Le meurtre du dissident chiite de l'organisation, Lokman Slim, a déclenché une sonnette d'alarme en pleine impasse politique

Le Hezbollah répand la peur face à la nouvelle vague de meurtres au Liban

PHOTO/REUTERS - Des militants tiennent des morceaux de papier portant les mots arabes "zero fear" lors du service commémoratif pour rendre hommage à Lokman Slim, un éditeur et militant chiite, qui a été retrouvé mort dans sa voiture, à Beyrouth, au Liban, le 11 février 2021

Un militant politique et essayiste libanais bien connu, critique de la milice du Hezbollah, a été retrouvé mort le 4 février, selon les responsables de la sécurité et de la médecine légale. Il s'agit de Lokman Slim, un chiite de 58 ans. Les forces de sécurité ont retrouvé sa voiture à minuit sur une route rurale près du village d'Addoussieh au Sud-Liban, une région où le Hezbollah maintient une forte présence.  

Les critiques de Slim à l'égard de l'organisation ont fait de lui la cible d'attaques de la part de partisans du mouvement armé, qui l'ont qualifié de façon désobligeante de "chiite d'ambassade", un terme qu'ils utilisent pour accuser les opposants d'être des marionnettes américaines. Dans une récente interview télévisée, Slim a accusé le Hezbollah d'être responsable de l'explosion qui a déchiré le port de Beyrouth le 4 août dernier, tuant plus de 200 personnes. 

Le Hezbollah a été désigné comme le principal suspect de ce meurtre, bien que le chef du groupe, Hassan Nasrallah, ait rejeté les accusations de tout lien avec la mort du militant et soit même allé jusqu'à condamner le meurtre. Cependant, l'opinion publique libanaise considère que le groupe est derrière le meurtre. 

Una imagen tomada de la televisión Al-Manar de Hizbulá el 3 de enero de 2020, muestra a Hassan Nasrallah, jefe del movimiento chií, pronunciando un discurso televisado desde un lugar no revelado de Líbano

Un rapport publié par le journal du Washington Institute for Near East Policy and Foreign Policy a noté que l'assassinat de Salim envoie un message aux militants et aux critiques du Hezbollah au Liban, et pourrait également être un message pour tester la réaction de la communauté internationale. Surtout, pour déterminer les lignes rouges imposées par l'administration Biden et la France.  

Le rapport note également que de nombreux collègues de Slim craignent désormais que le Hezbollah ne lance une série d'assassinats similaires à celui qu'il a commis après l'assassinat de l'ancien Premier ministre libanais Rafic Hariri en 2005, pour s'arrêter ensuite lorsque l'organisation elle-même a pris le contrôle des institutions du pays trois ans plus tard.  

Ayman Mhanna, directeur exécutif de la Fondation Samir Kassir, a confirmé les intentions du rapport, avertissant que l'assassinat était un message adressé aux militants, en particulier aux chiites, et un signe que les assassinats ciblés ne sont plus nécessairement liés à "des noms de famille, mais à des personnes qui ont une influence sur la formation de l'opinion publique, la formation des idées". 

Una imagen de archivo tomada de una entrevista de AFP TV realizada el 19 de noviembre de 2018 muestra al prominente activista libanés Lokman Slim
Le soutien du Hezbollah au Président Aoun

Pendant ce temps, le président et le premier ministre désigné du Liban, Michel Aoun et Saad Hariri, respectivement, ont de nouveau échangé cette semaine des accusations sur le processus de formation d'un nouveau gouvernement qui est au point mort. Il y a quelques jours à peine, ils ont tenu une réunion après deux mois pour tenter de résoudre la crise, qui s'est terminée sans progrès.  

Le Premier ministre Hariri, chef du parti du Mouvement du Futur à tendance sunnite, a attaqué le président Aoun, chef du Mouvement patriotique libre, centriste et laïque, lié au Hezbollah, pour avoir bloqué la formation de l'exécutif en insistant sur son droit de veto et a nié que sa dernière proposition, présentée le 9 décembre, était une violation des pouvoirs constitutionnels du président. 

El primer ministro libanés designado, Saad Hariri, habla durante el 16º aniversario del asesinato de su padre, el ex primer ministro libanés Rafik Hariri, en Beirut, Líbano, el 14 de febrero de 2021

L'intention de Hariri, fils de l'ancien Premier ministre assassiné Rafic Hariri, est d'inclure un gouvernement de 18 technocrates pour mettre en œuvre les réformes prévues par l'initiative présentée par le Président français, Emmanuel Macron, suite aux explosions du 4 août 2020 dans le port de la capitale, Beyrouth. 

Pour sa part, le leader du Hezbollah a exprimé son soutien au président du pays, Michel Aoun, et a critiqué le Premier ministre Saad Hariri pour sa dernière proposition de résolution de la crise. "Je pense que personne ne souhaite que le gouvernement ne soit pas formé. Il est dans l'intérêt de tous que cela se produise et il est inacceptable d'attendre des puissances étrangères", a-t-il déclaré. Bien qu'il ait ajouté que "tenir le président seul responsable est injuste". 

El presidente de Líbano, Michel Aoun

Ainsi, M. Nasrallah a déclaré qu'il comprenait la position de M. Hariri sur son refus de permettre à un bloc politique d'avoir un tiers des sièges, ce qui lui donnerait un droit de veto, bien qu'il ait déclaré qu'il "ne comprenait pas son insistance sur le ministère de l'Intérieur et sur le fait qu'il y a 18 ministres" au sein de l'exécutif. Nasrallah ne considère pas qu'il soit nuisible de demander une aide internationale, cependant, il a ajouté qu'une internationalisation totale du processus "ne résoudra pas les problèmes, mais les aggravera".

Hariri a été nommé en octobre, près d'un an après avoir démissionné de son poste, au milieu d'une nouvelle vague de protestations populaires contre son gouvernement. Cette nomination, reçue avec malaise par la population, est intervenue en l'absence d'accord sur un autre candidat suite à la démission du Premier ministre de l'époque, Hassan Diab, qui est en poste jusqu'à la formation du nouveau gouvernement.