Après le coup d'État au Niger

La junte militaire nigérienne souhaite coopérer avec les alliés russes que sont le Mali et le Burkina Faso

Esta imagen de captura de fotograma de vídeo obtenida por AFP de ORTN - Télé Sahel el 26 de julio de 2023 muestra al coronel mayor Amadou Abdramane (C), portavoz del Comité Nacional para la Salvación del Pueblo (CNSP) hablando durante una declaración televisada - PHOTO/ORTN-TÉLÉ SAHEL/AFP
PHOTO/ORTN-TÉLÉ SAHEL/AFP - Cette image obtenue par l'AFP auprès de l'ORTN - Télé Sahel le 26 juillet 2023 montre le colonel-major Amadou Abdramane (C), porte-parole du Comité national pour le salut du peuple (CNSP) s'exprimant lors d'une déclaration télévisée

La junte militaire nigérienne qui a mené le coup d'État contre le président Mohammed Bazoum, un allié stratégique de la France, a déclaré qu'elle était favorable à la coopération avec les pays voisins, le Mali et le Burkina Faso, qui sont déjà dirigés par des juntes putschistes et qui ont renforcé leurs liens avec la Russie.

Le gouvernement déchu du Niger, l'un des pays les plus pauvres d'Afrique, était le principal partenaire de la France dans la région instable du Sahel et gardait une distance prudente avec le Mali et le Burkina Faso, qui sont ouvertement anti-français depuis les coups d'État de 2021 et 2022.

La France a 1 500 militaires déployés sur le territoire nigérian et d'importants intérêts économiques dans l'exploitation de l'uranium, une situation qui pourrait désormais changer.

Prise de distance avec la France

Jeudi, la junte putschiste - organisée au sein du Conseil national pour la sauvegarde de la patrie (CLSP) - a accusé dans un communiqué la France de l'atterrissage d'un avion militaire à l'aéroport international de Niamey, malgré la fermeture de la frontière décrétée la veille par les militaires.

Le lendemain, la junte a publié un autre communiqué, plus sévère, mettant en garde contre "toute intervention militaire étrangère" en collaboration avec "certains anciens dignitaires réfugiés dans des chancelleries", sans donner plus de détails. Les réseaux sociaux ont signalé la présence de militaires français dans la capitale nigérienne, Niamey.

Le coup d'État nigérien intervient dans un contexte de montée des tensions contre la France - ancienne puissance colonisatrice - dans le Sahel, notamment au Mali et au Burkina Faso, dont les gouvernements putschistes ont, ces derniers mois, expulsé les forces françaises de la mission antiterroriste Barkhane.

Les militaires français se sont alors réfugiés au Niger et au Tchad pour y poursuivre la lutte contre le terrorisme, mais leur avenir au Niger est désormais incertain.

Rapprochement avec la Russie ?

Bien que le Niger n'ait pas participé au sommet Russie-Afrique qui s'est tenu cette semaine à Saint-Pétersbourg, la presse russe a rapporté que le chef du groupe mercenaire Wagner, Yevgeny Prigozhin, y a rencontré des représentants nigériens.

Il a également rencontré des représentants du Mali, où Wagner opère depuis des mois, et de la République centrafricaine, où des mercenaires russes assureront la sécurité lors du référendum constitutionnel de dimanche.

Simultanément, un enregistrement d'une déclaration présumée de Prigozhin soutenant le coup d'État au Niger a circulé sur les canaux Telegram proches de Wagner. "Ce qui s'est passé au Niger n'est rien d'autre que la lutte du peuple nigérien contre les colonisateurs", a-t-il déclaré.

ORTN - Télé Sahel / AFP
ORTN - Télé Sahel / AFP

Le président nigérien déchu Mohammed Bazoum a déclaré à Jeune Afrique dans une interview en mai dernier qu'il s'inquiétait de l'influence de Wagner et de la possibilité d'un coup d'État soutenu par eux. "Nous vous observons", avait-il averti les "gens" qui, selon lui, voulaient "utiliser" Wagner à cette fin.

Lors de sa première intervention, le chef autoproclamé de la junte putschiste CLSP, le général Abdourahamane Tiani, a reproché à Bazoum son refus de collaborer avec le Burkina Faso et le Mali alors que ces trois pays partagent le territoire africain le plus actif sur le plan djihadiste, ouvrant ainsi la porte à un rapprochement avec leurs voisins.

Les trois pays partagent en effet la zone dite "des trois frontières", où convergent les trois pays. Il s'agit d'un vaste et dangereux territoire désertique qui connaît une recrudescence du djihadisme, avec des attaques hebdomadaires menées par des groupes fidèles à Al-Qaïda et à l'État islamique, eux-mêmes engagés dans des luttes sanglantes pour leur contrôle.

La région souffre non seulement du terrorisme et de l'instabilité politique, mais aussi des conséquences du changement climatique. Rien qu'au Niger, 4,3 millions de personnes (sur une population de 26 millions) dépendent de l'aide humanitaire, selon l'ONU, qui dénombre 370 000 déplacés internes et 250 000 autres réfugiés du Mali, du Burkina et du Nigéria, ce qui en fait l'une des zones les plus sensibles de la planète.