS - Le président algérien Abdelmadjid Tebboune 

La première vague de COVID-19 avait mis fin aux manifestations en Algérie ; la deuxième vague a plongé l'État algérien dans la léthargie. 28 jours après son admission à l'hôpital militaire d'Aïn Naadja près d'Alger et son évacuation vers l'Allemagne le 28 octobre, le président Abdelmadjid Tebboune n'est toujours pas réapparu dans la sphère publique. Sa dernière apparition publique remonte au 15 octobre, pour l'instant sa santé est le plus grand secret d'État.  

Dans une interview accordée au magazine Jeune Afrique le 20 novembre, le président français a déclaré : "Je ferai tout ce qui est en mon pouvoir pour aider le président Tebboune dans cette période de transition. Il est courageux (...) On ne change pas un pays, des institutions et des structures de pouvoir en quelques mois".  

L'engagement du président français Emmanuel Macron de "tout faire" pour aider son homologue Abdelmadjid Tebboune "pour que la transition en Algérie soit réussie" a été sévèrement critiqué dans les rangs de l'opposition, qui l'a perçu comme une "ingérence" dans les affaires du pays.  

“M. Macron se croit autorisé à distribuer des certificats de légitimité aux dirigeants des peuples indigènes que nous sommes", a condamné le Rassemblement pour la culture et la démocratie (RCD), l'un des principaux partis laïques d'opposition.  

PHOTO/AFP -Emmanuel Macron, presidente francés 

"Il y a aussi des choses qui ne sont pas dans nos règles et que nous aimerions voir changer", a déclaré le chef de l'Etat français, en référence aux arrestations des militants de Hirak et à la situation des médias critiquée par les ONG algériennes et internationales. "Je ne suis jamais dans la position d'un orateur ou d'une invective. L'Algérie est un grand pays. L'Afrique ne peut pas réussir sans l'Algérie", a-t-il déclaré. 

"Dans le cas de l'Algérie, elle s'autorise à délivrer un certificat de confiance au chef de l'Etat (...). Ce n'est pas une simple ingérence, mais la révélation que la France est en charge d'une feuille de route pour notre pays", a accusé le parti RCD dans un communiqué publié à Alger.  

L'express politique Karim Tabou, président de l'Union démocratique et sociale (parti non légalisé) et figure du mouvement de protestation contre le régime (Hirak), va plus loin et qualifie la France de "raciste" : "Une France qui ne veut pas accepter que des forces démocratiques, une jeunesse émancipée, une jeunesse capable de contester le sous-développement puissent émerger dans ce pays", cite le quotidien francophone El Watan.  

Le Mouvement de la Société pour la Paix (MSP), principal parti islamiste, a pour sa part sanctionné une France qui "se retire" de la scène internationale et qui "n'a pas honte de revenir à ses vieilles habitudes d'ingérence dans les affaires intérieures de ses anciennes colonies".  

La presse algérienne, pour sa part, est très critique à l'égard de ces déclarations qui ravivent les vieux souvenirs d'un passé colonialiste. Le quotidien arabe Echourouk estime également que les propos du président français ont ravivé "la controverse sur l'ingérence française".   

"Paris pèse lourdement sur l'espace régional auquel appartient l'Algérie (...). Parfois, cette influence va jusqu'à confondre coopération et ingérence", écrit le quotidien francophone Liberté, proche de l'opposition. "Elle livre aujourd'hui un pur extrait de la pensée néocoloniale", déplore le chroniqueur de Liberté Mustapha Hammouche.  

En affirmant que "la France a fait beaucoup de gestes" et que l'important est "de faire un travail historique et de réconcilier les mémoires" au lieu de "s'excuser", M. Macron a "mis des limites au processus actuel qu'il a engagé avec son homologue algérien", analyse El Khabar.